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COUSIN, Jules
Mis à jour le 13 janvier 2009
(4 mars 1830, Paris – 19 février 1899, Paris)
Auteur(s) de la notice :
CANTARUTTI Stéphanie
Profession ou activité principale
Bibliothécaire, conservateur de musée
Autres activités
Historien de l’art, collectionneur
Sujets d’étude
Histoire de Paris, nomenclatures des rues de Paris, bibliothéconomie
Carrière
1856-1870 : surnuméraire puis sous-bibliothécaire à la bibliothèque de l’Arsenal (à partir de 1862)
1859-1866 : collabore à la Revue universelle des arts et publie divers articles d’archéologie parisienne
1870- 1871 : bibliothécaire de la bibliothèque de l’Hôtel de Ville de Paris
1871- 1895 : bibliothécaire de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris
1872 : obtient que les collections de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris soient mises en place à l’hôtel Carnavalet
1874 : création de la Société d’histoire de Paris dont il est l’un des fondateurs et promoteurs
1875 : ouverture au public de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, riche de quelque 18 000 volumes et 8 000 estampes
1880 : obtient la fusion de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris et du musée Carnavalet et se fait nommer conservateur des deux établissements
1881 : la Bibliothèque historique de la Ville de Paris accepte la donation de Liesville qui comprend d’importantes collections relatives à l’histoire de la Révolution française ; accroissement massif des collections de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris
1882 : élu président de la Société d’histoire de Paris, dont il restera l’un des membres du conseil jusqu’en 1894
1893 : cède la direction de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris à son disciple Louis Faucou qui meurt un an plus tard, le forçant alors à réintégrer provisoirement ses fonctions jusqu’en 1895
1895 : départ définitif à la retraite
1899 : décède l’année où la Bibliothèque historique de la Ville de Paris quitte l’hôtel Carnavalet, où elle était installée depuis 1871, pour l’hôtel Le Peletier de Saint-Fargeau
Chevalier de la Légion d’honneur (1884) ; médaille d’or frappée en son honneur sur proposition du conseil municipal de Paris à l’occasion de son départ à la retraite (1893) ; officier de la Légion d’honneur (1898)
Étude critique
Parisien de naissance et de cœur, Jules Cousin entre en 1856 comme surnuméraire à la bibliothèque de l’Arsenal à Paris. S’étant constitué très jeune une collection de livres et d’estampes sur l’histoire de Paris, cet emploi lui donne le loisir d’étudier de manière approfondie les collections de la bibliothèque et d’exhumer des trésors de bibliophilie. Il lui permet également de rencontrer de nombreux érudits, dont Anatole de Montaiglon, Paul Lacroix, Lorédan Larchey de la bibliothèque Mazarine ou encore Charles Read, fonctionnaire à l’Hôtel de Ville et fondateur de la revue L’Intermédiaire des chercheurs et curieux, à laquelle Cousin collaborera à plusieurs reprises. Sa position à la bibliothèque de l’Arsenal lui donne l’occasion de participer aux brillantes causeries de ses collègues, d’affiner son goût pour l’art et l’histoire, et lui permet de publier les manuscrits inédits qu’il découvre à l’Arsenal. Ses premières études disent son goût pour les sujets historiques pittoresques ainsi que pour l’histoire du vieux Paris et de ses monuments. Charles-Augustin Sainte-Beuve, dans ses célèbres Lundis, fait ainsi l’éloge de son Comte de Clermont et sa cour, étude réalisée à partir de sources originales inédites.
En septembre 1870, il obtient une promotion et devient responsable de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, à l’Hôtel de Ville. Cependant, moins de six mois plus tard, le 24 mai 1871, un incendie provoqué par les événements de la Commune détruit entièrement le bâtiment, sa bibliothèque, ainsi que la majorité des collections rassemblées en vue de la création d’un musée municipal. Cousin devient un bibliothécaire sans bibliothèque. Cet événement tragique se révèle paradoxalement pour Cousin l’occasion de créer une nouvelle bibliothèque, proche de ses centres d’intérêt et spécialisée dans l’histoire de Paris. Pour convaincre la municipalité, il offre sa collection personnelle, riche de 6 000 livres et 10 000 estampes, afin de constituer le noyau du nouvel établissement. Le climat politique est alors très favorable : au lendemain de la défaite de 1871, le développement de l’histoire locale est vu comme une réponse au pangermanisme de l’historiographie allemande. Souhaitant donner à la nouvelle bibliothèque le rayonnement qui sied à un grand chantier culturel, la municipalité parisienne lui octroie par ailleurs de larges crédits pour la dotation de ce nouvel établissement.
Dès 1871, le préfet de la Seine décide, sur proposition du secrétaire général de la préfecture, la création officielle de cette nouvelle bibliothèque, d’un genre tout à fait nouveau pour Paris. La Ville décide alors de séparer désormais bibliothèque publique, à destination du public, et bibliothèque administrative, réservée aux agents municipaux. En devenant le premier conservateur de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, Cousin, excellent connaisseur de la bibliographie parisienne, lui donne son orientation définitive et recentre ses collections sur l’histoire de Paris, en n’omettant aucune de ses branches (histoire politique, description physique, histoire religieuse, littéraire, artistique…).
Pour autant, ces efforts en faveur de l’expansion de la bibliothèque ne sont pas toujours appréciés à leur juste valeur. Dès le mois d’août 1871, une polémique éclate : la presse dénonce la fin des efforts de la Ville en faveur de la constitution d’un musée, au profit d’une nouvelle bibliothèque. Cousin, pour qui une collaboration entre les deux établissements est possible, résoudra ce problème en 1880, en prenant la tête de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris et des collections historiques de la Ville de Paris, plus tard musée Carnavalet.
Cousin mène pour la bibliothèque une politique d’acquisitions exigeante et sélective. Si les manuscrits anciens sont déjà rares à cette époque, il est en revanche beaucoup plus facile de se procurer de nombreux imprimés : histoires et dictionnaires de Paris, guides, monographies d’édifices, de quartiers ou de rues, biographies, traités d’architecture… Cousin réunit ainsi une grande part de la production imprimée du XVIe au XIXe siècle, à laquelle on peut ajouter les gazettes, les périodiques, des collections d’estampes, de cartes et plusieurs exemplaires rarissimes de plans de Paris de l’Ancien Régime. Ses acquisitions de manuscrits sont également très diverses (autographes, recueils de chansons, archives d’églises, de collèges, correspondances diverses telle la correspondance de Nicolas Boileau, le fonds Camille Desmoulins, des papiers d’architectes, d’hommes politiques, d’écrivains…). Pour Cousin, le point commun de ces différentes sources est de pouvoir renseigner de la manière la plus large possible les différentes branches de l’histoire de Paris. Il devient alors évident, que telle que la comprend Cousin, la Bibliothèque historique de la Ville de Paris doit revêtir à la fois un rôle de mise à disposition du public, mais également un rôle essentiel pour la conservation du patrimoine parisien.
La connaissance du marché héritée par Cousin de son activité de collectionneur lui permet de sélectionner les pièces qui lui semblent les plus intéressantes pour la bibliothèque. Il mène en parallèle de ses nombreux achats, une politique dynamique d’échanges d’ouvrages avec Léopold Delisle, alors administrateur de la Bibliothèque nationale. Il incite enfin les collectionneurs à participer à cet effort collectif pour la constitution d’un patrimoine commun à destination de tous les Parisiens. Animateur enthousiaste de recherches sur l’histoire parisienne, soucieux d’appuyer son action en la matière, Cousin devient en 1874 l’un des fondateurs de la Société de l’histoire de Paris. Son action s’inscrit dans la logique de l’époque, qui voit à la fin du XIXe siècle se multiplier les Sociétés locales d’histoire de Paris. La même année, Cousin inaugure à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris une série de communications savantes au nombre desquelles on peut citer la présentation en 1876 des premiers fascicules d’un ouvrage collectif et monumental, intitulé Paris à travers les âges et dont l’éditeur ainsi que tous les contributeurs, sont membres de la Société.
Il quitte définitivement la Bibliothèque historique de la Ville de Paris en 1895, après avoir consacré une grande partie de sa vie et de sa carrière au développement et à la mise en valeur d’un des fleurons du patrimoine parisien. La Bibliothèque historique de la Ville de Paris s’installera peu après la mort de Cousin à l’hôtel Le Peletier de Saint-Fargeau, avant d’être transférée en 1969 à l’hôtel de Lamoignon, non loin de là, où elle se trouve toujours aujourd’hui, menant une activité désormais distincte de celle du musée Carnavalet. Les successeurs de Cousin, Paul Le Vayer et Marcel Poète, poursuivront son œuvre dans le même sens, accroissant considérablement les collections et ajoutant de nouvelles sections à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris (cartes postales, photographies anciennes et surtout le fonds dit des Actualités). En 1910, sera créée la Société des amis de Jules Cousin.
Stéphanie Cantarutti, conservateur au musée Bourdelle
Principales publications
Ouvrages et catalogues d’expositions
- L’Hôtel de Beauvais, rue Saint-Antoine. Paris : Revue universelle des arts, 1865.
- Le Tombeau de Watteau à Nogent-sur-Marne. Notice historique sur la vie et la mort d’Antoine Watteau, sur l’érection et l’inauguration du monument élevé par souscription en 1865.Nogent-sur-Marne : Évecque, octobre 1865.
- Le Comte de Clermont, sa cour et ses maîtresses. Lettres familières, recherches et documents inédits publiés par Jules Cousin. Paris : Académie des bibliophiles, 1867.
- Secrets magiques pour l’amour, octante et trois charmes, conjurations, sortilèges et talismans par un bibliomane, Jules Cousin ; publiés d’après les manuscrits de Paulmy. Paris : Académie des bibliophiles, 1868.
- Les Derniers Vestiges du vieux Paris dessinés et gravés d’après nature par J. Chauvet et E. Champollion, avec de courtes notices historiques rédigées sous la direction de M. Jules Cousin. Paris : H. Menu, 1876.
- Plan de Paris sous le règne de Henri II par Olivier Truschet et Germain Hoyau, reproduit d’après l’exemplaire unique de la bibliothèque de Bâle par M. F. Hofflauër, sous la direction de MM. L. Sieber et Jules Cousin. Paris : H. Champion, 1877.
- L’Hôtel Carnavalet et la bibliothèque de la Ville de Paris. Notice descriptive des sculptures qui décorent l’édifice et des objets exposés dans les salles de la Bibliothèque. Paris : Hôtel Carnavalet, 1878.
- Notice sommaire des monuments et objets divers relatifs à l’histoire de Paris et de la Révolution française exposés au musée Carnavalet suivant l’ordre des salles parcourues par les visiteurs. Orléans : impr. G. Jacob, 1881.
- Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France. Assemblée générale du 8 mai 1883. Allocution de M. Jules Cousin, président. La Bibliothèque et le musée Carnavalet. Nogent-le-Rotrou : impr. De Daupeley-Gouverneur, 1883.
- Cris de Paris au XVIe siècle. Dix-huit planches gravées et coloriées du temps, reproduites en fac-similé d’après l’exemplaire unique de la bibliothèque de l’Arsenal, par Adam Pilinski, avec une notice historique sommaire, par M. Jules Cousin. Paris : Vve A. Labitte, 1885.
- De la nomenclature des rues de Paris. Nogent-le-Rotrou : impr. De Daupeley-Gouverneur, 1899.
Articles
- « Les Résidences de Mazarin à Paris ». In Amédée Renée. – Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au XVIIe siècle. Paris : Firmin-Didot frères, fils et Cie, 1856.
- « Les Cafés de Paris en 1772, d’après les Tablettes royales de renommée par le Sieur Rose de Chantoiseau ». La Revue de poche, 15 juillet 1867.
- « Notice sur un plan de Paris du XVIe siècle, nouvellement découvert à Bâle ». Mémoires de la Société de l’histoire de Paris, t. I, 1875, p. 44-70 et 71-112.
- « La Conférence historique des conseillers de ville au XVIIIe siècle . Bulletin de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, novembre-décembre 1885.
- « L’Hôtel Carnavalet. L’édifice. Les collections ». In Henry Havard, dir. – La France artistique et monumentale, Société de l’art français. Paris : À la librairie illustrée, 1892, t. I.
- « La Cité entre le pont Notre-Dame et le pont au Change ». In Hoffbauer Fedor, dir., et al. – Paris à travers les âges, aspects successifs des monuments et quartiers historiques de Paris depuis le XIIIe siècle jusqu’à nos jours, fidèlement restitués d’après les documents authentiques par M. F. Hoffbauer. Paris : Firmin-Didot et Cie, 1875-1882, 2 vol.
Bibliographie critique sélective
- Sainte-Beuve Charles-Augustin. – « Le Comte de Clermont et sa cour. Par M. Jules Cousin ». Nouveaux Lundis, t. XI. Paris : M. Lévy frères, 1863-1872.
- Bernadille. – « La Bibliothèque de l’hôtel Carnavalet et son bibliothécaire ». « Chronique parisienne ». Le Français, 11e année, 29 octobre 1878, n° 297, p. 2-3.
- Anonyme. – « Jules Cousin, biographie d’un musée et d’un homme ». La Plume, 4e année, 15 janvier 1892, n° 66, p. 31-32.
- L’Intermédiaire des chercheurs et curieux, 20 décembre 1893.
- La Nouvelle de l’Intermédiaire, n° 17.
- Müntz Eugène. – « Discours prononcé le 9 mai 1899 ». Bulletin de la Société de l’histoire de Paris, 1899, 20e année, p. 71.
- Tourneux Maurice. – « Jules Cousin ». Chronique des arts et de la curiosité, 25 février 1899, n° 8, p. 73-74.
- Bournon, Fernand. – « M. Jules Cousin ». Saint-Denis : impr. H. Bouillant, 1899 [extrait de la Correspondance historique et archéologique, année 1893].
- Anonyme. – « Chronique ».Correspondance historique et archéologique, 1899, 6e année, p. 49.
- Lacombe Paul. – « Jules Cousin, conservateur de la Bibliothèque et des collections historiques de la ville de Paris (musée Carnavalet), 1830-1899 ». Bulletin du bibliophile et du bibliothécaire, 1899, p. 309-324, 378-386, 427-440, 479-489, 535-547 et 597-613.
- Lacombe Paul. – « Souvenirs d’un ami ». Paris : H. Leclerc, 1900.
- Bournon Fernand. – « Jules Cousin ». La Cité, t. II, 1904-1905, p. 479-482.
- Dubois Madeleine. – Les Origines du musée Carnavalet, la formation des collections et leur accroissement, 1870-1897. Thèse, École du Louvre, 1947, 462 feuillets dactylographiés.
- Surirey de Saint Remy Henry (de). – « Jules Cousin fondateur de la Bibliothèque historique ». Bulletin de la Société des amis de la Bibliothèque historique, 1974, n° 1, p. 1-13.
- Vasseur-Depoux Michèle. – Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France : la Bibliothèque historique de la Ville de Paris. Paris : Bibliothèque nationale de France, 1975.
- « Constitution d’un patrimoine parisien. La Bibliothèque historique depuis l’incendie de 1871 ». [catalogue de l’exposition ], Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, hôtel de Lamoignon. 12 juin-31 juillet 1980. Paris : imprimerie municipale, 1980. XX p.
Sources identifiées
Paris, archives de la Légion d’honneur
Paris, Archives nationales
- Série LH, dossier d’instruction cote L0618047
Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris
- Papiers et correspondances diverses
- Archives administratives concernant l’hôtel Carnavalet
- Archives administratives (diverses notes et rapports) concernant la création et l’installation de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris et du musée Carnavalet à l’hôtel Carnavalet et l’estimation des collections
- Papiers Liesville I
- Note à M. Alphand sur quelques aménagements à exécuter d’urgence à Carnavalet pour y établir de suite le dépôt de la Bibliothèque de la Ville, 12 juillet 1871
- Note à M. le secrétaire général sur la nécessité urgente de nous faire attribuer à l’hôtel Carnavalet un local présentement vacant pour servir de dépôt et de bureau provisoires à la Bibliothèque de la Ville, 27 juillet 1871
- Classification et division du service des bibliothèques de la Ville, 5 juillet 1871
- Note sur la nécessité de presser les travaux d’installation, 23 mai 1872
- Rapport sur la Bibliothèque de la Ville de Paris, juin 1872
Paris, musée Carnavalet
- Correspondance de Jules Cousin avec sa mère et sa sœur (1852 à 1899) relatives à ses préoccupations en tant que conservateur de la Bibliothèque de l’Hôtel de Ville puis de conservateur de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris et du musée Carnavalet
- Correspondance de Cousin avec Charles Read à propos de sa nomination au poste de conservateur de la Bibliothèque de l’Hôtel de Ville de Paris
- Notes sur la destruction totale de la bibliothèque et les premières mesures à prendre pour la reconstituer, rapport adressé au préfet de la Seine par le bibliothécaire de la Ville à sa rentrée à Paris, juin 1871