Auteur(s) de la notice : CHEVALIER Nicole

Profession ou activité principale

Architecte

Autres activités
Voyageur, artiste, orientaliste

Sujets d’étude
Architecture antique, islamique et médiévale, Renaissance et contemporaine

Carrière
1814-1815 : École des beaux-arts de Paris
1817-1822 et 1823-1827 : deux missions en Égypte comme architecte auprès du vice-roi Méhémet-Ali
1829-1862 : professeur à l’École d’architecture de Marseille ; publication d’une Carte de la Basse-Égypte (1829)
1833-1834 : construction à Marseille des églises Saint-Lazare puis Saint-Joseph
1835 : mission à Tunis : chargé d’exécuter des travaux dans le port de la Goulette
1839 : publication d’Architecture arabe, ou Monuments du Kaire
1839 : choisi par l’Académie royale des beaux-arts pour partir en Perse afin d’y procéder avec Eugène Flandin au relevé des monuments anciens et modernes dans le cadre de l’ambassade du comte de Sercey (1839-1842)
1844-1845 : architecte en chef de la ville de Marseille
1845-1860 : intense activité architecturale : bâtiments religieux – églises Saint-Barnabé (1846), de Mazargues (1848), chapelle du cercle religieux (1860) ; utilitaires – marché de la place de Rome (1844-1845), s-abattoirs d’Arenc (1846-1851), maison de M. Altaras place des Chartreux, fontaines des cours Saint-Louis et Belzunce (1846), projet d’une prison (1851) ; éphémères – pavillons des bouquetières du cours Saint-Louis
1847 : mission au Maroc : chargé par le ministère des Affaires étrangères du projet d’un hôtel pour le consulat général de France à Tanger
1852-1860 : travaux du palais de la Bourse
1867 : grande exposition internationale du Champs de Mars à Paris : parution du volume Monuments modernes de la Perse offert à Napoléon III
1871-1872 : construction du tombeau de la famille Camille Olive

Membre de l’Académie de Marseille (1836) ; de la Société centrale des architectes ; de la Société de statistique de Marseille ; membre correspondant de la Commission des arts et monuments de France (1844) ; du Royal Institute of British Architects (1848) ; de l’Académie d’archéologie de Rome ; de l’Académie des beaux-arts de l’Institut de France (1854)

Ordre du Lion et du Soleil de Perse (1840) ; chevalier de la Légion d’honneur (1842) ; officier de la Légion d’honneur (1862)

Étude critique

Architecte qui dote Marseille de monuments aussi nombreux que variés, grand voyageur qui, en orientaliste, offre au public les monuments de l’Égypte et de la Perse, Pascal Coste eut une existence particulièrement remplie. Une longue vie qui le conduisit jusqu’à quatre-vingt-douze ans lui permit de satisfaire son insatiable curiosité.

Jeune, Pascal Coste – attiré par l’architecture et le dessin – montre peu de goût pour le métier de menuisier exercé par son père Bernard Coste ; aussi est-ce auprès de Lequin-Latour, à l’école gratuite de dessin de Marseille puis, à partir de 1804, auprès de Michel-Robert Penchaud, architecte de la ville de Marseille et du département, qu’il reçoit une formation très complète qui lui permet d’intégrer, en 1814, l’École des beaux-arts de Paris dans la classe d’architecture d’Antoine Vaudoyer. Son retour à Marseille, en 1815, auprès de son ancien maître, est de courte durée. En 1817, sur la recommandation du géographe Edme-François Jomard, avec lequel il s’était lié d’amitié, Coste est appelé en Égypte où, pendant dix ans, il dirige d’importants travaux de génie civil – salpêtrière, canaux, tours télégraphiques… – en tant qu’architecte et ingénieur du vice-roi Méhémet-Ali alors engagé dans de grands projets de développement intérieur.

À partir de 1827 – date de son retour définitif d’Égypte – Coste, à l’instar de Penchaud puis, plus tard, de Léon Vaudoyer et de Jacques Henri Espérandieu, participe à l’effervescence architecturale qui va animer Marseille, en particulier sous la Seconde République et le Second Empire. Tout en donnant beaucoup de son temps à la formation des élèves à l’École d’architecture où il est professeur (1829-1860), il parsème le paysage urbain marseillais de nombreux monuments. Entre 1833 – date de la construction de l’église Saint-Lazare – et 1872 – date d’achèvement du tombeau de la famille Camille Olive –, Coste construit ou participe au projet de construction d’édifices très divers, sa grande œuvre restant le palais de la Bourse du commerce, cette institution considérable qui n’avait pas encore de siège digne de sa notoriété. Dès 1851, il conçoit les premiers plans et assume la responsabilité de l’ensemble de la création – la construction et la décoration – de ce bâtiment qui sera achevé et inauguré par Napoléon III en 1860. En 1844, la notoriété de Coste est telle qu’il est nommé au poste d’architecte en chef chargé de superviser tous les travaux en voirie et en architecture, poste créé par Élysée Reynard, maire de Marseille. Mais son manque de goût pour l’administration l’incite à démissionner l’année suivante.

Coste est également un grand voyageur. Peu d’hommes de son temps et à un âge aussi avancé ont autant voyagé. Année après année, toujours le crayon à la main, ayant développé auprès de Penchaud son goût pour le relevé des monuments antiques, il sillonne la France – multipliant les séjours à Paris –, parcourt l’Europe où, tour à tour, il visite l’Italie, l’Allemagne, la Hollande, la Belgique, l’Espagne, l’Angleterre, l’Irlande, l’Écosse, la Suisse – pour certains de ces pays y retournant plusieurs fois. En 1872, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans, il accomplit un dernier périple qui le conduit au Danemark, en Suède, à Saint-Pétersbourg et à Moscou, puis il s’en retourne par l’Autriche et la Suisse. Bien qu’il n’ait jamais restauré lui-même d’édifices, il visite un grand nombre de chantiers de restauration.

Surtout, son goût du voyage va de pair avec son amour pour l’Orient qu’il a appris à connaître en Égypte où il partit en architecte et revint en orientaliste. C’est à cette époque que remonte sa passion pour l’architecture islamique. Méhémet-Ali désirant faire construire deux mosquées, Coste visite la plupart des édifices religieux du Caire. De cette vaste enquête il rapporte de nombreux dessins qui donnent la matière, en 1839, à une magnifique publication sur les monuments du Caire réalisée à l’instigation de son ami l’architecte Jean Nicolas Huyot. Par cette étude, comme le souligne Eugène Viollet-le-Duc, « le premier, il mettait en lumière, et d’une manière assez complète, l’architecture si remarquable de cette partie de l’Orient ». En Égypte, Coste manifeste également son intérêt pour l’Antiquité. C’est en archéologue qu’il parcourt la vallée du Nil, du Delta à la première cataracte, s’attachant plus particulièrement aux monuments de la région memphite. Plus tard, son séjour en Tunisie (1835), où le conduit une de ses missions d’architecte, lui procure l’opportunité de se rendre entre autres à Carthage – site pour lequel il se passionne – et à El Djem. Aussi, lorsque le ministère des Affaires étrangères, à la demande de l’Académie royale des beaux-arts, décide que deux artistes accompagneront l’ambassade du comte de Sercey en Perse, le nom de Pascal Coste fait-il l’unanimité.

Accompagné du peintre Eugène Flandin, après une difficile traversée de la Méditerranée – avec une halte à Athènes et à Constantinople – et de la mer Noire, Tabriz, Qazvin, Téhéran, Qum, Ispahan, Persépolis et Shiraz constituent les principales étapes de ce périple en Perse qui se clôt par un long retour par Bagdad, Mossoul, Alep et Beyrouth (1839-1842). Le nombre et la variété des dessins, des plans, des relevés et des notes témoignent de l’activité des deux artistes. Coste dessine un nombre considérable de mosquées, de demeures, de caravansérails… Pour l’Antiquité, la région du Fars, à elle seule, retient les voyageurs pendant cinq mois ; les vestiges de Pasargades, Persépolis, Naqsh-i Rustam, Naqsh-i Radjab et des environs de Shiraz sont mesurés et dessinés, les inscriptions relevées. Tout ce corpus constituera un matériel de référence, comme le montre le volume V d’Histoire de l’art dans l’Antiquité que Georges Perrot et Charles Chipiez consacrèrent, en 1890, à la Perse.

À son retour, à part une brève mission en 1847 au Maroc, avec un détour par l’Algérie, Coste ne retourne plus en Orient. Toutefois, après sa publication avec Flandin des résultats de leur voyage, l’aventure persane n’est pas complètement close. En 1867, il publie Monuments modernes de la Perse, présenté à l’exposition internationale du Champ de Mars et remis à l’Empereur. Déjà en 1842, ses dessins montrés chez son ami Hippolyte Le Bas passionnent tous les grands noms de l’architecture et de l’archéologie, aussi leur publication remporte-t-elle un vif succès, notamment auprès de Viollet-le-Duc qui juge que « son second grand ouvrage sur les monuments modernes de la Perse est supérieur encore à celui qu’il publia sur Le Caire, et est fait pour célébrer bien des points obscurs de l’histoire architectonique de l’Orient ».

Curieusement, son expérience de voyageur-orientaliste et son goût pour l’art islamique influencent peu l’œuvre d’architecte de Coste – à l’exception du tombeau de la famille Camille Olive –, au grand étonnement de ses élèves, notamment de Joseph Letz, collaborateur d’Henri Jacques Espérandieu et successeur de Pascal Coste à l’Académie de Marseille : « Ce qui surprend dans l’œuvre de notre maître, c’est que lui, le voyageur-artiste, qui aimait passionnément l’Orient, lui qui a contemplé les monuments superbes de l’Égypte et de la Perse, étant de retour en Provence à Marseille […], il n’ait pas voulu entrer dans une voie nouvelle comme l’ont fait quelques architectes. Il aurait pu, s’il l’avait voulu, produire une œuvre qui se ressentit de cette science d’artiste qu’il avait si glorieusement conquise. Il ne le fit pas […], il se renferma dans la tradition classique […] à l’époque où M. Coste édifiait la Bourse, le moment de la rénovation architecturale n’était point venu pour Marseille. »

Nicole Chevalier, ingénieur d’études au département des Antiquités Orientales du musée du Louvre

Principales publications

Ouvrages et catalogues d’expositions

  • Académie de Marseille, Notice sur un dolmen qui existe à Draguignan… par MM. Audiffret et Coste. Marseille : imp. de Barlatier-Feissat et Demonchy, s. d.
  • Carte de la Basse-Égypte dédiée à Mohammed Aly Pacha vice-roi par Pascal Coste son architecte. Dressée d’après ses itinéraires et ses relèvements pendant les années 1818 à 1827. Paris, 1827.
  • Architecture arabe, ou Monuments du Kaire, mesurés et dessinés de 1818 à 1826. Paris : Firmin-Didot, 1837-1839.
  • Voyage en Perse de MM. Eugène Flandin et Pascal Coste pendant les années 1840 et 1841. Paris : Gide et Baudry, 1843-1854, 6 vol.
  • Monuments modernes de la Perse mesurés, dessinés et décrits par Pascal Coste. Paris : A. Morel, 1867.
  • Palais de la Bourse de Marseille. Marseille : impr. de M. Olive, 1874.
  • La Cathédrale de Saint-Pétersbourg. La future cathédrale de Marseille. Marseille : impr. de M. Olive, 1874.
  • Mémoires d’un artiste. Notes et Souvenirs de voyages, 1817-1877. Marseille : impr. de Cayer, 1878, 2 vol.

Articles

  • « Y a-t-il possibilité de créer une architecture nationale en France ? ». Mémoires de l’Académie de Marseille, 1847, p. 209-227.

Bibliographie critique sélective

  • Viollet-le-Duc Eugène. – « Préface ». In Jules Bourgoin, Les Arts arabes ; architecture, menuiserie, bronze, plafonds, revêtements, marbres, pavements, vitraux, etc., avec un texte descriptif et explicatif et le trait général de l’art arabe. Paris : Vve A. Morel, 1867, p. 1-2.
  • Parrocel Étienne. – « Pascal Coste doyen des architectes de France ». In L’Art dans le Midi. Célébrités marseillaises, t. I. Marseille : impr. E. Chatagnier Aîné, 1881-1884, p. 1-93.
  • Letz Joseph. – « Discours de réception prononcé par M. Joseph Letz, membre de la classe des Beaux-Arts » et « Réponse de M. Magaud président, au discours de réception de M. Letz ». Mémoires de l’Académie de Marseille, 1885-1887, p. 113-127.
  • Jasmin Denise. – « Pascal Coste et l’Égypte ». Monuments historiques, n° 125, février-mars 1983, p. 29-33.
  • Jacobi Dominique. – Le Regard du voyageur. Pascal Coste, architecte marseillais, 1787-1879, [catalogue de l’exposition], Marseille, bibliothèque municipale, 20 novembre 1987 – 27 février 1988. Marseille : bibliothèque municipale, 1987.
  • Armogate Daniel et Leprun Sylviane, dir. – Pascal Coste ou l’architecture cosmopolite. Paris : L’Harmattan, 1990.
  • Brahic Paule. – « Le Voyage tunisien de Pascal Coste ». In Du XVIe au XIXe siècle, itinéraires de France en Tunisie, [catalogue de l’exposition]. Marseille, bibliothèque municipale, 6 mai – 27 juillet 1995, Dominique Jacobi, dir. Collab. de Myriame Morel-Deledalle. Marseille : bibliothèque municipale de Marseille, p. 73-81.
  • Leprun Sylviane, dir. – « Coste et l’Égypte, histoires de dessins (1817-1827) ». In Catherine Bruant, Sylviane Leprun et Mercedes Volait, dir., Figures de l’orientalisme en architecture, n° spécial de la Revue du monde musulman et de la Méditerranée, n° 73-74, 1996, p. 17-34.
  • Pascal Coste, toutes les Égypte. Marseille, bibliothèque municipale, 17 juin – 30 septembre 1993. Dominique Jacobi, dir. Marseille : Éditions Parenthèses-bibliothèque municipale de Marseille, 1998.
  • Chevalier Nicole. – « Pascal Coste en Perse ». In Regard sur la Perse antique, [catalogue de l’exposition], église Saint-Cyran-du-Blanc, musée d’Argentonmagus à Saint-Marcel, 21 juin – 20 septembre 1998. Michel Maupoix, Gérard Coulon et Leblanc-Argentonmagus, dir. Le Blanc, Saint-Marcel : Amis de la bibliothèque municipale du Blanc et musée d’Argentomagus, 1998, p. 35-39.

Sources identifiées

Marseille, Archives départementales des Bouches-du-Rhône

Marseille, Archives municipales

Marseille, Bibliothèque municipale

Paris, archives de l’École nationale des beaux-arts

Paris, archives de l’Institut de France,

Paris, archives des Monuments historiques

Paris, archives du ministère des Affaires étrangères

Paris, Archives nationales

En complément : Voir la notice dans AGORHA