Auteur(s) de la notice :

DUPEUX Cécile

Profession ou activité principale

Chanoine, vicaire général

Autres activités
Archéologue, collectionneur, historien de l’art

Sujets d’étude
Art, archéologie et histoire religieuse d’Alsace

Carrière
1850 : ordonné prêtre le 29 mai
1850 : enseigne l’histoire et l’archéologie au Petit Séminaire de Strasbourg
1855 : membre fondateur de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace (SCMHA) ; correspondant de la Société française d’archéologie à partir de novembre
1859 : fonde avec l’abbé Pantaléon Mury la Revue catholique d’Alsace
1865 : devient secrétaire de la SCMHA
1870 : nommé secrétaire général de l’évêché de Strasbourg, puis chanoine honoraire
1872-1880 : mène des campagnes de fouilles à Strasbourg et dégage des nécropoles gallo-romaines
1874 : devient président de la SCMHA
1876 : chanoine titulaire à la cathédrale de Strasbourg
1882 : nommé conservateur des monuments historiques d’Alsace
1883 : membre correspondant de l’Académie du Vaucluse
1890 : membre correspondant de l’Académie de Metz
1891 : nommé vicaire général du diocèse de Strasbourg

Croix de bronze de la Société française de secours aux blessés et malades (1871) ; médaille du Congrès archéologique de Paris (1872) ; médaille de vermeil de la Société française d’archéologie (1883) ; docteur honoris causa de l’université de Fribourg-en-Brisgau (1891) ; Königliche Kronen-Orden II Klasse

Étude critique

Joseph Alexandre Straub fait partie de ces ecclésiastiques dont la passion pour l’archéologie et les monuments régionaux a largement contribué à faire progresser la connaissance et la préservation du patrimoine dans la deuxième moitié du XIXe siècle.

Brillant élève au séminaire de Strasbourg, il est appelé à y enseigner l’histoire après son ordination. Réputé pour sa connaissance des monuments d’architecture religieuse de la région, il est l’un des neuf membres fondateurs de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace, créée à Strasbourg en 1855 par le préfet Stanislas Migneret et son directeur de cabinet l’archiviste départemental Louis Spach sur le modèle de la Société française d’archéologie. Les objectifs affichés par cette Société savante sont triples : recenser et dresser l’inventaire des monuments encore debout et assurer leur sauvegarde ; exhumer les antiquités cachées dans le sol, qui jointes à celles de toutes époques, obtenues par dons ou par acquisitions, constitueront un musée d’Archéologie alsacienne ; publier des travaux sur l’archéologie et sur l’histoire de la province. Straub prend la présidence de la Société à partir de 1874 et la gardera jusqu’à sa mort en 1891. Avec l’accord des autorités, la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace assure une responsabilité régionale dans le domaine de la protection des monuments et celui de l’archéologie, et Straub est nommé conservateur des monuments historiques régionaux à partir de 1882. Avec son comité, il s’attache en particulier à la sauvegarde des vestiges du patrimoine historique et artistique détruit par la guerre de 1870. Sous le gouvernement allemand, la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace garde son influence et n’hésite pas à manifester son opposition à certaines décisions de l’administration des monuments historiques. Jusqu’en 1891, tous les articles restent publiés en français dans le Bulletin de la Société.

Chercheur infatigable, Straub publie régulièrement sur des sujets variés ayant trait au patrimoine régional, en particulier dans le Bulletin de la Société. Il fait paraître ainsi les Statistiques monumentales de plusieurs cantons du Bas-Rhin, réalisées dans l’esprit des inventaires prônés par la Société française d’archéologie. Il réalise des monographies de monuments, tels que l’ancienne abbaye Saints-Pierre-et-Paul de Neuwiller-les-Saverne, ainsi que des études sur les vitraux de plusieurs églises d’Alsace. Il s’attache également avec passion à l’étude des villages d’Alsace disparus depuis le Moyen Âge. La documentation qu’il amasse sur de nombreux monuments, dont un grand nombre de dessins, de plans et de relevés reste en grande partie inédite. Elle est conservée à la bibliothèque du Grand Séminaire de Strasbourg, tout comme la correspondance témoignant de ses échanges avec de nombreux érudits français et allemands. L’une de ses entreprises les plus ambitieuses est la publication du Hortus deliciarum de l’abbesse Herrade de Landsberg, dont le manuscrit avait disparu dans l’incendie de la bibliothèque municipale de Strasbourg en 1870. Cette reconstitution à partir des calques conservés, commencée en 1879, est achevée après la mort de Straub par le chanoine Keller et publiée en 1899 avec les financements de la Société pour la conservation des monuments historiques.

Fouilleur infatigable du sous-sol strasbourgeois, il participe à la reprise de l’activité archéologique régionale, stoppée par la guerre de 1870 et la défaite française. Il entreprend entre 1878 et 1880 plusieurs campagnes de fouille dans la nécropole gallo-romaine à l’occasion des travaux de construction de la nouvelle gare centrale et met ainsi au jour plus de 250 sépultures. Cette fouille constitue la première recherche archéologique de grande envergure menée au cours du XIXe siècle à Strasbourg. La modernité de ses méthodes de fouille et la justesse de ses analyses sur l’anthropologie, les rites funéraires et le mobilier en font une entreprise exemplaire. Publiée sous le titre Le Cimetière gallo-romain de Strasbourg dans le Bulletin de la Société de 1881, elle sera distinguée par la médaille de vermeil de la Société française d’archéologie, décernée en 1882 à l’occasion du congrès d’Avignon. Le riche mobilier issu de ces fouilles ainsi que d’une autre campagne menée en 1878 dans le faubourg de Koenigshoffen, constitue l’un des points forts de la collection rassemblée par la Société pour la conservation des monuments historiques. La création d’un musée pour leur présentation, prévue par les statuts de la Société, fait l’objet de tous les soins de Straub. Il en assure le rôle de conservateur et l’installe en 1882 dans les locaux de l’ancienne Académie. Les registres d’inventaire témoignent de la richesse et de la diversité des ensembles rassemblés au fil des années, liés aux sauvetages ou aux découvertes faites lors des grands travaux d’aménagement et d’urbanisme, mais aussi aux collections acquises par la Société car jugées représentatives de l’histoire de la région. Elles seront réunies en 1918, puis en 1945, aux collections de la Ville de Strasbourg.

Amateur avisé, Straub constitue au fil de ses recherches et de ses voyages une collection personnelle extrêmement variée, non exclusivement locale, qu’il lègue à la Ville de Strasbourg. Sans orientation véritablement déterminée, cet ensemble manifeste l’éclectisme de ses intérêts, de la peinture italienne aux plaquettes d’ivoire médiévales, des médailles et monnaies aux faïences du XVIIIe siècle, des tissus brodés ou mobilier Renaissance. Des œuvres aussi importantes que le panneau « Sainte Catherine et sainte Madeleine » du peintre bâlois Conrad Witz, conservé au musée de l’Œuvre-Notre-Dame, sont issues de ce legs. Sa bibliothèque personnelle de plus de 2 800 numéros, riche en livres rares et ouvrages illustrés, ainsi que sa collection de gravures, liées pour l’essentiel au patrimoine et à l’histoire alsaciens, sont vendues aux enchères en 1892. Les musées de Strasbourg en rachèteront une bonne partie.

Cécile Dupeux

Principales publications

Ouvrages ou tirés à part
Bull. SCMHA correspond à l’abréviation de Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace

  • Le Symbolisme de la cathédrale de Strasbourg, discours prononcé à la distribution des prix, faite aux élèves du Petit Séminaire de Strasbourg, le 13 août 1855. Strasbourg : Huder, 1856, 16 p.
  • Statistique monumentale des cantons de Kaysersberg et de Ribeauvillé (Haut-Rhin). Strasbourg : M. Salomon, 2e éd, 1860, 32 p. [tiré à part du Bull. SCMHA, 1re série, t. III, 1858-1860, p. 99-126].
  • L’Abbaye de Saint-Étienne. Petit Séminaire de Strasbourg, discours prononcé à la distribution solennelle des prix, le 10 août 1860. Strasbourg : L.-F. Le Roux, 1860, 24 p.
  • Analyse des vitraux de l’ancienne collégiale de Haslach et de l’ancienne abbaye de Walbourg, extrait du compte rendu des séances archéologiques tenues à Strasbourg en 1859. Caen : A. Hardel, 1860, 68 p.
  • L’Ancienne Abbaye de Saint-Pierre-et-Saint-Paul à Neuwiller. Description. Strasbourg : L.-F. Le Roux, 1862, 216 p.
  • L’Église de Vieux-Thann et ses Vitraux, avec 1 pl. chromolithographiée. Strasbourg : R. Schultz, 1875, 20 p. [tiré à part du Bull. SCMHA A, 2e série, t. IX, 1871-1875, p. 98-100].
  • Les Antiquités gallo-romaines de Kœnigshofen (banlieue de Strasbourg), avec 3 photographies, 1 carte et 5 gravures intercalées dans le texte. Strasbourg : R. Schultz, 1878, 24 p. [tiré à part du Bull. SCMHA, 2e série, t. X, 1879, p. 330-346].
  • Die Grundsteinlegung der neuen Kirche von Muehlbach im Breuschthal am 4. August 1878. Strasbourg : Schultz, 1878, 24 p.
  • Die Ausgrabungen auf dem spätrömischen Todtenfeld beim Weissthurmthor in Strassburg, Vortrag in der X. Generalversammlung der deutschen Anthropologen zu Strassburg, am 12. August 1879. Strasbourg : R. Schultz, 1879, 15 p.
  • Verzeichniss der auf dem Terrain der Reichs-Eisenbahnen in Elsass-Lothringen vor dem nunmehr abgebrochenen Weissthurmthor zu Strassburg zu Tage gefœrderten Grabfunde. Strasbourg, 1879, 10 p.
  • Landsberg Herrade (de). – Hortus deliciarum, ouvrage commencé par le chanoine A. Straub, et achevé par le chanoine G. Keller. Strasbourg : Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace, 1879-1899, XXX-72 p., 80 pl. et 31 pl. suppl. en noir.
  • Éphémérides alsaciennes. Agenda pour 1881. Strasbourg : L. Derivaux, 1881, 198 p.
  • Le Cimetière gallo-romain de Strasbourg, avec 3 cartes, 1 pl. lithogr., 16 pl. photoglyptiques et de nombreuses gravures sur bois intercalées dans le texte. Strasbourg : R. Schultz, 1881, 136 p. [tiré à part du Bull. SCMHA, 2e série, t. XI, 1881, p. 3-135].
  • Les Villages disparus en Alsace. Strasbourg : R. Schultz, 1887, 61 p. (éd. allemande sous le titre Die abgegangenen Ortschaften des Elsasses).
  • Geschichtskalender des Hochstiftes und des Münsters von Strassburg. Rixheim : H. Sutter, 1891, 286 p.

Articles

  • « Notice sur les verrières de l’église, aujourd’hui paroissiale, de l’ancien couvent de Sainte Marie-Magdeleine, à Strasbourg ». Bull. SCMHA, 1re série, t. I, 1856-1857, p. 100-116.
  • « Note sur un reliquaire du XIIe siècle, appartenant à l’église de Molsheim et conservé au presbytère de cette ville ». Bull. SCMHA, 1re série, t. II, 1857-1858, p. 135-140.
  • « Note sur les procédés d’estampage, communiquée par M. l’abbé Straub et M. Petit-Gérard… ». Bull. SCMHA, 1re série, t. I, 1856-1857, p. 325-327.
  • « Énumération des monuments historiques des cantons de Molsheim et de Rosheim ». Bull. SCMHA, 1re série, t. II, 1857-1858, p. 162-171.
  • « Un mot sur l’ancien mobilier d’église en Alsace, réponse à la question 46 du programme du congrès archéologique de France (26e session), suivi d’une note sur les peintures murales en Alsace, et sur les monuments les plus remarquables du Moyen Âge, appartenant, dans cette province, à l’architecture civile, réponse aux questions 47 et 48 du programme du congrès archéologique de France (26e session) ». Compte rendu des séances archéologiques tenues à Strasbourg, en 1859, par la Société française d’archéologie. Caen, 1860, p. 374-412.
  • « Notice sur deux cloches anciennes d’Obernai ». Revue catholique d’Alsace, décembre 1859.
  • « L’Église de Walbourg ». Bull. SCMHA, 2e série, t. II, 1863-1864, p. 97-105.
  • « Anthologie épigraphique ». Revue catholique d’Alsace, t. III, 1863-1864, p. 164-165, 289-291, 309-311.
  • À propos de cloches. Une curiosité épigraphique publiée par la Revue catholique d’Alsace. Strasbourg, Le Roux, 1869, 4 p.
  • « Autels portatifs en Alsace ». Bull. SCMHA, 2e série, t. IX, 1871-1875, p. 73-79.
  • « La Première Pierre de l’ancienne église des Dominicains, autrement appelée Temple-Neuf, à Strasbourg ». Bull. SCMHA, 2e série, t. IX, 1871-1875, p. 89-97.
  • « Peintures murales du chœur de l’église catholique du Neuhof (commune de Strasbourg). Origine du village et de la paroisse ». Revue catholique d’Alsace, t. IV, 1865-1866, p. 454-459.
  • « Les Tapisseries de Neuwiller ». Bull. SCMHA, 2e série, t. V, 1868, p. 54-57.
  • « Peintures anciennes découvertes dans l’église de Rouffach ». Bull. SCMHA, 2e série, t. VI, 1869, p. 1-4.
  • « Notes généalogiques sur une ancienne famille patricienne de Strasbourg ». Bull. SCMHA, 2e série, t. IX, 1871-1875, p. 80-88.
  • « Poteries acoustiques de l’ancienne église des dominicains de Strasbourg ». Bull. SCMHA, 2e série, t. IX, 1871-1875, p. 231-234.
  • « Souvenirs et Restes d’anciens monuments disparus en Alsace depuis le XVIIe siècle ». Bull. SCMHA, 2e série, t. XIII, 1887, p. 361-377 ; t. XIV, 1889, p. 188-200.
  • Erklärung gegen den Ausbau, des Suedthurmes u.s.w. Strasbourg, s. d., 3 p. (autographié, conservé à la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg).

Bibliographie critique sélective

  • Catalogue de la bibliothèque de feu M. le vicaire général Straub. Strasbourg : F.-X. Leroux, 1892.
  • Catalogue des gravures et œuvres d’art de la succession de feu M. le vicaire général Straub : vente du 25 juillet 1892. Strasbourg : F.-X. Le Roux, 1892.
  • Delsor Nicolas. – « M. le Vicaire général A. Straub ». Revue catholique d’Alsace, t. XI, 1892, p. 48-52.
  • Stricker August. – « Die Sammlung Straub im Strasburger Kunstgewerbe-Museum ». Zeitschrift des bayer. Munich : Kunstgewerbe-Vereins, 1893, cahiers 9-10, p. 53-56.
  • Sitzmann Édouard. – Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace. Rixheim : F. Sutter, 1909-1910, t. II, p. 838-839.
  • Kammerer Louis (abbé). – « Le Clergé d’Alsace sous l’Ancien Régime. Répertoires et sources ». Archives de l’église d’Alsace, 1984, p. 121-124.
  • Mayeur Jean-Marie-et Hilaire Yves-Marie, dir. – Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine. II. L’Alsace. Paris : Beauchesne, 1987, p. 422-423.
  • Schlaefli Louis. – « Kanonikus Alexandre Straub auf Studienreise in Baden ». Die Ortenau, 1997, p. 459-484.
  • Schlaefli Louis. – « Straub Alexandre ». Nouveau Dictionnaire de biographies alsaciennes, s. d., p. 3798.
  • Schnitzler Bernadette. – La Passion de l’Antiquité. Six siècles de recherches archéologiques en Alsace. Strasbourg : Société savante d’Alsace, 1998, p. 113-116 et passim.

Sources identifiées

Strasbourg, archives des musées de la Ville de Strasbourg : legs Straub

  • Classeur contenant le dossier du legs du chanoine aux musées de la Ville de Strasbourg (98 pièces). Correspondance entre la municipalité et le directeur du musée des Arts décoratifs, Dr August Stricker. Pièces concernant l’aménagement de la salle Straub au musée des Arts décoratifs

Strasbourg, bibliothèque du Grand Séminaire de Strasbourg

  • Ses papiers, comportant beaucoup de matériaux inédits (Révolution, campanologie, art et archéologie en Alsace, clergé alsacien…) et de dessins, sont conservés à la bibliothèque du Grand Séminaire (Ms 2020-2062), ainsi que la correspondance reçue de la part d’érudits de toute l’Europe (Ms 2058A-C)
  • Schlaefli Louis. – Inventaire des papiers Straub. Strasbourg, 1998
  • Document accessible sur le site de la bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg