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GUIFFREY, Jules
Mis à jour le 3 novembre 2008
(29 novembre 1840, Paris – 26 novembre 1918, Paris)
Auteur(s) de la notice :
MOUQUIN Sophie
Profession ou activité principale
Archiviste aux Archives nationales, administrateur de la Manufacture nationale des Gobelins
Autres activités
Historien d’art, critique, fondateur de la Société de l’Histoire de l’Art français
Sujets d’étude
Histoire des arts décoratifs (mobilier et tapisserie XIVe-XVIIIe siècle), sources et archives de l’histoire de l’art (XVIe-XVIIIe siècle), histoire de l’Académie de France à Rome et de l’Académie de Saint-Luc, histoire de la peinture (XVIIe-XVIIIe siècle), histoire de la sculpture (XVIIe-XVIIIe siècle)
Carrière
1861 : thèse de licence de droit sur le contrat de mariage, soutenue le 10 août 1861 à Paris
1863 : thèse de l’École des chartes pour le diplôme d’archiviste-paléographe : « Examen du traité qui réunit le Dauphiné à la France et des négociations qui l’ont précédé et suivi »
1866 : nommé archiviste des Archives de l’Empereur, puis archiviste des Archives nationales à la section législative et judiciaire
1866 : président de la Société de l’Histoire de l’Art français
1872 : création des Nouvelles Archives de l’art français
1874 : membre de la Société de l’histoire de Paris
1877 : membre du Comité des travaux historiques et scientifiques au ministère de l’Instruction publique
1878 : officier d’Académie
1879 : membre du Comité des travaux historiques de la Ville de Paris
1879 : mission en Allemagne pour une étude sur les œuvres des peintres et sculpteurs français jusqu’à la fin du XVIIIe siècle et sur Antoine Van Dyck
1883 : officier de l’Instruction publique
1890 : mission de trois mois en Orient pour une étude sur les premiers monuments de la civilisation chrétienne
1893 : nommé administrateur de la Manufacture nationale des Gobelins
1918 : son éloge funèbre, écrit par Henri Stein, est publié dans la Bibliothèque de l’École des chartes
Chevalier de la Légion d’honneur (1884) ; officier de la Légion d’honneur (1897)
Étude critique
« Deux choses me frappent tout d’abord, dans cette vie si remplie : la somme prodigieuse de travaux accomplis et leur coordination, d’une part ; leur caractère désintéressé de l’autre, la libéralité avec laquelle Guiffrey prodiguait à tous, en des notes courtes et précises, matière à de longues études, le résultat de ses recherches infatigables dans les fonds d’archives et de ses trouvailles heureuses. » En écrivant ces quelques lignes en 1923, Maurice Fenaille rendait à l’un des plus prolixes historiens de l’art de sa génération l’hommage qui lui était dû (Notice sur la vie…, 1923, p. 4).
Fils d’un notaire, Jules-Marie-Joseph Guiffrey mit plusieurs années à se déterminer pour l’histoire de l’art. Des études de droit, puis d’archiviste-paléographe lui permirent d’acquérir rigueur et goût du travail. Avant même qu’il n’obtienne un poste aux Archives de l’Empereur, bientôt Archives nationales, où il demeura pendant vingt-sept ans, il écrivit, notamment pour le Journal des beaux-arts et de la littérature en Belgique et la Gazette des Beaux-Arts, des articles et comptes rendus qui témoignent de son intérêt pour l’art et les artistes. Son entrée aux Archives fut sans doute déterminante. Bien que chargé, au sein de la section législative et judiciaire, du classement des papiers des assemblées et des comités révolutionnaires, il trouva dans cette institution une masse inépuisable de documents qui combla vraisemblablement son goût pour l’histoire de l’art et surtout pour ses sources. Dès lors, il s’attacha, sans relâche, à la publication de documents qu’il jugeait utiles. Il distingua cependant toujours ce qui relevait de son activité d’archiviste – auquel on reprocha d’ailleurs l’inconstance de son assiduité –, et ce qui relevait de ses travaux personnels, « Pièces sur l’art et les artistes français tirées de divers fonds des archives […], histoire de la tapisserie et autres ouvrages » (Archives nationales, AB IV C, 82, dossier n°5, pièce n°15).
Ses travaux pour les Archives rejoignaient cependant parfois sa passion d’historien de l’art. Il rappelait ainsi au directeur des Archives : « Les Inventaires des Comités, les Comptes des Bâtiments, la préparation de la publication des Tables de la Convention et même l’impression des papiers d’Alexandre Lenoir, qui m’a attiré les foudres de l’irascible M. Courajod, méritent peut-être de compter pour quelque chose à mon actif. » Or, Guiffrey eut dans sa longue carrière d’archiviste (1866-1893) puis d’administrateur de la Manufacture nationale des Gobelins (1893-1908) et même jusqu’à sa mort, en 1918, une production vertigineuse. Il publia plus de huit cent soixante-dix articles, notes et comptes rendus, dans des revues diverses dont certaines auxquelles il fut d’une fidélité exemplaire et d’un soutien sans faille : Annales de la Société historique et archéologique du Gâtinais, L’Art, Bibliothèque de l’École des chartes, Bulletin du Comité de travaux historiques et archéologique, Bulletin de la Société des antiquaires de France, Bulletin de la Société de l’Histoire de l’Art français, Bulletin de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, Bulletin de l’Union centrale des arts décoratifs, Bulletin de l’Union centrale des beaux-arts appliqués à l’industrie, Chronique des arts et de la curiosité, Courrier de l’art, Le Forum artistique, Gazette archéologique, Gazette des Beaux-Arts, Journal des beaux-arts et de la littérature, Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art chrétien, Revue critique, Revue de numismatique, Revue historique, nobiliaire et biographique. Avec les livres, ce sont plus de neuf cent trente parutions, entre 1861 et 1918, période pourtant troublée par deux guerres.
Son goût pour les sources de l’histoire de l’art fut sans doute conforté par ses amitiés avec d’autres archivistes ou hommes de lettres : Joseph de Laborde, Gaston Paris avec lequel il voyagea en Allemagne, Émile Campardon et Alexandre Tuetey, ses collègues des Archives, Anatole de Montaiglon – auquel il rendit un vibrant hommage dans les Nouvelles Archives de l’art français en 1896, Arthur-Michel de Boislisle, Georges Lafenestre, et surtout Sully Prudhomme qui lui dédicaça en 1878 son recueil de poésie La Justice et avec lequel il parcourut l’Italie. Ses amitiés savantes façonnèrent vraisemblablement sa pensée et son goût préférentiel pour les archives et les sources. Car Guiffrey fut avant tout un défenseur d’une histoire de l’art convoquant les archives comme preuve ou base d’une argumentation, et éventuellement d’une étude critique ou d’une monographie. Dans son ouvrage consacré aux Caffieri (1877) et dédicacé à son ami Sully Prudhomme, il écrivait en effet : « Les Archives nationales renferment tous les éléments d’une histoire de l’art français pendant les deux derniers siècles ; il s’agit seulement de les y chercher, de les coordonner et de les mettre en œuvre. Jal a tracé la voie ; mais il reste beaucoup à faire. Ceux qui auront le courage de se donner tout entier à ce grand travail de réhabilitation seront amplement dédommagés de leurs efforts. Ils rendront un réel service à l’histoire de l’art, ils auront en même temps l’honneur d’accomplir une œuvre éminemment patriotique. » Il justifiait ainsi la démarche qui fut la sienne toute sa vie, celle d’un archiviste. Et il semble que ses sujets de recherche aient été guidés davantage par ses trouvailles aux Archives que par un goût personnel ou une réelle cohérence scientifique. Son œuvre paraît ainsi aussi hétéroclite qu’abondante. En effet, s’il est possible d’y déceler certains sujets de prédilection, il faut souligner l’incroyable diversité de ses publications : peinture, sculpture, architecture, gravure, orfèvrerie, ébénisterie, tapisserie, histoire, académies, du XVe au XIXe siècles, mais parfois même des comptes rendus sur des ouvrages inattendus, comme celui sur la Lutte contre l’alcoolisme de Henri Vasnier paru dans le Journal des savants en 1907. Ses premières années furent surtout marquées par des comptes rendus, des notices nécrologiques, des articles sur l’actualité artistique (expositions, Salons, ventes) ou sur l’art flamand, et des ouvrages historiques, dont Les Principes de 1789 et la liberté de presse, publié en 1867 et sa thèse de l’École des chartes, Histoire de la réunion du Dauphiné à la France (1868). Dès 1869, il consacra pourtant l’essentiel de ses publications à l’histoire de l’art, avec plusieurs recueils de documents dont la Collection des livrets des anciens Salons de peinture depuis 1673 jusqu’en 1800 (1869-1872) ou encore son essai Le Duc d’Antin et Louis XIV (1869). Ce goût pour les sources de l’histoire de l’art se confirma avec une série d’articles publiés, à partir de 1872, dans les Nouvelles Archives de l’art français. Il y aborda les sujets les plus divers, liés à des documents d’archives inédits succinctement présentés. Mais Guiffrey ne cessa cependant pas d’écrire des articles sur des sujets d’actualité les plus variés, qui prouvent son intérêt pour la création contemporaine, le marché de l’art, mais aussi pour tous les domaines de la création artistique.
Par l’étendue de ses centres d’intérêt, Guiffrey montre qu’il fut bien un homme de son temps, au savoir pluraliste et interdisciplinaire. L’étude de documents d’archives, dont Frédéric Reiset, conservateur au Louvre, fut d’après lui l’un des premiers à souligner l’importance en France (Artistes parisiens du XVIe et du XVIIe siècles, 1915) devint cependant son activité principale. Le travail de Léon de Laborde, père de son ami Joseph, Les Comptes des Bâtiments du Roi (1528-1571) dont il assura la publication (1877-1880), l’incita sans doute à entreprendre ce qui reste sa publication majeure : Les Comptes des Bâtiments du Roi (1661-1715), en cinq volumes (1881-1901). Vingt ans furent donc nécessaires à l’accomplissement du grand œuvre qui, aujourd’hui encore, est un instrument indispensable des historiens de l’art du règne de Louis XIV. On pourrait pourtant reprocher au savant d’avoir regroupé plusieurs versements faits aux mêmes artistes et d’avoir ainsi modifié les comptes originaux. Il s’en justifia d’ailleurs : « C’est le système qui a été adopté, avec la certitude qu’il conserve dans la publication tous les éléments essentiels du compte : le nom de l’artiste ou de l’ouvrier, la nature du travail, la date précise de l’exécution, la somme reçue. […] Le système adopté a permis de publier en un seul volume dix-sept années, qui auraient bien exigé trois fois plus de place si on eût copié et reproduit textuellement tous les articles des Comptes. » (Comptes des Bâtiments du Roi, 1881, vol. I, p. XXXVI-XXVII). L’étude précédant les Comptes, si elle comporte un essai sur le fonctionnement de l’administration des Bâtiments du roi, est, pour l’essentiel, un exposé des choix éditoriaux et un plaidoyer pour l’importance des archives en histoire de l’art. Plaidoyer qui ne surprend guère chez un homme qui consacra aux sources l’essentiel de ses travaux et qui espérait sans doute pallier ainsi l’absence d’historiens de l’art français et rendre aux artistes oubliés le juste hommage qu’ils auraient dû recevoir : « Quel malheur pour la France de n’avoir pas eu de Vasari pour raconter l’histoire des Goujon, des Pilon, des Lescot, des Cousin et des Jacques d’Angoulême ! Ah ! si notre chère patrie n’était pas si insoucieuse de la gloire de ses plus illustres enfants », écrivait-il en 1877 (Les Caffieri, sculpteurs et fondeurs-ciseleurs, 1877, p. XII).
Fervent patriote, infatigable chercheur, il fonda la Société de l’Histoire de l’Art français et, sous les conseils d’Anatole de Montaiglon qui, d’après Maurice Fenaille, « paraît avoir eu sur la direction de sa vie une influence considérable » (Notice sur la vie…, p. 6), il accepta de continuer les Archives de l’art français, fondées en 1851 par Philippe de Chennevières. Les Nouvelles Archives de l’art français devinrent, à partir de 1872, l’élément indispensable à son activité scientifique : près de la moitié de ses publications y furent réalisées. Pour cette ambitieuse entreprise, il s’entoura d’amis : Philippe de Chennevières nommé président d’honneur, Anatole de Montaiglon, président, Paul Chéron, Jules Cousin, Georges Duplessis, Joseph de Laborde, Georges Lafenestre, Adolphe Lance, Henri Lot pour ne citer que les plus fidèles et les plus proches, mais aussi Louis Courajod dont il redoutait pourtant le caractère. Guiffrey réunit ainsi quantité de documents servant de « base la plus sûre de l’histoire de l’art français » (Maurice Fenaille, Notice…, p. 8). Les statuts de la Société témoignent bien de la démarche : il s’agissait à la fois de publier des documents inédits et « de concourir à former une collection de travaux spéciaux, édités par les auteurs eux-mêmes, à leurs frais » (Nouvelles Archives de l’art français, 1872, p. III). Guiffrey s’employa alors, avec une rigueur remarquable, à satisfaire ces deux propositions : il multiplia les publications d’archives inédites, comptes et état civil pour l’essentiel, et réalisa des « travaux spéciaux » comme, par exemple et parmi tant d’autres, Les Comptes des Bâtiments du roi (1528-1571) (1877-1880) ou encore son incontournable Histoire de l’Académie de Saint-Luc (1915). L’avertissement du recueil de l’année 1872 précisait qu’il s’agissait donc « avant tout d’un recueil de documents. Les commentaires ou annotations accompagnant les pièces ne viendront jamais que comme un accessoire, indispensable il est vrai, et comportant parfois de longs développements, mais autant que possible réduit aux limites du strict nécessaire » (Nouvelles Archives de l’art français, 1872, p. XIV). Dès 1887, sans doute pour permettre aux recueils de devenir de véritables instruments de travail, la traditionnelle table des matières fut remplacée par un index. Ce choix scientifique, qui donnait aux pièces d’archives inédites une place première et qui faisait donc de chaque volume une véritable base documentaire susceptible de susciter des travaux ultérieurs, fut suivi par Guiffrey dans toutes ses publications et collaborations à de nombreux comités et commissions dont il fut souvent l’un des membres les plus actifs (Comité des travaux historiques [section archéologie], Conseil supérieur des Beaux-Arts, Commission des monuments historiques, Société de l’École des chartes, Société des antiquaires de France, etc.).
Ce qui fit sa force fit également sa faiblesse. Si Guiffrey est sans doute aujourd’hui l’un des historiens de l’art qui contribua le plus à faire du recours aux documents d’archives une des bases du travail de recherche en histoire de l’art, il ne parvint jamais tout à fait à se détacher de l’original pour livrer une étude approfondie et critique. À vouloir trop embrasser, il alla parfois trop vite, émettant des jugements hâtifs qui pourraient être critiqués. Peinture, sculpture, architecture, orfèvrerie, ébénisterie, tapisserie et arts décoratifs en tous genres, histoire des académies furent ses sujets de prédilection. Parmi les neuf cent trente publications que nous avons relevées, une cinquantaine concerne l’architecture, une centaine les académies, expositions et Salons, plus de cent la sculpture et plus de cent la tapisserie, plus de cent cinquante les arts décoratifs et métiers artisanaux et plus de deux cents la peinture, le reste touchant aux artistes en général, à l’histoire et à l’actualité, exceptionnellement au droit, à la littérature ou à la musique. Les véritables études, recueils et ouvrages constituent une part infime de cette production volumineuse : nous en avons relevé une soixantaine dont certains, comme les Comptes, en plusieurs volumes. Pourtant, il s’agit presque toujours de publier des documents inédits. L’un de ses premiers livres, Le Duc d’Antin et Louis XIV (1869), est constitué pour moitié des rapports sur l’administration des bâtiments. Il ne modifia jamais véritablement ce système. Les ouvrages les plus aboutis dans le domaine de la réflexion furent sans doute ceux consacrés aux Caffieri (1877), à Antoine Van Dyck (1882), à André Le Nôtre (1913) ou encore aux tapisseries (1878-1884 et 1886), même si d’autres études méritent d’être remarquées comme celle qui précède la publication des Inventaires de Jean duc de Berry (1894-1896). Pourtant, là encore, l’ensemble apparaît davantage comme l’œuvre d’un historien que celle d’un historien de l’art : Guiffrey rapporte des faits, les documente, ouvre la voie à l’histoire sociale, à une histoire de l’art qui a recours au document ; mais il ne fait pas œuvre d’analyste même s’il s’essaye parfois à juger de la qualité des œuvres. Le propos est certes organisé – le plus souvent chronologiquement – et présente de précieux instruments de travail (pièces justificatives, tables et index), mais il manque cruellement d’esprit d’analyse et parfois même de rigueur : ainsi, pour le catalogue de l’œuvre peint et gravé de Van Dyck, les notices ne comprennent ni dimensions, ni date, ni provenance, ni support. Seule exception aux choix préférentiels de Guiffrey pour le document, L’Histoire de la tapisserie, son second ouvrage sur le sujet (1886). L’étude, organisée en dix chapitres chronologiques, se présente sans documents d’archives et sans notes « pour ne pas effrayer le public par un étalage d’érudition déplacée ».
La rapidité avec laquelle il menait ses études le conduisit à formuler des jugements hâtifs mais pourtant cinglants. Ainsi, au sujet du duc d’Antin, son analyse, non argumentée, est pourtant sans appel : « Par malheur, le directeur des Bâtiments ne possédait aucune des aptitudes qu’exigeait sa situation, et jamais peut-être les arts et les artistes en France n’eurent à traverser une période plus désastreuse » (Le Duc d’Antin et Louis XIV, 1869, p. 11). Le ton est d’ailleurs volontiers critique et témoigne d’une grande liberté d’expression. Dans son ouvrage consacré aux expositions du XVIIIe siècle, il n’hésite pas à protester contre l’Académie : « L’exemple de l’ancienne Académie, si prospère, si utile, si vivante pendant cent cinquante ans, est là pour encourager. Et quel contraste avec l’Académie actuelle, déjà sans prestige, sans influence et bientôt peut-être sans considération ! » (Notes et documents inédits, 1873). De même, dans son étude de la famille Cousin, il critique de façon virulente J. Lobet qui, selon lui, « n’a pas eu le courage d’aller contre les opinions de ses compatriotes. On sent trop que M. Lobet est influencé par les traditions locales contre lesquelles il cherche à réagir, sans oser s’en délivrer entièrement, et par les jugements de certains critiques, comme celui qu’il appelle pompeusement le législateur de l’art et dont le nom ne devrait même pas paraître dans pareille discussion ». C’est avec le même souci de vérité qu’il souligna, à plusieurs reprises, des problèmes de conservation ou de perte de savoir-faire technique dans le domaine de la tapisserie. Sa connaissance et son indépendance d’esprit lui permirent de diriger pendant quinze ans la Manufacture nationale des Gobelins et de contribuer au renouveau et à la préservation d’un art oublié.
Chercheur remarquable, archiviste infatigable doté d’un sens aigu du travail, de la rigueur et de l’honnêteté scientifique, le grand mérite de Guiffrey fut sans doute de démontrer l’utilité et la nécessité du recours au document dans la démarche de l’historien de l’art et d’ouvrir de nouvelles pistes de recherche et de nouveaux sujets comme les arts décoratifs et la tapisserie dont l’étude était jusqu’alors délaissée. Son œuvre, à laquelle il manque même dans les ouvrages les plus aboutis un esprit d’analyste et de critique, devint à son tour une source indispensable aux historiens de l’art, destinée qu’il n’a sans doute jamais imaginée, mais qu’il n’aurait pas réfutée.
Sophie Mouquin
Principales publications
Ouvrages et catalogues d’expositions
- Histoire de la réunion du Dauphiné à la France. Paris : Académie des bibliophiles, 1868.
- Le Duc d’Antin et Louis XIV, rapports sur l’administration des bâtiments annotés par le roi, publiés avec une préface de Jules Guiffrey. Paris : Académie des bibliophiles, 1869.
- Notes et documents inédits sur les expositions du XVIII siècle. Paris : J. Baur, 1873.
- Les Caffieri, sculpteurs et fondeurs-ciseleurs, étude sur la statuaire et sur l’art du bronze en France au XVIIe et XVIIIe siècle. Paris : Morgand et Fatout, 1877.
- Histoire générale de la tapisserie. Collab. de Müntz Eugène et Pinchart Alexandre. Paris : Société anonyme de publications périodiques, 1878-1884, 3 vol.
- Comptes des Bâtiments du Roi sous le règne de Louis XIV, 1664-1715. Paris : imprimeries nationales, 1881-1901, vol.1 ; vol.2 ; vol. 3 ; vol. 4 ; vol. 5.
- Antoine Van Dyck, sa vie et son œuvre. Paris : A. Quantin, 1882.
- Scellés et inventaires d’artistes français du XVIIe et du XVIIIe siècle. Paris : Charavay, 1884-1886,
vol. 1;vol. 2;vol. 3. - Inventaire général du mobilier de la Couronne sous Louis XIV (1663-1715). Paris : J. Rouam, 1885-1886,
vol. 1;vol. 2. - Histoire de la tapisserie, depuis le Moyen Âge jusqu’à nos jours. Tours : Mame et fils, 1886.
- Catalogue sommaire du musée des Archives nationales, précédé d’une notice historique sur le palais des Archives. Paris : Ch. Delagrave, 1893.
- Inventaires de Jean duc de Berry (1401-1416). Paris : Ernest Leroux, 1894-1896, vol. 1 ; vol. 2.
- Les Manufactures nationales de tapisseries : les Gobelins, Beauvais. Paris : Laurens, 1907.
- Liste des pensionnaires de l’Académie de France à Rome donnant les noms de tous les artistes récompensés dans les concours du Prix de Rome de 1663 à 1907, publiée d’après les documents officiels sous les auspices de l’Académie des beaux-arts. Paris : Firmin-Didot, 1908.
- André Le Nostre, étude critique illustrée de 24 planches hors texte. Paris : Laurens, 1913.
- Artistes parisiens du XVIe et du XVIIe siècles : donations, contrats de mariage, testaments, inventaires, etc. tirés des insinuations du Châtelet de Paris. Paris : imprimerie nationale, 1915.
Articles
- « Les Vieilles maisons flamandes de la ville d’Ypres ». Gazette des Beaux-Arts, 1865, t. XIX, p. 178-186.
- « L’Hôtel de Soubise : les bâtiments, les tableaux, le musée ». Gazette des Beaux-Arts, 1869, t. I, p. 393-416.
- « Liste alphabétique des artistes et artisans employés à l’embellissement et à l’entretien des châteaux royaux du Louvre, des Tuileries, de Fontainebleau, de Saint-Germain etc., de 1605 à 1656, avec la mention de leurs gages ». Nouvelles Archives de l’art français, 1872, p. 1-54.
- « Liste des peintres, sculpteurs, architectes, graveurs et autres artistes de la maison du Roi, de la Reine ou des autres princes du sang, pendant les XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles ». Nouvelles Archives de l’art français, 1872, p. 55-108.
- « Documents concernant les peintres Philippe et Jean-Baptiste de Champagne (1629-1682) ». Nouvelles Archives de l’art français, 1872, p. 223-233.
- « Testament et inventaires de reliquaires et autres pièces d’orfèvrerie de l’oratoire de la reine Anne d’Autriche, février 1666 ». Nouvelles Archives de l’art français, 1872, p. 261-274.
- « Logements d’artistes au Louvre ». Nouvelles Archives de l’art français, 1873, p. 1-221.
- « Lettres de noblesse et décorations accordées aux artistes en France pendant le XVIIe et le XVIIIe siècles ». Revue historique, nobiliaire et bibliographique, 1873, t. VIII, p. 1-44.
- « La Jeunesse de Voltaire. Voltaire et la famille de Nicolay, 1722-1730 ». Bulletin de la Société de l’histoire de Paris, 1875, p. 42-50.
- « Documents sur Pierre Mignard et sur sa famille ». Nouvelles Archives de l’art français, 1875, p. 1-144.
- « Nouveaux documents sur Pierre Mignard et sa famille ». Nouvelles Archives de l’art français, 1875, p. 500-515.
- « La Maîtrise des peintres de Saint-Germain-des-Prés, réceptions et visites (1548-1644) ». Nouvelles Archives de l’art français, 1876, p. 93-123.
- « Guillaume Dupré, sculpteur et graveur médailles et Jean Pillon (1603-1606), nouveaux documents ». Nouvelles Archives de l’art français, 1876, p. 172-224.
- « Antoine, Louis et Mathieu Le Nain, nouveaux documents (1629-1699) ». Nouvelles Archives de l’art français, 1876, p. 255-295.
- « Testament et inventaire des biens, tableaux, dessins, planches de cuivre, bijoux etc., de Claudine Bouzonnet Stella, rédigés et écrits par elle-même (1693-1697) ». Nouvelles Archives de l’art français, 1877, p. 1-117.
- « Lettres et documents sur l’acquisition des tableaux d’Eustache Le Sueur pour la collection du Roi (1776-1789), documents des Archives nationales ». Nouvelles Archives de l’art français, 1877, p. 274-360.
- « Congés accordés à des artistes français pour aller travailler à l’étranger (1693-1792) ». Nouvelles Archives de l’art français, 1878, p. 1-68.
- « Correspondance des artistes français travaillant à l’étranger ». Nouvelles Archives de l’art français, 1878, p. 69-155.
- « Peintres, imagiers, verriers, maçons, enlumineurs, écrivains et libraires des XIVe et XVe siècles, d’après les comptes royaux des Archives nationales ». Nouvelles Archives de l’art français, 1878, p. 157-220.
- « Antoine-Jean Gros, peintre d’histoire, documents inédits sur sa vie et ses œuvres (1795-1835) ». Nouvelles Archives de l’art français, 1878, p. 343-370.
- « Documents inédits sur les tapisseries de haute lisse sous Henri IV et sous ses successeurs ». Nouvelles Archives de l’art français, 1879, 2e série, t. I, p. 233-245.
- « Van der Meulen ». Nouvelles Archives de l’art français, 1879, 2e série, t. I, p. 119-131.
- « Brevets des pensionnaires à l’Académie de Rome et à l’École des élèves protégés de Paris ». Nouvelles Archives de l’art français, 1879, 2e série, t. I, p. 350-392.
- « La Famille de Jean Cousin, peintre et verrier du XVIe siècle ». Mémoires de la Société nationale des antiquaires de France, 1880, t. XLI.
- « Les Sculpteurs Lambert-Sigisbert et Nicolas-Sébastien Adam (1729-1790) ». Nouvelles Archives de l’art français, 1880-81, 2e série, t. II, p. 163-181.
- « Correspondance du comte d’Angiviller avec Bosschaert pour l’acquisition de divers tableaux provenant des couvents supprimés des Pays-Bas, pendant les années
1785 et1786 ». Nouvelles Archives de l’art français, 1880-81, 2e série, t. II, p. 93-130. - « Le Graveur Baléchou et le portrait du roi de Pologne (novembre 1749 – avril 1752) ». Nouvelles Archives de l’art français , 1882, 2e série, t. III, p.142-210.
- « La Monnaie des médailles, histoire métallique de Louis XIV et de Louis XV d’après les documents inédits des Archives nationales ». Revue de Numismatique, 1884.
- « Les Grands relieurs parisiens du XVIIIe siècle : Boyet, Padeloup, Derome. Documents nouveaux ». Bulletin de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, 1884, 11e année, p. 98-112.
- « Nicolas Bataille, tapissier parisien du XIV siècle, sa vie, son œuvre, sa famille ». Mémoires de la société de l’histoire de Paris et d’Île-de-France, 1884, t. X, p. 268-317.
- « Correspondance inédite de Maurice-Quentin de La Tour, suivie de documents nouveaux ». Gazette des Beaux-Arts, 1885, t. XXI, p. 201-216, 309-321.
- « Destruction des plus belles tentures du mobilier de la couronne en 1797 ». Mémoires de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, 1887, t. XIV.
- « Inventaire des tapisseries du roi Charles VII vendues par les Anglais en 1422 ». Bibliothèque de l’École des chartes, 1887, t. XLVIII, p. 59-110.
- « Nicolas Hallé, peintre en miniature ». Nouvelles Archives de l’art français, 1888, 3e série, t. IV, p. 299-317.
- « Table des portraits exposés aux Salons du XVIII siècle jusqu’en 1800 ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1889, 3e série, t. V, p. 1-47.
- « Documents inédits sur les anciennes manufactures de faïence et de porcelaine ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1889, 3e série, t. V, p. 193-215.
- « Le Sculpteur Claude-Michel Clodion ». Gazette des Beaux-Arts, 1890, 34e année, t. VIII, p. 478-495 ; 1891, 35e année, t. IX, p. 164-176.
- « Le Tombeau du maréchal de Saxe par Jean-Baptiste Pigalle ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1891, 3e série, t. VII, p. 161-234.
- « Les Manufactures parisiennes de tapisseries au XVIIe siècle. Hôpital de la Trinité, grande galerie du Louvre, Savonnerie, faubourg Saint-Marcel, faubourg Saint-Germain, Gobelins ». Mémoires de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, 1892, t. XIX.
- « Anatole de Courde de Montaiglon 1824-1895 ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1896, 3e série, t. XII, p. 1-4.
- « Artistes et tombiers parisiens du commencement du XVI siècle, extraits d’un minutier parisien ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1896, 3e série, t. XII, p. 5-23.
- « Les Bailly, peintres et gardes des tableaux du roi, inventaires et documents ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1896, 3e série, t. XII, p. 113-136.
- « Inventaires des meubles précieux de l’hôtel de Guise en 1644 et 1668 et de l’hôtel de Soubise en 1787 ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1896, 3e série, t. XII, p. 156-246.
- « État-civil des tapissiers des Gobelins au XVIIe et au XVIIIe siècles ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1897, 3e série, t. XIII, p. 1-60.
- « Les Modèles des Gobelins devant le jury des arts en septembre 1794 ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1897, 3e série, t. XIII, p. 349-389.
- « Inventaire des biens du maréchal d’Humières ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1899, 3e série, t. XV, p. 59-174.
- « Inventaire de l’abbé d’Effiat, abbé comandataire de Saint-Sernin ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 1899, 3e série, t. XV, p. 182-214.
- « Inventaire du mobilier et des collections antiques et modernes du cardinal de Polignac, 1738 ». Nouvelles Archives de l’art français, 1899, t. XV, p. 252-297.
- « Inventaire de Jean-François Oeben ». Nouvelles Archives de l’art français, Revue de l’art ancien et moderne, 3e série, t. XV, 1899, p. 298-367.
- « Les Gobelin, teinturiers en écarlate au faubourg Saint-Marcel ». Mémoires de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, 1904, XXXI.
- « Testament et inventaire après décès de André Le Nostre et autres documents le concernant ». Bulletin de la Société de l’Histoire de l’Art français, 1911, n°2.
- « Documents sur l’ancien hôtel Soubise, aujourd’hui Palais des Archives nationales. L’architecte du palais Pierre-Alexis Delamaire, adjudication de l’hôtel de Guise au prince de Soubise, scellé et inventaire des biens du prince de Soubise après sa mort (1688-1787) ». Mémoires de la Société de l’histoire de Paris et de l’Île-de-France, 1915, t. XLII.
- « Histoire de l’Académie de Saint-Luc ». Archives de l’art français, 1915, t. IX.
Bibliographie critique sélective
- « Mélanges offerts à Jules Guiffrey ». Nouvelles Archives de l’art français, 1916, t. VIII.
- Stein Henri. – « Jules Guiffrey ». Bibliothèque de l’École des chartes, 1918, n°LXXIX, p. 242-244.
- Fenaille Maurice. – « Notice sur la vie et les travaux de M. Jules Guiffrey ». Académie des beaux-arts, comptes rendus des séances, 24 mars 1923.
Sources identifiées
Paris, Archives nationales
- AB IV C, 82, dossier n°5 (20 pièces), mais également les dossiers de comptabilité du personnel (AJ 19)
- F17 2833 (deux pièces)
- F17 2973 B (14 pièces) : mission en Orient
- F 17 4024-4053 : École des chartes
- F21 2286, dossier n°13 (5 pièces) : missions
- LH 1229, n°81 (11 pièces) : dossier de Légion d’honneur
En complément : Voir la notice dans AGORHA