Le musée est né à Rome au début du dernier tiers du xve siècle, quand une collection d’antiques tenues pour les emblèmes de la Ville et qui appartenaient à la papauté fut déposée par un souverain pontife au Capitole, dans le palais des autorités municipales (…). Ce mot de musée désigne ici toute collection publique d’objets naturels ou artificiels exposée dans un intérieur séculier ou sécularisé et destinée à être préservée pour un avenir indéfiniment lointain. […] Aujourd’hui, il existe environ quatre-vingt-cinq-mille musées. […] Chemin faisant, le musée a changé aussi à bien des égards. Au départ, il avait un contenu strictement délimité : les antiquités romaines. Il est devenu omnivore, à tel point qu’il serait difficile de trouver des objets qui ne figurent pas quelque part dans un musée. […] À l’origine, le musée était un lieu où l’on allait admirer et partager son admiration avec les autres. On y va toujours admirer les chefs-d’œuvre de l’art ou certaines productions naturelles. Mais les musées sont aussi des lieux d’étude tant pour le public que, dans une bien plus grande mesure, pour
le personnel qui y travaille. […] La gestion des collections des musées, jadis exercée par des gens du monde, souvent des collectionneurs ou des artistes, est
désormais, dans les établissements d’une certaine taille, réservée aux conservateurs professionnels formés à cet effet. […] Heureusement, ils se laissent tous distribuer en un nombre limité de types en fonction de leur contenu […]. Ces types sont eux-mêmes des produits de l’histoire comme le montre le tableau qui suit :

1470 antiques

1550 art, histoire naturelle, curiosités, raretés, merveilles

1790 histoire, médecine, technique, armée

1850 arts décoratifs

1870 ethnographie, musée de plein air, industrie, science

1960 vie quotidienne, travail, loisirs

Krzysztof Pomian

Éclairage

Les musées, au fil des années, pour le dire simplement, ont évolué du trésor aux structures actuelles très professionnalisées dont les ramifications vont de l’accueil des scolaires au colloque international de spécialistes en passant par la restauration et la numérisation des collections. Néanmoins l’acquisition des œuvres reste toujours ponctuée de surprises, d’impondérables et d’un jeu constant entre la science des conservateurs et le talent d’anticipation des grands collectionneurs bien décrit par Jean-Hubert Martin lorsqu’il évoquait les donations de Daniel Cordier au musée national d’art moderne – Centre Georges-Pompidou : « Le musée ne peut tout engranger. Il est inéluctable que certains aspects de la création aient tendance à lui échapper. Le collectionneur peut alors jouer le rôle d’antenne ou de poste avancé. »

Ouvertures

Le musée est-il un espace hors du monde, hors de la société ou bien un champ de bataille du social ? Selon la définition du Conseil international des musées (ICOM) en 2022, le
musée est « une institution permanente, à but non lucratif et au service de la société, qui se consacre à la recherche, la collecte, la conservation, l’interprétation et l’exposition du patrimoine matériel et immatériel. Ouvert au public, accessible et inclusif, il encourage la diversité et la durabilité. Les musées opèrent et communiquent de manière éthique et professionnelle, avec la participation de diverses communautés. Ils offrent à leurs publics des expériences variées d’éducation, de divertissement, de réflexion et de partage de connaissances ». Exposer, montrer, étudier, informer, offrir, divertir, conserver, légitimer, critiquer sont autant de missions des musées aujourd’hui. Présentes dans les collections du musée de l’histoire de l’immigration, les œuvres des artistes Sammy Baloji, Chéri Samba ou Pascale Marthine Tayou interrogent en creux leur lieu d’exposition, le Palais de la Porte Dorée, bâtiment construit à l’occasion de l’Exposition coloniale de 1931, questionnent la circulation des objets et des pièces sous l’angle du pillage colonial et mettent en lumière les relations denses et complexes des avant-gardes occidentales aux arts africains. Si certains musées français conservent des textes au titre de leur valeur historique et documentaire tel le diplôme sur papyrus du roi mérovingien Clotaire II datant de l’an 625 (musée des Archives Nationales), ailleurs, et surtout dans le monde asiatique, les textes écrits sont conservés dans les musées au titre que la calligraphie y est considérée comme un art majeur. On pourra s’en convaincre en lisant les 8 chapitres de l’étude que la sinologue Yolaine Escande consacre au Geste calligraphique en Chine (préparation mentale, circonstances, matériel, tenue du pinceau, choix du texte, copie et appréciation, composition et effet visuel)

Pistes pédagogiques

  1. Questionner lors de la visite d’un musée les choix de scénographie et d’accrochage (parcours du visiteur, circuit chronologique ou thématique, ressources et médiation à disposition du public…). Identifier les discours et les intentions sous-jacents.

2. Donner du sens aux collections, les inscrire dans leur contexte. L’étude des collections en ligne du musée national de l’histoire de l’immigration, des mutations et des fonctions de l’espace muséal donne lieu à une réflexion sur la complexité des traces laissées par l’immigration.

3. Faire collection, rassembler, amasser, ranger, classer et mettre en valeur des objets au sein de l’établissement. La classe, un couloir, un espace partagé deviennent le lieu d’une collection, à la création d’une ambiance de beauté, de rareté ou d’étrangeté, en dialogue avec l’origine des cabinets de curiosités.

4. Faire parler à la première personne de manière fictionnelle un objet technologique contemporain, devenu un siècle plus tard une pièce de musée, contextualiser sa création et sa fonction, mettre en avant ses qualités formelles et justifier le choix de sa conservation, sa préservation et monstration

Références au programme

Programme du cycle 3
Se repérer dans un musée, un lieu d’art, un site patrimonial
Connaissances et compétences associées : Se repérer dans un musée ou un lieu d’art par la lecture et la compréhension des plans et des indications
Programme du cycle 4
Histoire des arts
Thématique 5 : L’art au temps des Lumières et des révolutions (1750-1850)
Objet d’étude : Émergence des publics et de la critique, naissance des médias
Arts plastiques
Questionnements : L’œuvre, l’espace, l’auteur, le spectateur
La présence matérielle de l’oeuvre dans l’espace, la présentation de l’œuvre : le rapport d’échelle, l’in situ, les dispositifs de présentation, la dimension éphémère, l’espace public ; l’exploration des présentations des productions plastiques et des œuvres ; l’architecture
Technologie
Design, innovation et créativité
Imaginer des solutions en réponse aux besoins, matérialiser une idée en intégrant
une dimension design

Compétences en histoire des arts
Rendre compte de la visite d’un lieu de conservation ou de diffusion artistique ou de la rencontre avec un métier du patrimoine
Attendus de fin cycle en histoire des arts
Rendre compte en termes personnels d’une expérience artistique vécue, soit par la pratique soit comme spectateur
Connaissances et compétences associées en histoire des arts
Rendre compte, en termes personnels et en utilisant des supports divers, de la visite d’un lieu de conservation ou de diffusion artistique, ou de la rencontre avec un métier lié à la conservation, la restauration ou la valorisation du patrimoine

Domaine du socle commun de connaissances, de compétences et de culture
Domaine 3 La formation de la personne et du citoyen

Les ressources numériques