Daumier et Baudry dans la salle Labrouste

Honoré Daumier par Albert Marque (1872-1939)

Ce buste est une fonte en bronze à la cire perdue, peut être réalisée par Hébrard (la marque du fondeur n’est pas visible). Il est signé sur l’épaule gauche « A. Marque 1907 ».

Albert Marque, Buste d’Honoré Daumier, fondu en 1907, bibliothèque de l’INHA – collecitons Jacques Doucet. Cliché Alice Sidoli – INHA

On ignore pourquoi Jacques Doucet passa commande d’un buste à Albert Marque , sculpteur demeuré assez obscur. Il lui acheta aussi quelques dessins. Peut-être fondait-il des espoirs sur les talents de cet artiste. Pour cette commande, Marque avait d’abord pensé réaliser un Donatello ; mais la difficulté d’en trouver des portraits authentiques l’orienta ensuite sur un portrait de Clodion (1738-1814). Finalement, ce fut un Daumier. Connu pour ses caricatures et ses gravures politiques, Honoré Daumier (1808-1879) était un artiste polyvalent, à la fois peintre, graveur et sculpteur, dont le talent ne fut reconnu qu’après sa mort. Marque n’avait que 7 ans à la mort de Daumier ; il s’agit donc d’un buste posthume, sans doute réalisé d’après photographies. De Daumier, Albert Marque a également laissé un masque de terre cuite dont la physionomie est fort différente du buste de la bibliothèque ; il atteste l’intérêt du sculpteur pour la figure de Daumier (localisation actuelle inconnue).

Aujourd’hui, Albert Marque est surtout connu des collectionneurs de jouets : il est l’auteur de la poupée la plus chère du monde. Créée en collaboration avec la couturière Jeanne Margaine-Lacroix et la manufacture de Sèvres, la poupée Albert Marque rencontra un vif succès mais ne fut fabriquée qu’en 100 exemplaires numérotés, entre 1910 et 1916, d’où son extrême rareté. Le numéro 27, passé aux enchères chez Theriault’s, maison de vente spécialisée en poupées, a été adjugé un peu plus de 300 000 $ le 29 mars 2014, réalisant le record du monde pour une poupée.

Paul Baudry par Paul Dubois (1829-1905)

Ce buste est également une fonte en bronze à la cire perdue. Il ne présente pas de marque de fondeur (probablement Hébrard). Le piédouche porte une inscription gravée : « PAVLO BAVDRY PICTORI PAVLVS DVBOIS SCVLPTOR AMICVS AMICO FECIT LVTETIAE PARISIORVM ANNO MDCCCLXXXII. » (Au peintre Paul Baudry son ami Paul Dubois sculpteur, Paris, 1882). Soulignons qu’il ne provient pas de Jacques Doucet, mais des enfants de l’archéologue Théodore de Reinach, qui en firent don à la bibliothèque en 1928-1929, après la mort de leur père le 28 octobre 1928 [1].

Paul Dubois, Buste de Paul Baudry, bibliothèque de l’INHA – collections Jacques Doucet. Cliché Alice Sidoli – INHA

Paul Baudry (1828-1886) est un des grands représentants de la peinture académique sous le Second Empire. Prix de Rome en 1850, il reçut de nombreuses commandes officielles, dont une partie du décor de l’Opéra Garnier. Ce portrait fut réalisé de son vivant par son ami Paul Dubois (1829-1905), grand sculpteur de la deuxième moitié du XIXe siècle dont on peut apprécier l’oeuvre dans le nouveau musée Camille Claudelqui vient d’ouvrir ses portes à Nogent-sur-Seine. Une autre fonte de ce buste orne la tombe de Baudry au cimetière du Père-Lachaise.

[1] Y. L., « L’action de la Bibliothèque d’art et d’archéologie de l’université de Paris », Beaux-Arts, 5 (15 mai 1929), p. 8-9.

Références bibliographiques

• François Theimer, Albert Marque, un sculpteur, une poupée, 2008 [en cours de commande] ;

• Antoinette Le Normand-Romain, « Jacques Doucet et l’histoire de l’art », dans Jacques Doucet collectionneur et mécène, 2016, p. 184.

Jérôme Delatour, service du patrimoine