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La salle Labrouste célèbre ses 150 ans
Mis à jour le 13 décembre 2021
Histoire et patrimoine de l'INHA
Auteur : Stéphanie Fournier
Le 15 décembre 2016, vous avez pu découvrir la nouvelle salle de lecture de la bibliothèque, après sa rénovation. Cette salle fête aujourd’hui ses 150 ans !
C’est en effet le 12 juin 1868, que la grande salle de lecture pour quatre cents personnes fut ouverte, avec précisément 344 places assises et 70 places debout (Henri Labrouste, architecte 1801-1875, 1977, p.81).
En effet, au fil des siècles, la bibliothèque royale, installée depuis 1721 dans le quadrilatère Richelieu, devenue impériale, était à l’étroit dans ses locaux, par l’afflux notamment des 300 000 volumes «confisqués» lors de la révolution, et du renforcement du dépôt légal conjugué à l’essor de la production imprimée du aux nouvelles techniques d’impression.
Le 16 février 1854, l’empereur Napoléon III confie à Henri Labrouste un projet à la fois grandiose et ambitieux : construire un bâtiment apte à accueillir la bibliothèque impériale. Henri Labrouste (1801-1875), auréolé de la réussite de l’ouverture de la bibliothèque Sainte-Geneviève, 3 ans plus tôt, succède à son confrère Louis Visconti (1791-1853) qui vient de s’éteindre.
Claude-Marie-François Dien et Jean-Auguste-Dominique Ingres, Labrouste : (portrait), s.d, Service des collections de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts, NUM EST 6082. Cliché INHA.
Henri Labrouste entreprend un vaste chantier de modernisation du site, alors composé de bâtiments construits à la suite, héritage du 17ième et du 18ième. L’édifice qu’il va imaginer pour la bibliothèque impériale s’organise autour de l’immense salle de lecture des imprimés, salle qui porte aujourd’hui son nom.
Comme il l’avait fait à la bibliothèque Sainte-Geneviève, il décide pour restaurer et agrandir les locaux, de mettre en avant son goût pour la lumière, le métal, et la décoration architecturale influencée par l’antique. De fait, la recherche de la lumière était une nécessité dans un site cerné de rues étroites, d’autant que le site est alors dépourvu de lumière artificielle par crainte de l’incendie.
C’est donc en hauteur qu’il faudra la trouver ; La nouvelle salle de lecture, de plan carré, est ainsi couverte de neuf coupoles (inspirées dit-on des robes à crinoline si en vogue à l’époque) de faïence blanche, percées d’oculi et soutenues par de minces colonnes de dix mètres de hauteur ; sur les côtés, de grands paysages peints (réalisés par Alexandre Desgoffe (1805-1882) élève d’Ingres, en 1865) inspirés des peintures antiques découvertes dans les villas d’Italie, simulent des fenêtres ouvertes sur la nature (d’ailleurs, saurez-vous trouver l’écureuil caché dans les frondaisons ?) donnant ainsi l’illusion d’un espace plus aéré.
En cette période d’essor industriel qu’est la première moitié du XIXe siècle, le métal était surtout employé à des fins de constructions telles que les ponts, les gares ou les bâtiments industriels. Labrouste, ici, utilise à la fois la fonte et le fer forgé pour l’assemblage de la construction intérieure, mais aussi en tant qu’éléments décoratifs par le biais notamment de l’ossature métallique des neufs coupoles.
La salle ainsi conçue, avec son caractère monumental mâtiné d’orient byzantin, confère à faire de ce lieu un temple moderne dédié à la science et à la connaissance. Élève de l’École des Beaux-Arts, lauréat du Grand Prix de Rome d’architecture en 1824, ayant séjourné cinq ans à la villa Médicis, Labrouste ne manqua pas non plus d’apposer un caractère antiquisant à sa création.
En 1864, le sculpteur néo-classique Jean-Joseph Perraud (1819-1876) se voit confier la réalisation des monumentales cariatides encadrant l’entrée du magasin central.
Cariatides de la salle Labrouste, 2018. Cliché Laszlo Horvath.
Et en 1866, fut créée l’ornementation polychrome composée de motifs néogrecs, volutes et palmes. Enfin, tel un panthéon de la connaissance, le pourtour de l’hémicycle est orné de 36 médaillons représentant les grandes personnalités du monde des lettres et des arts.
Vue d’un médaillon depuis les coursives depuis la salle Labrouste, 2018. Cliché Laszlo Horvath.
Ces choix aussi ingénieux qu’audacieux, font qu’Henri Labrouste est aujourd’hui considéré comme un pionnier de l’architecture moderne. La salle est classée au titre des monuments historiques depuis 1983. À défaut d’être lecteur de la bibliothèque, si vous souhaitez contempler au mieux cet espace magnifiquement restauré, vous pouvez le visiter.
Vue des fresques de la salle Labrouste, 2018. Cliché Laszlo Horvath.
Stéphanie Fournier, service du catalogue
Références bibliographiques
- Pierre Saddy, Henri Labrouste architecte 1801-1875, Paris, Caisse Nationale des Monuments Historiques et des Sites, 1977, p. 75-93
- Aurélien Conraux, Anne-Sophie Haquin et Christine Mengin (dir.), Richelieu : quatre siècles d’histoire architecturale au cœur de Paris , Paris, Bibliothèque nationale de France, Institut national d’histoire de l’art, 2017, 293 p.
- Catalogue de l’exposition de la Cité de l’architecture en 2012 : Corine Bélier (dir.), Barry Bergdoll (dir.), Marc Le Coeur (dir.), Labrouste, 1801-1875, architecte : la structure mise en lumière, Paris, Nicolas Chaudin, 2012.