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DELAIRE, Edmond
Mis à jour le 17 décembre 2008
(30 mai 1856, Paris – 13 juin 1921, [lieu inconnu])
Auteur(s) de la notice : JACQUES Annie
Profession ou activité principale
Architecte
Autres activités
Historien, journaliste
Sujets d’étude
La section d’architecture de l’École des beaux-arts
Carrière
1872 : admis en seconde classe à l’École des beaux-arts
1876 : admis en première classe à l’École des beaux-arts ; remporte le quatrième prix au concours pour la reconstruction du théâtre des arts à Rouen
1879 : construction de l’école municipale du musée à Tours
1883 : admis au deuxième essai pour le concours du Grand Prix de Rome
1887 : construction du collège de Meaux
1889 : sous-inspecteur des bâtiments civils pour le chantier de l’Exposition universelle de 1889
1890 : construction du lycée d’Épinal
1894 : première édition du Répertoire des anciens élèves de l’École des beaux-arts
1896-1898 : inspecteur des bâtiments civils à Pnom-Penh (Cambodge)
1899 : publication d’une étude d’économie sociale sur les populations pauvres de Pnom-Penh dans la revue Les Ouvriers des deux mondes ; devient architecte départemental de la Seine-et-Marne
1900-1921 : construction de la cité ouvrière de Châlons-en-Champagne ; collaborateur régulier de la revue La Construction moderne
1907 : deuxième édition du Répertoire des anciens élèves de l’École des beaux-arts
Membre de la Société centrale des architectes (1887) ; membre de la Société des artistes français (1887) ; officier d’Académie (1889) ; chevalier de l’ordre du Cambodge (1889)
Étude critique
Rien ne prédisposait Edmond Delaire à être un des premiers historiens de la section d’architecture de l’École des beaux-arts. Né à Paris, le 30 mai 1856, probablement dans un milieu modeste (ses parents Félix-Augustin Delaire et Ursule-Joséphine Pinot demeuraient dans le quartier populaire du faubourg Saint-Denis), il est admis dans la section d’architecture de l’École des beaux-arts, comme élève de Georges Coquart (1831-1903), en 1872. Quatre ans plus tard, en 1876, il est admis en première classe. Ce niveau de compétences lui permet d’entrer très tôt dans la profession architecturale, tout en poursuivant ses études.
Il porte un intérêt particulier aux programmes de constructions scolaires, qu’on retrouve régulièrement tout au long de sa carrière : en 1877, il présente un projet pour l’École normale de Laon, pour lequel il remporte un premier prix. En 1878, il est primé pour l’école municipale du musée à Tours qu’il réalise l’année suivante. Quelques années plus tard, en 1887, il construit le collège de Meaux pour lequel il a remporté un premier prix. Pour le concours de projets scolaires ayant eu lieu en 1888 au Trocadéro, il est également récompensé. En 1889, il est médaillé pour un projet de groupes scolaires à Colombes. En 1890 il remporte, un deuxième prix pour le lycée d’Épinal, qu’il construit avec son ancien maître Georges Coquart. En 1891, il est primé pour le projet d’école de Melun. Enfin en 1895, c’est pour une école et une justice de paix à Neuilly qu’il est à nouveau distingué.
Parallèlement, il poursuit son cursus à l’École des beaux-arts, tentant à plusieurs reprises le concours du Grand Prix de Rome avant d’avoir atteint l’âge limite de trente ans : en 1883, il est admis au deuxième essai, il concourt à nouveau en 1885 et 1886, mais sans succès.
Outre les écoles, il a réalisé pendant cette période de sa vie de nombreux autres travaux : en 1885, il est attaché au musée du Luxembourg ; entre 1886 et 1890 il assure la direction des travaux de l’agence Camille Formigé (1845-1926), spécialiste de constructions en fer pour le nouveau métro de Paris et pour l’Exposition universelle de 1889.
En 1887, il est admis à la Société centrale des architectes et à celle des artistes français. En 1889, il devient officier d’Académie et chevalier de l’ordre du Cambodge.
En décembre 1891, c’est à l’occasion du quinzième traditionnel banquet annuel des anciens élèves architectes de l’École qu’est lancée l’idée d’éditer un annuaire à la fois historique et professionnel, « lien matériel qui témoignerait de l’existence de chacun » et faciliterait les relations amicales et professionnelles entre les uns et autres. Louis-François Roux (1838-1921), assisté de Delaire et de Louis David de Penanrun (1839-1899), mettent en œuvre la première édition du répertoire, publiée en octobre 1894 : « Nous espérons [écrit Roux dans la préface de l’ouvrage] qu’il sera considéré par nos confrères sans exception, élèves ou non de l’École des beaux-arts, comme un moyen efficace de ralliement […] Qu’il sera pour le public un moyen certain d’apprécier l’importance de notre rôle dans la société, l’utilité de notre concours par l’étendue de nos connaissances et par la variété et la souplesse de notre art […] Les administrations publiques et privées y puiseront des indications précieuses dans bien des cas ; les magistrats y trouveront des bases d’appréciation de la compétence technique des architectes dont ils doivent emprunter les lumières ; tous seront certains en s’adressant à des architectes mentionnés dans cet ouvrage de trouver réunies la capacité et l’honorabilité dont nos écoles sont les foyers incontestés. » Pour la première comme pour la seconde édition, Delaire se charge du travail ingrat de dépouillement des registres et des dossiers de l’École. Roux précise dans l’avant-propos de 1907 : « Notre ami Delaire, toujours aussi dévoué, aussi infatigable, aussi désintéressé, répétons-le, a repris la tâche qu’il avait déjà menée à si bonne fin et s’est plongé dans ce travail de recherches, de classification capable de faire pâlir le bénédictin le plus exercé, comme le plus intrépide ».
Deux ans après la parution de la première édition du répertoire, Delaire part travailler au Cambodge. Grâce au soutien de Charles Garnier (1825-1898), il obtient un emploi d’inspecteur des Bâtiments civils à Pnom-Penh. Il s’embarque pour Saïgon en octobre 1896, mais son séjour est de courte durée : en 1898 son poste est supprimé. Rentré en France, il tente vainement de rester en fonction dans le corps des Bâtiments civils, mais les services administratifs du ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts lui opposent une fin de non recevoir : depuis 1891, les postes étaient pourvus par voie de concours. À la même époque, il publie dans la revue de l’économiste Frédéric Le Play (1806-1882) Les Ouvriers des deux mondes, une étude d’économie sociale traitant de quelques exemples des populations pauvres de Pnom-Penh. Le Play, polytechnicien, économiste et ingénieur, était le fondateur de l’École de la paix sociale, il défendait l’idée d’une société fondée sur le patronage de classes dirigeantes, le « paternalisme ». Particulièrement apprécié par l’empereur Napoléon III, il avait été commissaire général de l’Exposition universelle de 1867.
Certains passages du texte de Delaire sont très critiques pour l’administration française au Cambodge, ce qui n’est peut-être pas étranger à son éviction du corps des Bâtiments civils. Cet article révèle d’autre part son grand intérêt pour les théories de Le Play. C’est d’ailleurs lui qui réalisera en 1906 avec le sculpteur André Allar (1845-1926) le monument élevé en l’honneur de Le Play à Paris, dans le jardin du Luxembourg.
Après son retour du Cambodge, Delaire se consacre à divers travaux parisiens, notamment les gares du chemin de fer de ceinture de Bercy, Tolbiac et Aubervilliers. Il réalise également l’école de filles de la rue Sarette. À Fontainebleau, il participe aux travaux de rénovation du palais de justice et du château. Il devient également architecte départemental de la Seine-et-Marne. Il doit sans doute à son attachement aux idées de Le Play le plus important chantier qu’il ait été amené à conduire entre 1900 et son décès en 1921 : la cité ouvrière de Champagne-sur-Seine, en Seine-et-Marne, pour la famille Schneider. Quand celle-ci y installe ses nouvelles usines de matériel électrique, Delaire est chargé du vaste programme de cité ouvrière qui accompagne la réalisation des nouvelles usines. Le programme est celui d’une véritable petite ville nouvelle avec maisons individuelles, maisons-blocs, écoles, poste, mairie, système de voirie, d’adduction d’eau et d’évacuation des eaux usées. En 1904, la cité comptait déjà 1500 habitants, à terme elle devait en compter 25000.
Parallèlement à son travail pour le répertoire des anciens élèves de l’École des beaux-arts et à ses chantiers de Seine-et-Marne, Delaire mène une activité de journaliste. Pendant de nombreuses années, il est le collaborateur régulier de La Construction moderne pour laquelle il rédige, sous son nom ou sous les pseudonymes de Stapathi ou Fellow, des articles consacrés à différents aspects du métier d’architecte. Il défend le rôle bienfaisant et primordial de ce dernier et soutient l’utilité d’une reconstitution des corporations du bâtiment. Pendant la Grande Guerre, il est amené à publier de très nombreuses nécrologies de ses anciens camarades de l’École tués dans les combats. À l’issue du conflit, pendant les deux dernières années de sa vie, il fait la synthèse de ce travail de mémoire en préparant Le Livre d’or de la Grande Guerre, qui répertorie toutes les citations et les faits d’armes de ses collègues architectes peintres et sculpteurs de l’École des beaux-arts, ouvrage qui paraît après son décès en 1921.
Annie Jacques, conservateur général du patrimoine, ancien conservateur de la bibliothèque et des collections de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris
Principales publications
Ouvrages
- Les Architectes élèves de l’École des beaux-arts. Collab. de Roux Louis-François et Penanrun Louis David (de). Paris : Librairie de la Construction moderne, 1e éd. 1894, 2e éd. 1907.
- « Petit fonctionnaire de Pnom-Penh (Cambodge) ». In Les Ouvriers des deux mondes, deuxième série, 44 fascicules. Paris : Firmin-Didot, 1899.
- [sous le nom de Staphati]. – Les Futurs Embellissement de la ville de Melun. Melun, 1912.
- Paul Friesé, architecte (1851-1917). Paris : Société centrale des architectes, 1917.
- Le Livre d’or de la Grande guerre : 1914-1918. Paris : Libraire de la Construction moderne, 1923.
Bibliographie critique sélective
- Les Archives biographiques contemporaines, revue analytique et critique des hommes et des œuvres, 1906-1917, VII, 60.
- Delaire Edmond, Roux Louis-François et Penanrun Louis David (de). – Les Architectes élèves de l’École des beaux-arts. Paris : Librairie de la Construction moderne, 2e éd. 1907.
- Ulrich Thieme et Félix Becker. – Allgemeines Lexikon der bildenden Künstler. Leipzig : E.A. Seemann, 1913.
- Rümler E. – « Nécrologie ». In La Construction moderne, 3 juillet 1921.
- Sacy Jacques Sylvestre (de). – « Edmond Delaire ». In Amat Roman (d’), Dictionnaire de biographie française. Paris : Librairie Letouzey et ainé, t. X. 1965.
- Allegemeines Künstlerlexikon, bio-bibliographisher index A-Z. Munich ; Leipzig : Saur, 2000.
- Jacques Annie. – Edmond Delaire, préf. de la réed. électronique des Architectes élèves de l’École des beaux-arts. Villiers-sur-Marne, Phénix Éditions, 2004.
Sources identifiées
Aix-en-Provence, archives d’Outre-mer
- EE II 243 (4) (dossier de mission au Cambodge)
Paris, Archives nationales
- AJ 52 362 (dossier individuel d’élève)
Paris, service de documentation du musée d’Orsay
- dossier documentaire
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