Auteur(s) de la notice :

MAUDELONDE Aurore

Profession ou activité principale

Juge suppléant, maire

Autres activités
Archéologue, numismate, critique, collectionneur

Sujets d’étude
Archéologie gauloise et gallo-romaine, céramique, Renaissance française, numismatique française, histoire et art local

Carrière
1842 : juge suppléant au tribunal de Napoléon-Vendée à la Roche-sur-Yon, chef lieu du département de la Vendée – depuis Napoléon Ier
1841 : premiers travaux à la Société des antiquaires de l’Ouest. Il y devient questeur en 1844, puis vice-président en 1846
1851 : démission de ses fonctions de juge suppléant après le coup d’état du 2 décembre
1864 : organise le 31e Congrès archéologique de France à Fontenay-le-Comte dont il est le secrétaire général
1870-1881 : collaboration à la Société de l’Histoire de l’Art français, rédige de nombreux articles dans diverses revues, participe à l’élaboration de la carte géographique de la Vendée propose et contribue à la nouvelle dénomination de rues à Fontenay-le-Comte
1878 : prêt de nombreux objets de sa collection personnelle pour l’Exposition universelle de 1878

Étude critique

Benjamin Fillon est une de ces personnalités qui a marqué sa région autant pour son engagement dans la reconnaissance artistique et historique de la Vendée que par son implication dans sa vie politique et quotidienne. Mais elle est aussi ambiguë par l’utilisation de méthodes aujourd’hui controversées.

Conscient de l’importance de ses origines et de l’histoire de sa province, la Vendée, il va y consacrer sa vie. Peu de personnes s’y sont intéressées avant lui et ses travaux sont très hétéroclites, prenant en compte des personnages historiques tels Jean Besly, François Viète, Nicolas Rapin dont il fait rééditer les ouvrages pour les mettre à la portée de tous ; le séjour d’hommes célèbres en Vendée, comme celui de l’écrivain Rabelais chez les cordeliers de Fontenay-le-Comte ; les excursions géologiques de Bernard Palissy en Vendée ; l’histoire de l’art et l’histoire même de la Vendée en partant de ses origines jusqu’à son siècle.

Son entourage fut sans doute le déclencheur de cette passion puisque son oncle, le numismate M. Faustey Poey d’Avant, le guida pour ses premiers travaux dans cette discipline. Ainsi, dans son ouvrage Considérations historiques et artistiques sur les monnaies de France, Fillon tente d’établir une classification des monnaies d’ordre chronologique en les associant à différents types créés par des artistes nationaux ou étrangers, afin de démontrer l’impact de l’histoire.

Mentionné avant tout dans les dictionnaires comme archéologue, il participe à plusieurs fouilles en Vendée, dont la villa de Saint-Médard-des-Prés, révélatrice de sa méthode d’approche intellectuelle. Il s’attache, tout d’abord, à faire publier dans le quotidien de la ville où il habite, Fontenay-le-Comte, les avancées de ses recherches, marquant par là son intérêt à faire partager ses découvertes et à les rendre publiques. Les structures de la villa sont plus ou moins décrites, mais il s’astreint à une description scrupuleuse des objets qu’il range en un catalogue stylistique et chronologique, suivie de planches de gravures les représentant. Il fait ensuite appel aux techniques les plus avancées de son époque en demandant à des spécialistes, tel Eugène Chevreul, des analyses scientifiques de certains dépôts de matière conservés. Enfin, à l’aide de ces résultats et en s’appuyant sur les ouvrages reconnus de savants comme Winckelmann, il donne son interprétation des fonctions de l’objet, de son origine géographique et des circonstances de sa redécouverte et conclut qu’ « arrivé à la fin d’un travail, qui demande à la fois le flair d’un archéologue et l’œil d’un artiste, on aura rendu à l’histoire un service signalé ».

De ce fait, Benjamin Fillon a élaboré une méthode particulière. Deux choses semblent être vraiment importantes dans ses recherches : dans un premier temps, son désir de prouver que l’histoire d’aujourd’hui découle de celle de ses ancêtres, d’où la nécessité de l’étudier et de la faire apprendre à tous. Le deuxième point est un croisement, indispensable pour lui, entre toutes les disciplines : ce décloisonnement lui semble nécessaire pour mieux appréhender la société actuelle et obtenir la meilleure analyse possible. Ainsi son ouvrage Poitou et Vendée, réalisé en collaboration avec l’aquafortiste Octave de Rochebrune et réédité en 1981, étudie plusieurs localités sous la forme de monographies, en partant de leurs origines jusqu’au XIXe siècle. Fillon y compile tous les travaux disponibles pour son sujet. Il montre aussi bien l’histoire, l’art et la configuration actuelle de ces différents lieux, ainsi que les personnalités historiques que les séjours d’hommes célèbres. Il tente par là de faire l’étude la plus complète possible de sa province. Même si ce livre reste inachevé, il aura permis de mettre en lumière la Vendée.
Par la suite et grâce à la connaissance d’Anatole de Montaiglon, avec lequel il participe dès 1870 à la Société de l’Histoire de l’Art français, Benjamin Fillon élargit son champ d’activité à l’histoire de l’art. La plupart de ses articles, publiés par cette société, consiste en une suite de documents, devis portant sur des artistes français. En effet, pour ses recherches en histoire de l’art, il tient toujours à s’appuyer sur des documents écrits de l’époque étudiée. Puis, il ordonne les productions artistiques selon un ordre chronologique et stylistique tout en élaborant une évolution linéaire de l’art scandée par des phases de transformations ou de dégénérescences. Dans cette optique, il invente des classifications, qui même si elles n’auront pas vraiment de suite, dévoilent sa manière de penser. Ainsi, dans un de ses principaux ouvrages L’Art de la terre chez les Poitevins, suivi d’une étude sur l’ancienneté de la fabrication du verre en Poitou, où il retrace les caractéristiques et l’évolution chronologique de la céramique de sa région, il sépare des périodes comme l’époque gallo-romaine, en période gallo-romaine et romano-gauloise, suivant l’influence dominante sur les objets. C’est-à-dire que l’influence dominante est gauloise à l’époque gallo-romaine et elle est romaine à l’époque romano-gauloise. Il ne lui semble toutefois pas possible que des objets considérés comme des œuvres d’art puissent provenir de la même période que d’autres moins aboutis.
Passionné par la Renaissance française, style dans lequel il fait restaurer son château La Court d’Aron, il s’attarde sur les faïences dites d’Henri II et retrace l’histoire de son attribution à la communauté d’Oiron – théorie qui fut réfutée par Edmond Bonnaffé en 1888. Fillon a cependant limité les recherches de l’origine de cette production au Poitou.

De même que cette attribution erronée, le point sombre de cette personnalité est qu’actuellement des documents utilisés pour ses travaux sont soupçonnés d’avoir été falsifiés et il aurait « inventé » certaines découvertes archéologiques, telle celle du trésor de l’étang de Nesmy, dont il a fallu 80 ans avant de prouver l’impossible existence. Fidèle à sa méthode, il s’est appuyé sur des documents contemporains avec tant de rigueur qu’après lui, des savants, et parmi les plus renommés Joseph Déchelette, tentèrent sans succès de percer le secret de cette « découverte ».

Benjamin Fillon est une personnalité à comprendre aussi par ses collections. Dispersées et vendues après sa mort, elles furent également l’objet d’études, de prêts lors d’expositions comme l’Exposition universelle de 1878 et de dons à certains musées parisiens tel le Louvre car, selon lui, « il importe aussi que les objets de quelque valeur entrent comme spécimens, dans les collections publiques, et qu’on les accompagne de bonnes notices qui leur servent de certificats de notoriété ».

Aurore Maudelonde, guide conférencière des villes d’art et d’histoire d’Île-de-France

Principales publications

Ouvrages et catalogues d’expositions

  • Recherches historiques et archéologiques sur Fontenay : biographie des hommes illustres de Fontenay. Nairière-Fontaine, 1846.
  • Documents pour servir à l’histoire du Bas-Poitou et de la révolution en Vendée, publiés par Benjamin Fillon. Fontenay : Robuchon, 1847.
  • Le Cabinet de Michel Tiraqueau, sénéchal de Fontenay, par Benjamin Fillon. Fontenay : Robuchon, 1848.
  • Description de la villa et du tombeau d’une femme artiste gallo-romaine découverts à Saint-Médard-des-Prés (Vendée). Fontenay : Robuchon, 1849.
  • Ritter Frédéric. – Notice sur la vie et les ouvrages de François Viète, par B. Fillon et F. Ritter. Nantes : impr. de C. Gailmard, 1849.
  • Considérations historiques et artistiques sur les monnaies de France. Fontenay-Vendée, 1850.
  • Lettres à M. Ch. Dugast-Matifeux sur quelques monnaies françaises inédites. Fontenay-Vendée : Robuchon, 1853.
  • Rapport présenté à la Société archéologique de Nantes sur une découverte de monnaies, d’ustensiles et bijoux de l’époque gallo-romaine, faite près du Veillon, canton de Talmon (Vendée). Nantes : A. Guéraud, 1856.
  • Lettres écrites de la Vendée à M. Anatole de Montaiglon. Paris : Tross, 1861.
  • Les Faïences d’Oiron, lettre à M. Riocreux,… signé Benjamin Fillon, 8 décembre 1862. Fontenay : Robuchon, s. d.
  • L’Art de la terre chez les Poitevins, suivi d’une étude sur l’ancienneté de la fabrication du verre en Poitou. Niort : L. Clouzot, 1864.
  • Programme de la XXXIe session du Congrès archéologique de France à Fontenay-le-Comte (Vendée), le 12 juin, 1864. Fontenay : Robuchon, 1864.
  • Fillon Clémentine. – Nalliers. Ses dépôts de cendres. Ses antiquités romano-gauloises. Ses seigneurs féodaux. Ses légendes. Son état actuel. Fontenay-le-Comte : Robuchon, 1865.
  • Rochebrune Octave (de). – Poitou et Vendée : études historiques et artistiques. Niort : V Clouzot, 1861-1865 ; Niort : L. Clouzot, 1887 ; Marseille : J. Laffitte, 1981.
  • [Anon.]. – Département de la Vendée. Coup d’œil sur les élections sénatoriales de 1876, par Benjamin Fillon. Fontenay-Vendée : Robuchon, 1876.
  • L’Art romain et ses dégénérescences au Trocadéro. Paris : impr. de Quantin, 1878.
  • Rapport sur la carte routière et hydrographique de la Vendée, présenté au conseil général de ce département dans sa session d’août 1878. La Roche-sur-Yon : impr. de Vve Cochard-Tremblay, 1878.
  • Lettre à M. Jules Quicherat, directeur de l’École des chartes, sur une découverte d’objets gaulois en or faite en 1759 dans l’étang de Nesmy (Vendée). La Roche-sur-Yon : impr. de Vve Cochard-Tremblay, 1879.
  • Mémoire sur une nouvelle nomenclature des dénominations des rues, places, carrefours et quais de la ville de Fontenay, présenté au conseil municipal par Benjamin Fillon. Fontenay-Vendée : A. Baud, 1880.
  • Catalogue des objets d’arts et de haute curiosité. Bronzes antiques, bijoux mérovingiens, monnaies et médailles antiques du Moyen Âge et de la Renaissance, vierge du XIIIe siècle en ivoire, émaux de Limoges, faïences de Perse, plats de Bernard Palissy, statue en marbre par J. Fancelli, porcelaine de Chine, objets variés, tableaux, dessins, estampes composant la collection de feu Benjamin Fillon et dont la vente aura lieu à l’hôtel Drouot, salle n°8, le lundi 20 mars 1882 et jours suivants. Paris, 1882.
  • Catalogue des monuments typographiques et d’un choix de livres rares et précieux provenant du cabinet de Feu M. Benjamin Fillon. – Avec quelques éclaircissements et des notes bibliographiques. Paris : Claudin, 1883.

Articles

  • « Quittance donnée à Saintes par Bernard Palissy, pour trois milliers de merrains (22 février 1560) ». Archives de l’art français, 1ère série, tome II, septembre 1852, p. 193-194.
  • « Lettre de Napoléon Ier sur son voyage à travers la Vendée (Nantes le 10 août 1808) ». Revue des provinces de l’Ouest, 1853, 2e partie, p. 275.
  • « Avantages de la numismatique au point de vue historique, à propos de la publication Monnaies féodales de France par Faustin Poey-d’Avant. ». L’Indicateur de Fontenay, 22 février 1859.
  • « Les Artistes fontenaisiens à l’Exposition des beaux-arts de 1869 ». L’Indicateur de Fontenay, 17 mars 1869.
  • « Découverte d’une nouvelle sépulture gallo-romaine d’un jeune homme dans les dépôts de cendres de l’Ilot-les-Vases, près de Nalliers ». L’Indicateur de Fontenay, 29 mars et 23 mai 1872. Aussi dans : Bulletin de la Société de statistiques, sciences, lettres et arts du département des Deux-Sèvres, tome I, 1870-3. Niort, L. Clouzot, 1874, p. 303-305.
  • « Extraits des Archives historiques de la ville de Fontenay-Le-Comte ». Société des archives historiques du Poitou, 1872, p. 117-242.
  • Montaiglon Anatole (de). – « Artistes français en 1800 ». Nouvelles archives de l’art français, Société de l’Histoire de l’Art français, 1872, p. 430-347.
  • G. J. –J., « Quittance d’artistes et d’artisans (1578-1626) ». Nouvelles Archives de l’art français, Société de l’histoire de l’art français, 1879, p. 221-226.

Bibliographie critique sélective

  • Valette René. – Le Livre d’or de Fontenay-le-Comte. Fontenay : impr. Gournaud, 1888, p. 2-28.
  • Tourneux Maurice. – Benjamin Fillon. Paris : Librairie de l’art, 1881.
  • Bonnaffé Edmond. – « Les Faïences de Saint-Porchaire ». Gazette des Beaux-Arts, 2e période, t. XXXVI, 1888, p. 313-317.
  • Du Crottoy Paul. – « Impressions d’un curieux, Benjamin Fillon et sa vente ». Société d’émulation de la Vendée, 1892, p. 1-7.
  • Montaiglon Anatole (de). – Bibliographie chronologique des ouvrages de B. Fillon, 1895.
  • Chauvet Gustave. – Trésor de l’étang Nesmy (Vendée). Poitiers : impr. de G. Roy, 1915.
  • Célébrités fontenaisiennes, exposition organisée à l’occasion du 4e Congrès des sociétés savantes de la Charente et du Poitou par l’Association « Les Amis du vieux Fontenay », mai 1948. Fontenay-le-Comte : impr. de Lussaud frères, 1948.
  • Brethé Émile. – Benjamin Fillon et l’art de terre. Fontenay-le-Comte : impr. Lussaud, 1958.
  • Gerny Yannick (du) et Maupéou Gilles (de). – Dictionnaire topographique, historique et géographique de la Vendée. Luçon : impr. H. Rezeau, 1959.
  • Brethé Émile. – Un rabelaisien excessif, Benjamin Fillon. Fontenay-le-Comte : impr. Lussaud, 1960.
  • Debien Gabriel et Brethé Émile. – « Zozo Arouet ou Benjamin Fillon ? (Correspondance de Voltaire, lettre I) ». Revue du Bas-Poitou, t. LXXII, 1961, p. 29-39.
  • Brethé Émile. – « De quelques “documents” sur Michel Colombe ». Bulletin de la société des antiquaires de l’Ouest, 3e trimestre, 1961, p. 213-227.
  • Sireau Clément (abbé). – Nesmy, Bas-Poitou, Vendée. Étiolles : impr. S.C.O.P. les dominos, 1964.
  • Vital Christophe. – 150 années de découvertes archéologiques en Vendée : la mort et le sacré. Thonon-les-Bains : Éditions de l’Albaron, 1990.

Sources identifiées

Fontenay-le-Comte, Archives communales

  • Fonds Benjamin Fillon à Fontenay-le-Comte, environ 1 500 pièces de sa collection
  • Fonds des collections paroissiales de Fontenay-le-Comte

La Roche-sur-Yon, Archives départementales de Vendée

  • 39J : fonds Benjamin Fillon
    • Documents de la période révolutionnaire (période antérieure à 1790) : opérations de guerre. Classement suivant les différents districts : 40 documents
  • 52J 16 : fonds Gambier
    • Fonds contenant des archives historiques de la ville de Fontenay-le-Comte : recueil chronologique, manuscrits de 1300 pièces, actes, cartes, inscriptions lapidaires et portraits réunis par Benjamin Fillon, calligraphiés ou reproduits par Alexandre Bitton, en réponse à une commande de la ville de Fontenay en 1866. T1 : temps antérieurs au XVIe (exemplaire du procès-verbal de la sépulture d’une femme artiste à Saint-Médard-des-Prés, dons aux églises, chartes de fondation, expédition de Saint-Louis…), T2 : de 1500 1586. T3 : 1587 à 1628. T4 : 1628 à 1715. T5 : 1716 à 1788. T6 : 1789 à 1792. T7 : 1793. T8 : 1794 à 1805. T9 : 1805 à 1872. T10 : table des dessins, des cartes….
  • Collection Benjamin Fillon : de nombreux documents sur l’histoire de Fontenay, le Bas-Poitou, les familles (Tiraqueau), le curé René Moreau, la famille Jallais, l’histoire de Notre-Dame de Fontenay

Nantes, Bibliothèque municipale, Fonds Dugast Matifieux

Paris, archives des Musées nationaux

  • Hommage de son ouvrage sur la Vendée publiée en collaboration avec Rochebrune, 14 avril 1867. Non retrouvé
  • Lettre de remerciement pour son don d’une plaque au Louvre en bronze av l’entrée d’Henri IV à Paris, le 16 mai 1878
  • Lettre mentionnant la présence d’un sceau du royaume d’Italie donné par lui au musée des souverains et présent au dépôt du Louvre. 10 avril 1875
  • Lettre de recommandation de Benjamin Fillon en faveur de M. de Rochebrune désirant graver une vue de l’ancien Louvre, 29 mai 1867
  • Pièces relatives à plusieurs départements / pièces provenant de la direction des musées : Demande d’un crédit au musée du Louvre pour acheter les bronzes antiques et les médailles 19 mai et 24 juillet 1879

En complément : Voir la notice dans AGORHA