Anonyme, Portrait d'archéologue. Portrait en buste de Théophile Homolle (1848-1925), Saint-Germain-en-Laye, musée d'Archéologie nationale. Tirage photographique sur papier au gélatino-bromure d'argent, 10,4 x 6,5 cm © Direction des musées de France, 2006.

Auteur(s) de la notice :

WITTENBURG Andreas

Sujets d’étude
Historien, épigraphiste et archéologue

Profession ou activité principale

Directeur de l’École française d’Athènes, des musées nationaux et de la Bibliothèque nationale

Autres activités
Histoire et épigraphie grecques, art grec

Carrière
1869 : reçu à l’École normale supérieure
1874 : agrégé d’histoire
1874-1878 : membre de l’École française d’Athènes
1878-1884 : maître de conférences d’Antiquité grecque et latine, université de Nancy
1884-1890 : professeur suppléant d’épigraphie et d’Antiquité grecque au Collège de France
1886 : docteur ès lettres
1891-1903 : directeur de l’École française d’Athènes
1904-1911 : directeur des musées nationaux (Louvre)
1912-1913 : directeur de l’École française d’Athènes
1913-1923 : directeur de la Bibliothèque nationale

Grand officier de la Légion d’honneur

Étude critique

Théophile Homolle fut épigraphiste, archéologue et philologue, et directeur de l’École française d’Athènes à un moment décisif dans l’évolution de cette institution. L’importance du personnage dépasse cependant largement le cadre de sa spécialité. Parisien, fils de médecin de la bonne bourgeoisie, passé par la khâgne du lycée Louis-le-Grand, normalien, agrégé d’histoire, Homolle est en 1874 parmi les premiers élèves de l’École française de Rome, in statu nascendi sous la direction d’Albert Dumont. C’est ce savant qui a exercé, après les maîtres et archéologues Georges Perrot et Léon Heuzey à l’École normale supérieure, une influence décisive sur la carrière de Homolle. Celui-ci fait ses premières expériences de fouilles à Ostie et écrit un Essai sur l’histoire, les institutions et la topographie d’Ostie d’après les récentes découvertes qui, au grand regret de ses collègues et malgré l’approbation de la Commission de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, est resté inédit. En 1886, il suit en Grèce son directeur et mentor, nommé directeur à Athènes. L’année suivante, Homolle est affecté par Dumont aux fouilles de Délos. Après les sondages décevants d’Albert Lebègue sur les hauteurs du Cynthe, il est le premier à commencer à fouiller, dans des conditions très difficiles, la zone présumée du sanctuaire et de la ville marchande aux pieds de la montagne. Il a poursuivi son action dans les années suivantes avec une énergie remarquable comme membre de l’École et, après son retour en France, comme chargé de mission du ministère. Ses premiers rapports sur les résultats extraordinaires des fouilles permettent au jeune Homolle de déployer dans le Bulletin de correspondance hellénique à peine créé « sa merveilleuse richesse d’aptitudes » (Dumont), dans l’analyse, par exemple, de la statue de Nikandre et de son inscription à une époque où les connaissances sur la sculpture grecque archaïque restaient encore limitées. Les fragments d’inscriptions et de sculptures découverts fournissent à Homolle les sujets des deux travaux présentés pour son doctorat en 1886 : « Les archives de l’intendance sacrée à Délos (315-166 av. J.-C.) » et « De antiquissimis Dianae simulacris deliacis ». Avant même le doctorat, il est nommé maître de conférences d’Antiquité grecque et latine à l’université de Nancy, et bientôt appelé au Collège de France comme suppléant de Paul Foucart, parti diriger à l’École d’Athènes l’enseignement de l’épigraphie et des antiquités grecques ; il est ensuite nommé chargé de cours à la Sorbonne. Après le retour de Foucart, c’est Homolle, qui semble le candidat naturel pour le poste et il part à son tour à Athènes en 1890 avec sa jeune famille. L’année précédente, il avait présenté les résultats des travaux à Délos à l’Exposition universelle internationale au palais du Trocadéro. Il rencontre en Grèce un succès extraordinaire auprès de la communauté étrangère et de la bonne société athénienne, sur le plan tant scientifique que politique, grâce d’une part à sa compétence savante et à sa capacité remarquable à parler le grec, d’autre part à son aisance dans les rapports sociaux et son sens de la diplomatie dans l’action. Il a ainsi contribué largement à résoudre les difficultés de la conclusion du contrat entre la France et la Grèce sur la concession de fouilles de Delphes, mis en danger par un chantage autour de la question douanière des raisins secs. Il a de plus milité inlassablement pour obtenir de la Chambre des députés la concession d’un financement généreux pour cette entreprise. Le cinquantenaire de l’École française d’Athènes, fêté avec un certain retard à cause de la situation politique entre la Grèce et l’Empire ottoman, est devenu sous son égide, en présence du roi et du prince royal, un événement majeur dans la vie publique athénienne. Le travail à Delphes, finalement commencé en 1892, a donné des résultats aussi spectaculaires que les fouilles de Délos. Homolle, qui a présidé à la découverte d’un nombre d’œuvres sans égal par rapport aux autres archéologues français, s’empresse de les présenter, comme par exemple les fragments de l’Aurige trouvés en 1896.

Entre 1871 et 1903, les volumes du Bulletin de correspondance hellénique, qu’il avait relancé dès son arrivée comme directeur à Athènes en 1890, regorgent de ses articles et rapports ; le reproche fait à Homolle par certains contemporains d’avoir tardé avec les publications approfondies et globales semble bien injuste. La reconstitution du Trésor des Siphniens, désigné encore comme le Trésor des Cnidiens, est exposée en moulages à l’Exposition universelle de 1900 et la présentation est honorée par un prix. En ce qui concerne l’organisation des fouilles, c’est Homolle qui a insisté pour introduire, déjà à Délos en 1880 (Henri-Paul Nénot), puis à Delphes (Albert Tournaire), la collaboration régulière des architectes aux chantiers pour l’assemblage des fragments architecturaux et la constitution d’un plan des sanctuaires. Cela vaut aussi pour la phase suivante des fouilles de Délos, continuées à partir de 1902 grâce à la subvention d’un des plus grands mécènes de l’époque, le Franco-Américain duc de Loubat. L’importance « de provoquer en faveur de l’École des donations destinées à des voyages, des fouilles ou des publications » a été soulignée dans un document programmatique de Homolle rédigé en 1897.

En 1903, au nom de l’intérêt de ses quatre enfants, Homolle renonce à la direction de l’École d’Athènes et rentre en France, sans trouver un poste vacant adéquat dans sa spécialité. Grâce à sa notoriété et à ses relations dans le monde politique et culturel, il est cependant nommé directeur des musées nationaux en 1904. Un des problèmes qu’il a dû affronter pendant sa direction du Louvre concerne les donations, surtout après le grand scandale du legs Caillebotte et l’acceptation tardive d’une partie de cette collection en 1896. Il n’est pas possible de saisir le rôle précis de Homolle dans ces questions, mais un des plus grands donateurs de la Troisième République, le collectionneur-peintre et historien de l’art Étienne Moreau-Nélaton, qui était étudiant, ami et, après sa mort, successeur d’Homolle comme membre libre à l’Académie de beaux-arts, parle dans la nécrologie officielle du défunt comme un des amis qui « n’étaient pas inutiles pour venir à bout de l’affaire » conclue en juillet 1906. Ajoutons encore que l’accrochage de l’Olympia d’Édouard Manet dans la salle des États du Louvre en 1907 (la même année que celui du Déjeuner sur l’herbe du legs Moreau-Nélaton au musée des Arts décoratifs) est accompli sous la direction de Homolle. On peut facilement imaginer que cette action lui a valu la critique de certains de ses camarades à l’Institut. Pendant sa direction, Homolle a pris un intérêt particulier pour l’École du Louvre, notamment comme lieu de l’enseignement de l’histoire de l’art « par commerce direct des monuments originaux », comme il le souligne dans un rapport. Sa carrière comme directeur du Louvre a trouvé une fin abrupte avec le vol de la Joconde du 28 août 1911. Homolle, qui avait plusieurs fois évoqué des problèmes de sécurité au ministère et était absent au moment du vol, a servi de fusible, et on a reproché au sous-secrétaire aux Beaux-Arts, l’artiste-peintre Henri Dujardin-Beaumetz, d’avoir commis une injustice en sacrifiant Homolle. Ce dernier reprend très brièvement la direction de l’École d’Athènes entre 1904 et 1905, mais son activité est entravée par la maladie et la mort de sa femme. Accablé, Homolle rentre en France. L’année suivante, il est nommé directeur de la Bibliothèque nationale et s’acquitte de cette nouvelle tâche, très différente de ses activités précédentes, avec son énergie habituelle et, selon le témoignage de ses contemporains, avec beaucoup de talent. Il s’attache notamment à mettre les réserves de la Bibliothèque à l’abri des risques éventuels liés à la Grande Guerre. En 1923, Homolle prend sa retraite. Ses dernières années sont consacrées à la fondation de l’Union académique internationale à l’initiative de l’Académie des inscriptions et belles-lettres en 1919, et à la gestion de cette fédération internationale d’Académies. La première réunion destinée à relancer la coopération après la Grande Guerre se tient dans le cabinet de Homolle à la Bibliothèque nationale. Il a été secrétaire, vice-président et enfin, en 1925, peu avant sa mort, président de cette Union.

Andreas Wittenburg

Principales publications

Ouvrages et catalogues d’expositions

  • De Antiquissimis Dianae simulacris deliacis. Paris : apud viudam A. Labitte, 1885.
  • Les Archives de l’intendance sacrée à Délos (315-166 avant J.-C.). Paris : E. Thorin, 1887 (« Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome », fasc. 49).
  • Homolle Théophile, éd. – Tite-Live, Ab Urbe condita libri XXIII-XXV et XXVI-XXX. 2e éd. avec notes, commentaire, index, cartes et plans par Théophile Homolle et Othon Riemann. Paris : Hachette, 1891, 2 vol.

Articles
Nombreux rapports et articles, souvent très détaillés et exhaustifs, dans le Bulletin de correspondance hellénique (plusieurs articles chaque année entre 1871 et 1886, et de 1888 et 1903 ; responsable de la revue en tant que directeur de l’École française d’Athènes), les Monuments et Mémoires de la fondation Eugène Piot (codirecteur à partir de 1918) et des chapitres dans les publications des Fouilles de Delphes et de l’Exploration archéologique de Délos, que Homolle a dirigées ou codirigées. On ne peut citer ici que les plus importants :

  • « Statues trouvées à Délos ». Bulletin de correspondance hellénique 3, 1879, p. 99-110.
  • « Comptes des hiéropes d’Apollon Délien ». Bulletin de correspondance hellénique 6, 1882, p. 1-167.
  • « Les Romains à Délos ». Bulletin de correspondance hellénique 8, 1884, p. 75-158.
  • « Comptes et Inventaires des temples déliens en l’année 279 ». Bulletin de correspondance hellénique 14, 1890, p. 389-511 ; 15, 1891, p. 113-168.
  • « Topographie de Delphes ». Bulletin de correspondance hellénique 21, 1897, p. 256-320.
  • « L’Aurige de Delphes ». Monuments et Mémoires de la fondation Eugène Piot 4, 2, 1898.
  • « Monuments figurés de Delphes. Les fouilles du temple d’Apollon ». Bulletin de correspondance hellénique 25, 1901, p. 457-515 ; 26, p. 587-639.
  • « L’Origine du chapiteau corinthien ». Revue archéologique 2, 1916, p. 17-60.
  • « L’Origine des Cariatides ». Revue archéologique 2, 1917, p. 1-67.

Sources identifiées

Pas de sources recensées à ce jour

En complément : Voir la notice dans AGORHA