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ROSENTHAL, Léon
Mis à jour le 28 septembre 2011(11 juin 1870, Paris – 15 août 1932, Lyon)
Auteur(s) de la notice : PASSINI Michela
Profession ou activité principale
Enseignant, directeur de musée
Autres activités
Historien de l’art, critique d’art, militant socialiste
Sujets d’étude
Peinture italienne de la Renaissance, peinture française du XIXe siècle
Carrière
Scolarité au lycée Louis-le-Grand, Paris
1890 : entrée à l’École normale supérieure ; puis, agrégé d’histoire, enseigne au lycée de Dijon
1900 : soutient à la Sorbonne une thèse intitulée La Peinture romantique, sous la direction d’Henry Lemonnier
1904 : le 2 août, épouse Gabrielle Bernheim, nièce du critique Roger Marx, auront deux enfants, Dante (1905) et Sylvie (1906) ; élu au conseil municipal de Dijon, chargé des beaux-arts et des œuvres des enseignements
1905 : enseigne au lycée de Versailles
1906 : enseigne au lycée Louis-le-Grand
1910 : candidat du parti socialiste aux élections législatives dans le Ve arrondissement de Paris
1912 : commence sa collaboration à L’Humanité
1924 : à la suite d’Henri Focillon, occupe la chaire d’histoire de l’art moderne à l’université de Lyon et dirige le musée des Beaux-Arts de la ville
1930 : malade, interrompt ses activités professionnelles
Étude critique
Enseignant, directeur de musée, auteur d’ouvrages historiques, mais aussi critique militant et intellectuel engagé, Marc Herminie Léon Rosenthal incarne, par son itinéraire, une histoire de l’art qui traverse en France, entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe, une première phase de professionnalisation.
Normalien et agrégé d’histoire, Rosenthal appartient à la génération de savants qui, autour de 1900, ont soutenu les premières thèses en histoire de l’art au sens actuel du terme – non plus des dissertations littéraires, mais de véritables travaux d’érudition menés à partir des documents textuels et iconographiques. Sa thèse, intitulée La Peinture romantique et publiée en 1900, a en effet été rédigée sous la direction d’Henry Lemonnier, nommé en 1899 à la nouvelle chaire d’histoire de l’art de la Sorbonne, la première officiellement destinée à l’enseignement de cette discipline en France. L’ouvrage, qui valut à son auteur le prix Charles Blanc – partagé avec Louis Dimier, qui avait soutenu la même année sa thèse sur Primatice –, présentait la singularité, par rapport aux travaux académiques de l’époque, de traiter sous un angle historique d’événements très récents. De plus, aux côtés des travaux d’Émile Mâle, François Benoît ou encore Louis Dimier, cette thèse fut parmi les premières à aborder des sujets français plutôt que des questions liées à l’histoire de l’art antique (pour une liste des thèses portant sur les arts soutenues en France entre 1810 et 1900, voir Lyne Therrien, L’Histoire de l’art en France : genèse d’une discipline universitaire, annexe VII, p. 529-537).
Se voulant un travail d’histoire rigoureux, capable de retracer non seulement les faits d’ordre esthétique, mais également les « causes extérieures » – politiques, sociales, intellectuelles – de l’éclosion du romantisme, l’ouvrage reposait néanmoins sur une très nette prédilection pour ce courant artistique et sur une identification manifeste à son objet d’étude. Rosenthal affirmait vouloir « étudier la révolution picturale qui s’est accomplie, en France, sous la restauration » et qui « a eu pour objet de délivrer l’art des formules surannées et comme résultat de substituer à une discipline impersonnelle le règne de l’individualisme » (La Peinture romantique, p. 1). Ainsi, son ambition était de prouver que le romantisme « n’a pas été le fruit passager d’une excitation éphémère, mais qu’il exprime, au contraire, une façon éternelle et, dans une mesure très large, légitime, de comprendre l’art » (ibid.). À un moment où l’héritage de la peinture romantique est au cœur de la réflexion d’un peintre comme Paul Signac – que l’on songe à son D’Eugène Delacroix au néo-impressionnisme, paru en 1898 –, le discours de Rosenthal semble avoir été fortement conditionné par la situation artistique contemporaine et tend à établir un rapport de filiation entre les romantiques et certaines tendances de la peinture de la fin du XIXe siècle (La Peinture romantique, p. 314).
Le plan de l’ouvrage était clairement conçu : une période de quinze ans, de 1815 à 1830, était abordée sous un angle français, puis international ; après une première partie analysant le contexte politique et social de la Restauration, venait une seconde section consacrée à l’examen des faits plus proprement « esthétiques ». Dans ce premier travail historique, Rosenthal mettait en avant une série de solutions méthodologiques qui, reprises et développées dans Du romantisme au réalisme, ont déterminé un regain d’intérêt pour ce dernier ouvrage et sa redécouverte, au cours des années 1980, comme premier jalon d’une histoire « sociale » de l’art. Ainsi, Rosenthal faisait du problème des rapports entre les artistes et la société le cœur de son propos, étudiait l’action des pouvoirs publics et des institutions, et suggérait que le marché pouvait exercer une action directe sur la production artistique et influer, par exemple, sur le choix des sujets (La Peinture romantique, p. 152).
Soucieux de définir le romantisme dans ses aspects stylistiques et idéaux, Rosenthal en indiquait le caractère essentiel dans la priorité absolue accordée aux données visuelles : « Le trait dominant de la peinture romantique, c’est qu’elle a cherché à s’affranchir de toutes les préoccupations étrangères à la peinture même. Elle a attribué à l’art une signification assez élevée pour le rendre indépendant. Elle a refusé de l’étayer sur des idées, des sciences et des croyances qui ne fussent pas d’essence esthétique. Jamais peinture n’a été si uniquement peinture que celle-là. La doctrine de l’art pour l’art est la sienne et, bien que les peintres romantiques ne l’aient pas formulée, elle est le fond de leur pensée. » (La Peinture romantique, p. 149.)
Cette lecture, novatrice par rapport aux interprétations courantes du romantisme (Ernest Chesneau, André Michel, Arsène Alexandre), amenait Rosenthal à s’interroger sur les conséquences de la montée en force de l’« individualisme » et du principe de l’autonomie de l’art. Un des effets en était, à ses yeux, la dissolution des liens qui, jusque-là, avaient uni public et artistes : « C’est là l’ombre du tableau que nous venons d’esquisser, c’est là le malaise qui s’est déclaré de 1815 à 1830 et dont les effets n’ont pas été encore conjurés : le divorce entre le goût public et les génies qui avaient été créés pour le conduire et l’éclairer. » (La Peinture romantique, p. 311.) Si la responsabilité de cet état de choses pouvait être attribuée au public, peu instruit et méfiant, dans la conclusion de l’ouvrage, Rosenthal suggérait aussi que les artistes semblaient avoir oublié leur « mission sociale ».
Très tôt dans sa carrière, Rosenthal manifesta un fort intérêt pour les idéaux de l’« art social ». Proche de Roger Marx, dont il épousa la nièce en 1904, il fut sensible à ses appels répétés à une démocratisation de la jouissance de l’art. En 1894, il avait publié dans la Revue internationale de sociologie de René Worms un long article intitulé « Les Destinées de l’art social d’après P.-J. Proudhon ». Il s’agissait d’un texte plus historiographique que programmatique : Rosenthal y dénonçait la vision proudhonienne des rapports entre art et société, perçue comme simpliste et bâtie sur un déterminisme rigide, et mettait en avant une conception de la dynamique art-société beaucoup plus souple et complexe. Mais, paru dans une revue à visée réformatrice à un moment où Rosenthal se rapprochait du parti socialiste, ce texte annonçait la vision de l’art comme élément central du contexte social qu’il développerait quelques années plus tard. Dans cette optique, Rosenthal devait s’engager dans des projets visant l’éducation esthétique d’un public large, en tant que fondateur de l’université populaire de Dijon en 1901, mais aussi dans sa pratique d’enseignant.
Professeur d’histoire au lycée de Dijon, dès 1899, Rosenthal appela de ses vœux une réforme de l’enseignement du dessin (Revue universitaire, no 15, mars 1899). Cette préoccupation pour la didactique des arts à l’école devait rester chez lui très vive : elle trouva son expression dans une série de textes où, en plus de la pratique artistique, il proposait d’introduire des notions d’histoire de l’art dans l’enseignement dès l’école primaire et de prévoir des aperçus sur l’histoire des arts au lycée comme complément essentiel de l’instruction historique (« L’Art à l’école et l’Enseignement esthétique », Les Idées modernes, mars 1909 ; « L’Enseignement du dessin dans l’enseignement secondaire », L’Enseignement secondaire, 15 novembre 1911 ; L’Histoire de l’art et la Culture esthétique. Leçon professée à l’École normale supérieure des jeunes filles à Sèvres, le 6 novembre 1911). Rosenthal fut d’ailleurs auteur de manuels et d’ouvrages destinés à un jeune public, alliant la transmission de connaissances, considérées comme indispensables à la formation des futurs citoyens, à une pédagogie du patrimoine imprégnée de valeurs patriotiques (Notre art national. Abrégé de l’histoire de l’art français à l’usage des enfants des écoles, 1915 ; L’Art et les Artistes étudiés devant les œuvres : visites artistiques, Paris et région parisienne, 1927 ; Notre Musée, l’art expliqué par les œuvres à l’usage des classes de troisième, deuxième, première des lycées et collèges, 1928).
Cet engagement en faveur de la diffusion de l’éducation esthétique trouva un organe d’expression dans L’Humanité de Jean Jaurès, où Rosenthal signa, à partir d’avril 1912, plusieurs articles traitant de différents aspects du projet de l’art social, dont deux exposaient la pensée et les actions de Roger Marx, figure de proue du mouvement. En outre, Rosenthal devait continuer le programme de Marx dans la revue L’Art social, où il écrivit à partir d’octobre 1913, et présida l’association L’Art de France qui, née en 1915, alliait la volonté d’encourager un « art pour tous » à la volonté militante de promouvoir l’« expansion artistique » de la France à l’étranger (La Maison française à l’étranger [texte d’une conférence prononcée le 27 janvier 1917], p. 12). Après la guerre, Rosenthal consacra un texte programmatique à ces questions : Villes et Villages français après la guerre (1918), qui établissait le cahier des charges des artistes, architectes et urbanistes dans le contexte nouveau de la reconstruction, prenant comme point de départ les idéaux de Roger Marx – l’ouvrage lui était d’ailleurs dédié.
Les premières années du siècle voient Rosenthal associer l’engagement en faveur de l’art social à l’activité politique au sein du parti socialiste : élu en 1904 au conseil municipal de Dijon, où il est chargé des beaux-arts et des œuvres des enseignements, il est, en 1910, candidat de son parti aux élections législatives dans le Ve arrondissement de Paris. En parallèle, il poursuivait ses recherches sur la peinture française du XIXe siècle qui aboutirent à la publication de quelques articles pionniers, tel « Les Conditions sociales de la peinture sous la Monarchie de Juillet » (trois articles dans la Gazette des Beaux-Arts en 1910), et de son ouvrage majeur, Du romantisme au réalisme. La peinture en France de 1830 à 1848, paru chez Henry Laurens en 1914. L’œuvre historique de Rosenthal se situe en effet à l’articulation de deux tendances : d’une part, une action pour la démocratisation de l’art, considéré comme le pivot d’une société renouvelée ; de l’autre, un engagement historiographique pour une histoire de l’art capable de restituer l’imbrication étroite d’éléments esthétiques et facteurs sociaux, dont chaque œuvre témoigne.
D’un point de vue méthodologique, l’ouvrage prolongeait certains aspects de la thèse. Il était toutefois beaucoup plus radical. Ainsi, Rosenthal affirmait s’être « livré à une enquête de sociologie » (Du romantisme au réalisme, p. 1), où le choix du terme indique une familiarité avec les nouvelles sciences sociales assez inhabituelle dans l’histoire de l’art française de l’époque.
L’œuvre abordait la phase successive à celle traitée dans la thèse : étendant son analyse à la période 1830-1848, Rosenthal se mesurait au problème de la transition du romantisme à une esthétique qui en était issue, mais qui devait marquer une rupture radicale dans l’histoire de l’art en France. Les « événements publics » revêtaient à ses yeux un rôle essentiel dans cette transition. Il était donc nécessaire de rendre compte des « passions politiques et sociales » aussi bien que des « différentes formes de l’activité intellectuelle » (Du romantisme au réalisme, p. XXVI). Ainsi Rosenthal prenait explicitement Hippolyte Taine comme modèle et, tout en se démarquant du déterminisme de l’auteur de la Philosophie de l’art, évoquait sa démarche comme le remède à une histoire de l’art incapable de penser les œuvres dans leurs relations avec les autres activités humaines : « La formation et les modifications de la technique et des thèmes paraissent à quelques-uns les sujets uniques auxquels doive s’appliquer l’investigation de l’historien de l’art. Je ne prétends point combattre cette tendance par des arguments théoriques, il me suffit que mes investigations m’en aient perpétuellement marqué l’étroitesse et l’insuffisance. L’admiration que nous inspirent les œuvres d’art ne sera pas amoindrie si, au lieu d’apporter à leur examen des préoccupations esthétiques exclusives, nous essayons de discerner la complexité des forces qui les ont déterminées. » (Du romantisme au réalisme, p. XXVI-XXVII).
Sous l’angle de la méthode historique, deux changements majeurs par rapport au précédent La Peinture romantique sont ici à signaler. Si, dans sa thèse, Rosenthal pratiquait une histoire de chefs-d’œuvre et déclarait ne vouloir s’attacher qu’aux « héros », aux « manifestations capitales » de l’art (« Le Rôle de l’historien de l’art n’est pas celui d’un fossoyeur », p. 2), avec Du romantisme au réalisme il annonçait une historiographie où l’intérêt documentaire primait sur les considérations de qualité ou de prestige des œuvres (p. XXVII). En deuxième lieu, La Peinture romantique était bâti sur une bipartition très nette entre analyse des conditions sociales et culturelles générales (premiers chapitres) et étude des « faits esthétiques » (chapitres suivants) : si Rosenthal livrait une analyse approfondie des « causes extérieures », celle-ci ne servait au fond que de préambule à l’étude des « causes esthétiques », internes au développement de l’histoire de l’art et vraiment déterminantes : « Un véritable peintre », écrivait-il pour justifier cette démarche, « est surtout sensible aux impressions artistiques. Les événements politiques, si importants soient-ils, les transformations des pensées ou de croyances agissent moins sur son esprit que la vue d’un tableau exécuté par des procédés à lui inconnus. C’est par l’œil surtout qu’il pense ; c’est par l’œil qu’il reçoit les suggestions qui modifieront sa manière. » (p. 43.) Au contraire, dans l’ouvrage de 1914, cette distinction nette cédait la place à une articulation souple des différents niveaux d’analyse.
Un dernier trait marquant mérite d’être au moins évoqué. À l’image de l’historiographie contemporaine, Rosenthal pense par catégories nationales. Ainsi, en 1900 comme en 1914, il a attribué l’« échec » du romantisme en France à l’incompatibilité entre le « génie » français, essentiellement classique, et un art faisant « prédominer le sentiment sur la raison » et inspiré par des « exemples germaniques » (Du romantisme au réalisme, p. 112). Cette écriture nationale de l’histoire de l’art connut un moment de radicalisation avec la Grande Guerre. Dans Le Martyre et la Gloire de l’art français, conçu comme une « initiation artistique » et destiné à un jeune public, Rosenthal fustigeait les Allemands, destructeurs de la cathédrale de Reims, sur des tons qui rappellent de près ceux d’Émile Mâle : « Bien qu’ils ne perdent aucune occasion d’affirmer leur supériorité, ils ont cédé aussi à la tentation d’insulter notre histoire plus belle, notre civilisation plus éclatante et plus ancienne que la leur. Le développement historique de l’Allemagne ne présente pas […] l’harmonieuse évolution qui, à travers les triomphes et les revers, a caractérisé la formation, chaque jour plus intime, de l’âme de la France. Les Allemands ne l’ignorent point et ils soupçonnent aussi qu’il y a dans notre goût, dans nos mœurs une subtilité délicate, héritage d’un long et glorieux passé […]. C’est de tout cela qu’ils ont voulu se venger en bombardant la cathédrale de Reims, cathédrale du sacre des rois, cathédrale de Jeanne d’Arc et fleur de notre art gothique. » (Le Martyre et la Gloire de l’art français. Une initiation artistique, p. 14).
Dans ces pages, la France était décrite comme le foyer d’une civilisation supérieure, dont l’art était l’expression la plus éloquente. Les ouvrages que Rosenthal publia pendant la guerre posaient les jalons d’une pédagogie nationaliste du patrimoine. Ainsi, par l’évocation du « sol » et des « morts », l’appel à l’« Enfant des écoles de France » qui clôt le manuel Notre Art national, semble rejoindre la conception du patrimoine, mûrie dans un terreau intellectuel radicalement différent, d’un Maurice Barrès : « Enfant des écoles de France […], tu es l’héritier de tous ceux qui, depuis l’origine des âges, ont vécu sur le sol où tu grandis […]. Respecte les pierres qui rappellent leur existence, leur travail, leurs pensées. Conserve ce patrimoine précieux qui honore la France […]. Dans la mesure de tes forces, tu maintiendras la grandeur de la France dont la mission est de répandre à travers le monde les idées généreuses et le culte bienfaisant de la Beauté. » (Notre Art national. Abrégé de l’histoire de l’art français à l’usage des enfants des écoles, p. 47).
L’œuvre de Rosenthal tient aujourd’hui une position singulière dans nos représentations de l’historiographie française du siècle dernier. Non réédité pendant de longues années, bien que jugé indispensable par les spécialistes (Pierre Georgel, p. 111), Du romantisme au réalisme était republié aux éditions Macula en 1987, en plein débat sur l’histoire sociale de l’art. Michael Marrinan, qui fut à l’origine de l’initiative, la situait lui-même d’emblée dans le cadre de cette polémique. Il venait de soutenir une thèse sur le mécénat royal sous Louis-Philippe (Painting Politics for Louis-Philippe : Art and Ideology in Orléanist France 1830-1848, New Haven-Londres, Yale University Press, 1988) dont le propos s’inscrivait clairement dans la « new art history », et exprimait le souhait que le livre de Rosenthal puisse proposer « un terrain d’entente » entre les prises de position souvent contradictoires des représentants d’une histoire sociale en pleine élaboration. Dans son introduction, il procédait à une analyse très fine et rigoureuse de l’ouvrage, évitant une réappropriation facile du texte de Rosenthal sous le signe de l’histoire sociale de l’art. L’opération gardait néanmoins toute sa valeur symbolique : ceux qui, en ces années, travaillaient à fonder une histoire sociale de l’art virent en Rosenthal un précurseur prestigieux, et c’est ainsi que le savant est encore perçu aujourd’hui.
Par rapport aux travaux d’historiens de l’art contemporains, comme la synthèse sur le XIXe siècle de Louis Dimier (1914), ou celle, plus tardive, de Henri Focillon (1927-1928), l’ouvrage de Rosenthal se signale en effet par la place qu’il accorde aux facteurs socioculturels, ainsi que par l’emploi conscient des catégories des nouvelles sciences sociales, dû à sa familiarité avec les milieux de la sociologie naissante. Toutefois, employer la catégorie d’histoire « sociale » de l’art à son égard (Marrinan lui-même évite de le faire), ou le définir un anticipateur, relèverait de l’anachronisme. Ainsi, il conviendra plutôt d’inscrire sa trajectoire dans un courant d’« esthétique sociologique » (Nathalie Heinich), qui s’est développé à partir du milieu du XIXe siècle et compte, parmi ses représentants de langue française, des historiens tels que Jacques Mesnil ou Pierre Francastel.
Michela Passini, pensionnaire à l’INHA
Principales publications
Ouvrages et catalogues d’expositions
- Léopold Robert, peintre de l’Italie [conférence prononcée à la Sorbonne, le 15 janvier 1898, par Léon Rosenthal]. Paris : Bibliothèque de « La Vie moderne », 1898.
- La Peinture romantique, essai sur l’évolution de la peinture française de 1815 à 1830. Thèse présentée pour le doctorat à la faculté des lettres de l’université de Paris par Léon Rosenthal. Paris : L.-H. May, 1900.
- De Sculptura, quatenus animi sensus describere possit. Thesim Facultati litterarum parisiensi proponebat L. Rosenthal. Dijon : F. Rey, 1900.
- L’Évolution de la beauté en Italie du XIVe au XVIe siècle [conférence donnée à la Sorbonne pour la Société des études italiennes, le 3 mars 1900]. Paris : Bibliothèque de « La Vie moderne », 1900.
- Carpaccio, biographie critique. Collab. de Gabrielle Rosenthal. Paris : H. Laurens, 1907.
- La Gravure. Paris : H. Laurens, 1909.
- Du romantisme au réalisme, essai sur l’évolution de la peinture en France de 1830 à 1848. Paris : H. Laurens, 1914 ; rééd. Paris : Macula, 1987.
- Alsace-Lorraine. Comité de propagande socialiste pour la défense nationale. Paris : Librairie de « l’Humanité », 1916.
- Le Martyre et la Gloire de l’art français, une initiation artistique. Paris : Delagrave, 1916.
- Un plan d’expansion artistique. La Maison française à l’étranger. Paris : P.-M. Delesalle, 1917.
- Villes et Villages français après la guerre : aménagement, restauration, embellissement, extension. Préface de Louis Bonnier. Paris : Payot, 1918.
- Manet, aquafortiste et lithographe. Paris : Le Goupy, 1925.
- L’Art et les Artistes étudiés devant les œuvres. Visites artistiques. Paris et région parisienne. Paris : Delagrave, 1927.
- Exposition de peintures, sculptures et dessins de Gustave Penzyna [catalogue de l’exposition], Paris,Galerie la Boétie, 13 au 16 octobre 1927. Collab. de Edmond Villaret et Albert Mary. Paris : impr. de C. Poussereau, 1927.
- La Verrerie française, depuis cinquante ans. Paris et Bruxelles : G. Van Oest, 1927.
- Florilège des musées du Palais des arts de Lyon. Dir. Paris : A. Morancé, 1928.
- Notre Musée, l’art expliqué par les œuvres à l’usage des classes de troisième, deuxième, première des lycées et collèges, conformément aux programmes du 3 juin 1925. Paris : Delagrave, 1928.
- L’Art et les Artistes romantiques. Paris : Le Goupil, 1928.
Articles
- « Primitifs flamands et Primitifs italiens ». Mémoires de la Société bourguignonne de géographie et d’histoire, 1905, t. XXI, p. 153-192.
- « Du romantisme au réalisme : les conditions sociales de la peinture sous la monarchie de Juillet ». Gazette des Beaux-Arts, 1910, no 3, t. III, p. 93-114 et 217-241, t IV, p. 332-354.
- « Pierre Brébiette, graveur français ». Gazette des Beaux-Arts, 1911, t. V, p.37-52.
- « L’Enseignement du dessin dans l’enseignement secondaire ». L’Enseignement secondaire, 15 novembre 1911, p. 12-27.
- « La Peinture monumentale sous la monarchie de Juillet ». Revue de l’art ancien et moderne, 10 octobre 1912, t. XXXII, p. 303-316.
- « Les Salons de 1912 ». Gazette des Beaux-Arts, 1912, n°8, t. VII, p. 345-370 et 450-479, t. VIII, p. 405-419.
- « La Peinture romantique sous la monarchie de Juillet ». Gazette des Beaux-Arts, 1912, n°7-8, t. VII, p. 89-112 et 225-236, t. VIII, p. 235-247.
- « Chronique de l’art social : le Salon de la Nationale ». L’Humanité, 13 avril 1912, p. 4.
- « Le Rôle sociale de l’art ». L’Humanité, 29 janvier 1913, p. 4.
- « L’Art social d’après un livre récent ». L’Humanité, 11 février 1913, p. 4.
- « Mort de M. Roger Marx ». L’Humanité, 14 décembre 1913, p. 4.
- « Roger Marx ». L’Humanité, 23 décembre 1913, p. 4.
- « La Genèse du réalisme avant 1848 ». Gazette des Beaux-Arts, 1913, n°10, t. X, p. 169-190 et 302-326.
- « Manet et l’Espagne ». Gazette des Beaux-Arts, 1925, n°12, t. XII, p. 203-214.
- « La Renaissance de la verrière française au XIXe siècle ». Gazette des Beaux-Arts, 1927, n°15, t. XV, p. 51-64.
- « Un buste inédit par Chinard ». Gazette des Beaux-Arts, 1928, n°17, t. XVII, p. 253.
- « Les Préludes du romantisme dans l’art ». Revue de l’université de Lyon, 1928, t. II, p. 180-187.
- « Préface ». In A. Declairieux, Puvis de Chavannes et ses Œuvres. Trois conférences accompagnées de 48 illustrations. Lyon : Société anonyme de l’imprimerie A. Rey, 1928, (2 p., s. p.).
- « L’Art italien du XVIIIe siècle, à propos d’une exposition récente ». Gazette des Beaux-Arts, 1930, n°3, t. III, p. 18-45.
Bibliographie critique sélective
- Marrinan Michael. – « Introduction ». In Léon Rosenthal, Du romantisme au réalisme, essai sur l’évolution de la peinture en France de 1830 à 1848. Paris : Macula, 1987.
- Rabinow Paul. – French Modern : norms and forms of the social environment. Cambridge Mass., Londres : MIT Press, 1989, p. 274-276.
- Jourjon P. – Léon Rosenthal. Mémoire de l’École du Louvre, 2005.
- Passini Michaela. – Il nazionalismo e le origini della storia dell’arte. Francia e Germania 1870-1933. Thèse de doctorat, Scuola Normale Superiore de Pise, 2008, p. 205-211.
- Liverman Astrid M. B. – « Art nouveau et Art social. L’habitation parisienne à bon marché 1894-1914 ». In Meneux Catherine, dir., Regards de critiques d’art. Autour de Roger Marx (1859-1913). Rennes : Presses universitaires de Rennes- INHA, 2008, p. 193.
- Therrien Lyne. – L’Histoire de l’art en France : genèse d’une discipline universitaire. Paris : éd. du CTHS (« CTHS format »), 1998, annexe VII, p. 529-537.
Sources identifiées
Lyon, archives municipales
- Documents de travail de Rosenthal en conservateur du musée des Beaux-Arts de Lyon (correspondances diverses, notes de travail, inventaires d’œuvres, documents concernant les achats pour le musée et les dons, l’entretien du batiment et des collections) : cotes 524 W 868, 1400 WP 001 – 1400 WP 009 et 1400 WP 0012
Paris, bibliothèque de l’INHA- collections Jacques-Doucet, fonds Roger Marx
- Lettres de Léon Rosenthal à Roger Marx (en cours de traitement)
En complément : Voir la notice dans AGORHA