Félix Nadar, Théophile Thoré-Bürger, critique d'art français (1807-1869), entre 1854 et 1860, Paris, musée d'Orsay, © RMN / Hervé Lewandowski. Photographie, épreuve sur papier albuminé, 20,4 x 14,3 cm.

Auteur(s) de la notice : JOWELL Frances Suzman

Profession ou activité principale

Critique d’art, historien de l’art, journaliste politique, homme de lettres

Autres activités
Avocat, substitut du procureur du roi (pendant une courte période), activiste politique, directeur de maison de vente, marchand d’art, rédacteur de catalogues de ventes, collectionneur et conseiller auprès de collectionneurs

Sujets d’étude
Art européen depuis la Renaissance (surtout l’école hollandaise du XVIIe siècle, les écoles flamande, allemande, espagnole, anglaise, française) ; marché de l’art, histoire politique, phrénologie, auteur de critiques et de catalogues de galeries d’art, privées et publiques

Carrière
Études au prytanée militaire de la Flèche
24 août 1825 : diplôme de bachelier ès lettres (Académie d’Angers)
23 juin 1827 : diplôme de licence en droit (Académie de Poitiers)
12 mars 1828 : avocat au tribunal d’Angers
1829 : arrivée à Paris, pour une carrière au barreau
1830 : participe aux Trois Glorieuses
Août 1830 : nommé substitut du procureur du roi près le tribunal civil de La Flèche
Milieu 1832 : abandonne le droit pour une carrière de journaliste et critique d’art à Paris
1839 : membre fondateur de la Société des gens de lettres
1839 : tentatives de fonder un quotidien, La Démocratie
1840 : publication du pamphlet La Vérité sur le Parti démocratique
1841 : procès et emprisonnement à Sainte-Pélagie
1842 : fonde (avec Paul Lacroix) l’Alliance des Arts
1844-1848 : travaille comme critique d’art au journal Le Constitutionnel
1848 : soutient la Révolution ; refuse le poste de directeur des Beaux-Arts, préférant se consacrer à la politique
26 mars 1848 : fonde le quotidien La Vraie République dont le rédacteur en chef devient connu sous le nom du « citoyen Thoré » (ses collaborateurs sont George Sand, Pierre Leroux et Barbès) ; implication dans les journées de juin ; suspension de la publication de La Vraie République ; bref exil en Angleterre
1848-1849 : se présente aux élections, sans succès
29 mars 1849 : reparution du Journal de la Vraie République (« Sans la Révolution sociale, il n’y a pas de vraie république »)
13 juin 1849 : instigateur d’une manifestation contre le gouvernement : bureaux de la rédaction de son journal sont saccagés
15 novembre 1849 : condamnation à l’exil par la Haute Cour de Versailles
1849-1854 : réfugié politique en Suisse, Angleterre et Belgique ; publication de divers pamphlets politiques
1855 : parution des premiers articles signés « W. Bürger » dans la toute nouvelle Revue universelle des arts
1856 : visite la Hollande et commence ses recherches sur Rembrandt et l’école hollandaise du XVIIe siècle
1857 : assiste au vernissage de l’exposition Trésors d’Angleterre, à Manchester ; il en publie une longue critique dans Le Siècle
1858 -1859 : publication de textes sur des collections privées et publiques en Belgique, en Angleterre et en Hollande
1859 : amnistié
1860-1869 : retour à Paris ; poursuit ses recherches en histoire de l’art ; s’implique dans des ventes d’art importantes ; activité de collectionneur et de conseiller pour des collectionneurs ; écrit des revues pour les Salons annuels et les expositions internationales

Étude critique

Du « citoyen Thoré »…
Dès ses débuts de critique et de journaliste dans le Paris des années 1830, Étienne-Joseph Théophile Thoré s’intéressa à l’art ancien. Cependant, ses écrits les plus importants en la matière datent de 1855, période où il écrivait sous le pseudonyme de « W. Bürger » et où il s’intéressa à l’art européen à partir de la Renaissance, se lançant notamment dans des analyses tout à fait novatrices de l’école hollandaise du XVIIe siècle. Il se consacra aussi à bien d’autres styles artistiques. Ses recherches et ses écrits les plus fameux traitèrent, entre autres, des écoles française, espagnole et anglaise.

Tout au long de sa carrière, Thoré – alias Bürger – fut un auteur engagé, s’intéressant à l’art de son époque, mais aussi à la politique, où il se situait du côté des radicaux, ce qui affecta de manière profonde sa vie et son travail, jusqu’à provoquer une rupture décisive dans sa carrière. C’est pourquoi son activité dans le domaine de l’histoire de l’art doit être replacée dans le contexte de ses convictions politiques et de ses écrits critiques souvent polémiques. Enfin, les conclusions auxquelles parvint W. Bürger à la fin de sa carrière ne peuvent être comprises sans prendre en considération les idées du Thoré des premières années.

Actif dans les cercles artistiques, politiques et littéraires parisiens à partir de 1834, Thoré fit paraître ses premiers articles dans des journaux républicains de gauche comme la Revue républicaine, le Journal des travaux publics, le Journal du peuple, Le Réformateur, la Revue du progrès, mais aussi dans des publications moins politisées, comme L’Artiste, Le Siècle et la Revue de Paris.

Sa décision de se consacrer à la critique d’art impliquait qu’il étudiât l’art du passé. En effet, il avait fait sien le précepte saint-simonien selon lequel la destinée de l’humanité était révélée par ses étapes antérieures. Les premières analyses que Thoré consacra à l’histoire de l’art avaient pour but de démontrer comment l’art, à chaque époque, exprimait les grandes idées de son temps et avait progressivement amené à l’art et à la société du XIXe siècle. Thoré élabora, au fur et à mesure, tout un idiome critique et un ensemble de critères esthétiques et artistiques, mais ses écrits sur l’art recouraient également à des idées et à des termes empruntés à sa pensée politique et sociale.

Toute sa vie durant, Thoré resta persuadé que l’avenir serait régi par des valeurs universelles, partagées par tous les hommes et fondées sur la solidarité sociale et la communion avec la nature. Il s’inspira beaucoup des idées et des principes exposés dans L’Humanité, l’ouvrage majeur de Pierre Leroux qui fondait l’évangélisme socialiste. Thoré en tira même, un peu plus tard, sa devise, « L’art pour l’homme ». Il l’utilisa en maintes occasions, mais elle recouvrait surtout l’idée que l’art, en tant qu’expérience collective, aidait l’humanité à construire un futur fraternel, en montrant la voie vers l’unité et l’harmonie. Thoré considérait qu’en tant que critique d’art il endossait un rôle de prophète, et qu’à ce titre il se devait de montrer, à travers les étapes de l’art du passé, la progression vers l’art contemporain et futur. Tout au long de sa vie, il chercha à défendre cet idéal.

C’est pourquoi il commença à étudier des œuvres d’art appartenant à des collections publiques et privées, mais aussi à analyser les textes canoniques de l’histoire de l’art. Sa première étude digne de ce nom, publiée dans la Revue de Paris en 1835, fut une analyse de l’école espagnole, publiée en deux parties. Il l’avait réalisée à partir des œuvres de la collection du maréchal Soult, qui était alors la plus grande collection de tableaux espagnols à Paris. Elle traitait non seulement des tableaux que Thoré avait pu observer, mais faisait aussi l’historique de l’École espagnole, en montrant comment elle avait traduit l’évolution des idées religieuses. Thoré y parlait de Murillo, l’artiste le mieux représenté dans la collection, comme du plus grand artiste espagnol, ne tarissant pas d’éloges sur sa maîtrise du sujet, de la couleur et du clair-obscur, qui exprimait selon lui « une sorte de panthéisme sentimental, un amour infini pour toutes les manifestations de Dieu ! »

L’année suivante, il publia une Étude sur la sculpture française depuis la Renaissance, en trois livraisons. Il y étudiait la collection de la galerie d’Angoulême et y critiquait sévèrement les directeurs du Louvre pour leur négligence des principes élémentaires de l’histoire de l’art dans leur organisation de la collection du musée et leur classification des œuvres, illogique à bien des égards. Le préambule de son étude promettait au lecteur « un travail historique, clair et lumineux sur les diverses transfigurations de l’art », afin que les jeunes artistes pussent voir en chaque œuvre « les liens qui la rattachent aux autres et les germes qu’elle contient ».

L’inquiétude de Thoré vis-à-vis du caractère national et du fonctionnement politique de l’école artistique française, et les accusations qu’il portait à l’encontre des administrateurs du Louvre – en particulier concernant leur indifférence à la logique historique dans leur gestion des œuvres – se firent de plus en plus explicitement politiques. « La généalogie des maîtres est donc absolument nécessaire à l’intelligence véritable de l’art », répétait-il à l’envi, affirmant aussi que pour que l’héritage artistique national se réalise pleinement, il était nécessaire qu’il s’exprimât à travers un projet social et politique commun à tout le peuple français. Il apparaissait donc évident pour lui que le refus des responsables du musée de montrer, à travers les collections nationales, le progrès de l’art était la preuve d’une tendance politique réactionnaire, chez eux et chez le gouvernement qui les dirigeait.

Les articles que Thoré écrivit sur Winckelmann et Vasari montrent son grand intérêt pour l’historiographie de l’art. Il fit l’éloge de la traduction de Vasari par Jeanron, qui fut l’occasion pour lui de dénoncer le manque de connaissances historiques de la plupart des critiques d’art, de même que le nombre réduit de traductions en français d’ouvrages d’histoire de l’art. La lecture de ses descriptions de galeries particulières (comme celles d’Aguado ou de Grégoire) ou de la nouvelle Galerie espagnole permet de voir à quel point son œil s’affinait avec le temps.

Dans ses écrits sur l’art contemporain, Thoré amena les débats artistiques de l’époque sur le terrain de la politique, qu’il traitât du sujet, du style, de la technique ou de la généalogie des œuvres. Toutefois, il s’impliqua dans les débats politiques républicains de façon de plus en plus explicite, voire risquée, comme en témoignent ses efforts surhumains pour fonder un journal d’opinion radical, Démocratie, dont la vocation devait être « de continuer le mouvement social et politique de la Révolution française ; d’élaborer et de propager, en vue du présent et de l’avenir, les réformes radicales qu’exige le XIXe siècle ». Lorsqu’il publia, en 1840, un tract intitulé « La vérité sur le parti démocratique », on lui fit un procès suite auquel il dut s’acquitter d’une amende et passer une année en détention à Sainte-Pélagie, en 1841.

Peu après sa sortie de prison, il se lança dans une nouvelle entreprise qui devait satisfaire sa soif de connaissances de l’art ancien : il fonda, avec Paul Lacroix, en 1842, l’Alliance des Arts, « une agence centrale pour l’expertise, la vente, l’achat et l’échange des bibliothèques, galeries de tableaux et collections d’art ». Lacroix, alias « le bibliophile Jacob », s’occupait des bibliothèques, tandis que Thoré se chargeait de l’organisation des ventes d’art. Il alla ainsi visiter des collections en France, en Belgique, en Hollande, en Allemagne et en Suisse, à la recherche d’œuvres à mettre aux enchères, compila des catalogues de vente très complets et établit des descriptifs de collections privées. Sa nouvelle fonction l’amena à s’intéresser aux questions d’attribution, de provenance et d’authenticité des œuvres, en somme, en connoisseurship.

Le Bulletin de l’Alliance des Arts, parution mensuelle, faisait la somme des ventes de toiles de maîtres, des publications d’ouvrages d’histoire de l’art, exposait les pratiques et le fonctionnement des musées, les méthodes de catalogage et d’autres aspects du marché de l’art. Thoré, privilégiant comme toujours l’aspect historique, remplaça l’ordre alphabétique traditionnellement utilisé par un système de classement chronologique et géographique. Il expliquait d’ailleurs : « Nous pensons qu’on suit bien mieux le développement de l’art en passant ainsi d’un maître à ceux qu’il a engendrés. »

À partir de 1846, Thoré mit peu à peu fin à sa participation à l’Alliance des Arts, à cause des difficultés financières que rencontrait le projet, mais aussi parce qu’il prenait de plus en plus de responsabilités en qualité de critique d’art du journal Le Constitutionnel. Ses critiques ainsi que tous ses autres textes furent publiés dans ce journal, ainsi que dans d’autres revues et journaux. Les Salons, critiques très complètes que Thoré écrivit tous les ans entre 1844 à 1847, furent également publiés à part par l’Alliance des Arts.

Dans ses textes, Thoré se mit à faire de plus en plus fréquemment référence à l’art ancien pour étayer ses prises de position, citant des faits historiques à l’interprétation tendencieuse, mais faisant aussi référence à des aspects techniques et stylistiques plus objectifs. Dans son Salon de 1846, il exposa son credo artistique, qui remplaça peu à peu tous ses autres critères, politiques ou didactiques : « Nous croyons que tout le monde est d’accord avec nous sur le triple principe des arts, que nous faisons souvent apparaître dans notre critique, à savoir : l’étude de la nature, l’étude de la tradition ou des anciens maîtres, et l’inspiration personnelle de l’artiste. Ces trois éléments sont également indispensables : le premier conduit à la réalité, le second à la science ou l’adresse, le troisième à la poésie. On peut s’égarer soit en copiant la nature sans idéal, soit en écoutant le poésie sans écouter la nature, soit en imitant les vieux maîtres sans consulter ses propres impressions. »

Selon lui, la connaissance des « vieux maîtres » était essentielle pour saisir les aspects plus techniques de l’art – le langage de la peinture, tel qu’il avait été élaboré à travers les siècles. À propos de Léopold Robert, il écrivait ainsi, dans un article de 1843 : « La peinture a aussi sa langue, c’est-à-dire ses moyens d’expressions, perfectionnés par les efforts successifs des grands hommes de la tradition, et c’est la partie technique de l’art. »

Il évoquait les différentes inventions picturales « des grands hommes de la tradition » – comme par exemple la recherche chromatique chez le Corrège, Vélasquez ou Watteau, ou bien la capacité des artistes hollandais du XVIIe siècle à varier la touche (Salon de 1846), ou encore la luminosité et la manière de peindre les ombres sans jamais recourir au noir de Claude Lorrain, du Corrège, de Titien et de Rubens (Salon de 1847). Ses arguments pour défendre l’utilisation expressionniste de couleurs vives et du clair-obscur par Delacroix reposaient sur l’idée que l’artiste devait être rattaché à toute une tradition de peinture. À l’inverse, il critiquait l’approche sculpturale qu’avait Ingres de la ligne, arguant qu’il laissait ainsi de côté ce qui faisait la spécificité du langage pictural : Delacroix était donc un artiste progressiste, tandis qu’Ingres apparaissait comme réactionnaire.

Outre sa manière de politiser la controverse entre la ligne et la couleur, Thoré s’élevait régulièrement contre l’influence de l’art italien du classicisme et de la Renaissance, au prétexte qu’elle avait perverti ce qui faisait l’originalité de l’art français. C’est ainsi que le chef-d’œuvre de Géricault, le Radeau de la Méduse, véritable icône de l’art français, n’avait pu être peint que parce que l’artiste avait quitté l’Italie décadente pour rentrer dans la mère patrie. Thoré faisait l’éloge d’autres artistes qui avaient délaissé le traditionnel séjour en Italie, comme Delacroix, qui faisait pour lui figure de héros, ou bien Rousseau et d’autres artistes paysagistes appartenant à l’école de Barbizon dans les années 1830.

Ses critiques de l’Académie de France à Rome étaient en partie le résultat de son opposition au régime politique de l’époque. À partir de 1848, cependant, il eut surtout recours à des arguments ayant trait à l’histoire de l’art, exprimés de manière véhémente : « Si, par hasard, il ressortait de l’histoire que les grandes époques d’art dans tous les pays sont demeurées nationales et n’ont point subi l’influence italienne ; que les plus grands peintres de tous les temps et de tous les pays sont justement ceux qui n’ont jamais été en Italie, ou, du moins, n’y ont pas formé leur talent ; que l’imitation de l’Italie a toujours été funeste à toutes les écoles étrangères et qu’elle a tué partout l’inspiration originale, le sentiment poétique, le style individuel, le génie, tout ce qui est en l’art dans son essence ; que l’art français, en particulier, s’est perverti en Italie ; si l’histoire nous démontrait enfin que tous les peintres immortels des autres états d’Europe ne précèdent point de l’art italien, mais qu’au contraire, l’Italie est responsable de toutes les décadences de l’art dans la vie de tous les peuples, n’est-ce pas que l’institution d’une école française à Rome serait condamnée et qu’il faudrait aviser à ressusciter une école française en France, à Paris ? »

Tandis que l’Italie, dans le récit que faisait Thoré de la splendeur et de la décadence des écoles d’art européennes, faisait figure d’ennemi, les « petits maîtres » des Pays-Bas étaient présentés comme les héros qui avaient vaillamment résisté à cette domination italienne. Les écoles hollandaise et flamande n’étaient alors pas véritablement distinguées, ni par Thoré, ni par aucun des auteurs faisant l’éloge de l’art des Pays-Bas, pas même par Charles Blanc ou par Arsène Houssaye, qui publia une Histoire de la peinture flamande et hollandaise en 1847.

L’évolution des critères de jugement de Thoré l’amena à se concentrer sur les petits maîtres, et à ne plus seulement prendre en considération le sujet de l’œuvre, mais l’image elle-même comme fondement de son sens et de ses qualités esthétiques. Exprimant sa conviction que « le sujet importe peu en art », Thoré remettait en cause la hiérarchie traditionnelle des genres picturaux, et donnait davantage d’importance aux genres dits mineurs. De même, afin de convaincre les artistes de son temps d’exprimer leurs sentiments à travers des sujets moins nobles, il se mit à invoquer comme précédent les petits maîtres des écoles du Nord.

Dans ses passages sur Le Buisson mélancolique et La Tempête, deux œuvres de Ruysdael conservées au Louvre, il analysait la manière dont leur expressivité pleine de poésie était construite, comparant la solitude un peu lasse du Buisson au Penseur de Michel-Ange, et décrivant La Tempête comme une lutte tragique pour la vie, tout aussi noble que les plus grandes scènes de batailles historiques. Il suggérait également que les figures paysannes, populaires et pleines de vie, de Brouwer et Craesbeck étaient aussi intéressantes que les personnages peints par Raphaël.

Afin d’illustrer la valeur des sujets « tout simple[s] et tout naturel[s] », Thoré n’eut de cesse d’utiliser des exemples hollandais. Dans son étude de la collection Morny, en 1847, il décrit un intérieur rustique peint par Ostade, dans lequel une femme porte un enfant, un vieux paysan coupe du pain, et deux petits garçons « font n’importe quoi », et ajoute : « Le sujet ne signifie rien, et l’on est fort embarrassé de décrire ces compositions ingénues, qui n’ont de caractère décidé que dans la qualité d’exécution. »

Mais la question de ce qu’était « la qualité d’exécution » était elle-même controversée, et la simplicité du sujet ne pouvait à elle seule compenser ce que Thoré abhorrait – un sens excessif du détail, et un fini trop parfait du tableau –, que ce soit dans les tableaux animaliers de Brascassat, peintre contemporain qu’il détestait, ou chez Ommeganck, artiste du XVIIe siècle qu’il appelait « le plus froid et le plus mesquin des peintres d’animaux ». Comme nous le verrons, ce point de vue contribua à la fortune (et l’infortune) critique des fijnschilders de l’école hollandaise.

… à « W. Bürger »

La Révolution de 1848 provoqua une rupture nette dans son travail de critique d’art, qu’il fût ancien ou contemporain. Thoré acheva abruptement son Salon de 1848, le concluant par les mots suivants : « Nous faisons aujourd’hui mieux que de l’art et de la poésie : nous faisons de l’histoire vivante », puis se jeta à corps perdu dans la révolution. Mais son activisme politique ne fut que bien mal récompensé par « l’histoire vivante », puisqu’il devint, pendant dix ans, un fugitif contraint à l’exil. Lorsqu’il délaissa enfin l’activité de pamphlétaire, en 1855, et reprit sa plume de critique d’art, il n’était plus « le citoyen Thoré », mais avait pris le nom de « W. Bürger », pseudonyme qui lui permit de publier ses textes, encore censurés en France. Ce fut donc en tant que W. Bürger que son travail d’historien de l’art accéda à la notoriété. Il conserva ce nom de guerre à son retour en France, et jusqu’à sa mort, en 1869, et fut alors connu sous le nom de Thoré-Bürger.

W. Bürger, déçu du républicanisme, commença par se consacrer à une nouvelle histoire de l’art universelle : « Une histoire générale de l’art semble être dans les tendances et les nécessités de la civilisation moderne… Cette histoire universelle de l’art, comment la faire, sinon en récoltant des faits, des dates, des particularités de toute sorte. » Afin de bâtir ce projet d’une nouvelle histoire de l’art, Bürger publia plusieurs études très complètes dans une revue belge, la Revue universelle des arts (fondée en 1855 par Paul Lacroix), dans L’Artiste, la Revue germanique et la Gazette des Beaux-Arts (fondée en 1859 par Charles Blanc). Plusieurs de ces articles étaient consacrés à Rembrandt, tandis que d’autres décrivaient des collections belges, anglaises ou néerlandaises. Il fit également paraître des errata corrigeant la version révisée des catalogues des collections de peintures flamandes, allemandes et hollandaises du Louvre, provoquant la consternation de Frédéric Villot qui, un rien agacé, écrivait : « M. Bürger est-il français ou allemand ? Habite-t-il Paris, et y est-il maintenant ? »

Cependant, l’identité du mystérieux W. Bürger ne faisait pas de doute pour d’autres lecteurs français, dont Théodore Rousseau, si l’on doit en croire la description que fit Sensier de sa réaction au premier article que Bürger fit paraître au sujet de la grande exposition Trésors d’art, à Manchester en 1857 : « Il vit, me dit-il, et son œil se baissa comme surpris par un choc d’émotions. Il faut dire à Emile Diaz qui se rend en Angleterre de nous en donner des nouvelles, qu’il le cherche et qu’il nous parle de lui. »

Cette critique d’exposition, écrite par Bürger et parue dans Le Siècle, puis dans d’autres recueils, montrait l’étendue de son autorité sur l’ensemble des écoles de peinture. Bürger y faisait des descriptions vivantes de tableaux, y donnait les conclusions de ses dernières recherches documentaires et y discutait de la fortune critique, méritée ou non, de tel ou tel artiste, ainsi que de la gloire et de la décadence des écoles de divers pays. Ses propos, enthousiastes et très bien informés sur l’art allemand, flamand, espagnol et anglais (ce dernier alors très peu connu en France), se faisaient un peu moins élogieux pour évoquer l’école française, mais s’attardaient sur l’école hollandaise, « celle qui brille le plus à Manchester ». Il défendait son approche dans sa préface au catalogue de la collection Suermondt : « Un catalogue, si parfait qu’il soit, n’est qu’une sorte d’inventaire numérique et ne donne qu’une idée très imparfaite de la qualité des tableaux, de la valeur qu’ils ont dans l’œuvre d’un maître et de leur signification relative dans l’histoire de l’art. À notre avis, tout catalogue qui a pour but de populariser une galerie doit être accompagné d’une revue générale où le sentiment artiste intervient à son tour, s’empare des créations les plus dignes d’enthousiasme, les met hors ligne et dans leur vrai jour, les interprète et les glorifie. » Bürger suit sans hésiter cette méthode dans ses descriptions des collections Suermondt (à Aix-la-Chapelle) et d’Arenberg (à Bruxelles), mais aussi et surtout dans les différents volumes de son ouvrage Musées de la Hollande. Dans tous ces textes, il fait davantage que rassembler « des faits, des dates, des particularités de toute sorte », car il fait voir bien des œuvres « sous leur vrai jour », comme par exemple, Le Chardonneret, peint par Fabritius, inconnu alors, ou bien les œuvres de Frans Hals, très décrié à l’époque. Il est davantage célèbre pour avoir fait connaître ses premières révélations sur Vermeer, alors peu connu.

Musées de la Hollande (1858, 1860) est un ouvrage crucial : il surpasse non seulement en qualité tous les guides précédemment parus sur les collections de peinture hollandaise, mais il ouvre un nouveau chapitre dans l’historiographie de l’art hollandais. Destiné aux chercheurs, aux collectionneurs et aux artistes, l’ouvrage témoigne d’une étude approfondie de cette école de peinture, qui n’avait suscité jusqu’alors que peu de publications, et son propos est informé par une vision partisane de l’histoire de l’art, une compréhension très subtile des techniques picturales, et, enfin, par des goûts personnels en matière de style. Bürger commence avec Rembrandt, présenté comme un grand artiste naturaliste, visionnaire dont l’autorité et l’influence rayonnèrent dans l’art hollandais de tout le XVIIe siècle. Rembrandt incarne l’école hollandaise, et devient ainsi l’aune à laquelle mesurer tous les autres artistes : c’est pourquoi tous sont étudiés à sa suite, classés selon leur spécialité.

Pour chaque toile, Bürger cherche à cerner le sujet, l’école, la technique employée, de même qu’à vérifier avec autant de certitude que possible la signature, les dates et les dimensions, mais il s’intéressait surtout à la place qu’elle occupait dans l’œuvre de l’artiste, souvent en la comparant à d’autres œuvres visibles dans d’autres collections. Il rend son exposé plus vivant grâce à des digressions sur la provenance et la fortune critique des œuvres, des anecdotes au sujet de conservateurs qui avaient été obligeants avec lui, et des querelles avec d’autres auteurs d’écrits d’art – morts ou vivants. Il a recours à des historiens faisant autorité, comme John Smith, Gustav Waagen, ou encore l’archiviste P. Scheltema, mais ne cesse de déplorer le peu d’informations fiables sur les grands maîtres hollandais qu’il essaye, dans l’ouvrage, de tirer des limbes de l’histoire de l’art.

En 1860, le travail de Bürger fut remarqué par le directeur du musée de Berlin, Gustav Waagen, qui écrivit dans sa version remaniée du Guide de la peinture – écoles allemande, flamande et hollandaise de Kugler : « Notre époque a trouvé un nouveau chercheur, fort zélé, en la personne de M. W. Bürger, un gentleman français qui, grâce à son étude détaillée des tableaux, et des autographes et inscriptions y figurant, grâce à son jugement artistique très sûr, exposé dans ses écrits très variés, a contribué à poser les fondements d’une histoire de cette prestigieuse école de peinture, qui, entre toutes mérite la première place. »

Un autre lecteur de Thoré, qui n’était autre que son compagnon d’exil, Pierre-Joseph Proudhon, louait sa probité de positiviste et voyait en la manière qu’avait Thoré de défendre l’art hollandais un substitut de combat politique. Il citait avec enthousiasme la description faite par Bürger du lien de cause à effet entre l’apparition d’une école hollandaise originale au XVIIe siècle et la liberté durement acquise dans les domaines politique et religieux par les citoyens de ce pays – dont l’indépendance et l’énergie avaient aussi eu une importance indéniable. Ils avaient non seulement créé la terre sur laquelle ils vivaient, mais ils avaient aussi, « par un élan spontané du génie national », recréé de toutes pièces leur société, leur univers moral et intellectuel, et produit ainsi un art complètement neuf, le naturalisme. Au lieu de glorifier les puissants, leur art était au service de la nation tout entière, de l’humanité même, et dépeignait « la vie vivante », c’est-à-dire tous les aspects de la vie et de la nature tels qu’on pouvait les observer et les vivre, donnant à voir de manière alerte la Hollande et sa société, à travers des images toutes très imprégnées du caractère de chaque artiste. Pour Proudhon, cela devrait servir d’exemple à la France de l’époque.

Certaines de ces idées n’avaient rien de nouveau. La mise en relation du contexte géographique et de la société protestante avait déjà été effectuée par Hegel, et la confusion entre écoles hollandaise et flamande avait été dénoncée et définie comme « une hérésie historique et artistique » par le critique hollandais Tobias van Westrheene. Mais Bürger les vulgarisa, mettant davantage en évidence les différences en matière politique et artistique entre artistes hollandais et flamands, et liant l’affranchissement vis-à-vis du mécénat impérial et papal à la liberté artistique des peintres. C’est ainsi que Rubens « était chez des vaincus et des esclaves ; Rembrandt, chez des vainqueurs et des hommes libres ». Rembrandt et son école étaient donc libres d’étudier l’homme de manière tout à fait désintéressée. « L’art hollandais, avec son “naturalisme”, comme on se plaît à dire, est donc unique dans l’Europe moderne… L’art de Rembrandt et des Hollandais, c’est tout simplement l’art pour l’homme. »

Dans le second volume dans son étude, Bürger démontra à nouveau le rôle historique de l’art hollandais, cette fois en comparant et opposant point par point Raphaël et Rembrandt, le premier incarnant l’apothéose d’un idéal artistique passé, le second la source d’un nouveau principe, celui de peindre ce que l’on voit et ce que l’on sent, afin de créer un art nouveau pour une société nouvelle. Rembrandt devient alors l’ancêtre légitime de l’art moderne – l’art du futur.

Les Provinces Unies ainsi « renouvelées par la liberté » apparaissant comme la source d’inspiration du naturalisme hollandais, il n’est pas surprenant que Bürger fasse sortir certains artistes du canon de l’art hollandais authentique qu’il avait élaboré. Sur un ton rappelant celui du jeune Thoré, il fustigea la vogue des artistes d’inspiration italienne, qui avaient abandonné leur pays d’origine pour un art où le paganisme, tout aussi dépassé que la religion, étouffait la tradition nationale. Nicolas Berchem, Jan Both et « les affiliés à la Bande académique de Rome » sacrifiaient leur individualité, la marque même de l’authenticité hollandaise, au profit d’un pastiche stérile. Ainsi, Berchem avait peut-être, d’une certaine manière, étoffé son style en Italie, mais il était devenu « un maître falsifié par un mélange étranger ». Il méprisait, chez des artistes comme Gerard de Lairesse et Adriaen van der Werff, leur dépendance envers le mécénat princier, leur succès peu mérité et leur peinture mythologique, jolie et principalement décorative, les considérant comme autant d’aberrations marquant la décadence et le déclin de l’héroïque école hollandaise.

Il marginalisa d’autres artistes autrefois populaires – comme Dou, que les écrits de Bürger contribuèrent à plonger dans l’oubli. Le naturalisme tel que le définit Bürger ne reposait pas simplement sur la vraisemblance, mais sur l’effort de l’artiste pour représenter au mieux la vie autour de lui. C’est pourquoi le processus artistique et les moyens d’expression comptaient autant que le sujet ; Bürger donnait d’ailleurs beaucoup d’importance à la spontanéité avec laquelle l’artiste élaborait sa réaction à son sujet. Il avait beaucoup de défiance envers le fini très soigné, le sens du détail et la virtuosité dont faisaient montre les fijnschilders, et qui pour lui montraient qu’ils n’avaient ni la spontanéité ni la sincérité de l’art véritable.

Bürger était persuadé que ses verdicts en matière d’histoire de l’art seraient confirmés par la postérité, et il avait raison, puisque ses jugements firent autorité pendant plusieurs décennies. Les peintres qu’il avait écartés du canon restèrent généralement dans l’obscurité – peu appréciées, peu étudiées, leurs œuvres furent cantonnées aux réserves des musées et leur cote se déprécia. Ce canon élaboré par Bürger influença les générations suivantes d’historiens de l’art, comme Wilhelm von Bode, qui raconta que lorsqu’il était jeune, il visita la Hollande avec sous le bras son exemplaire de Musées de Hollande, qu’il connaissait « presque par cœur ». De même, les ouvrages magistraux qu’écrivit Willem Martin sur l’art hollandais reflétaient une vision de l’école hollandaise fidèle à celle exposée par Bürger. La mauvaise fortune critique des artistes que ce dernier avait ostracisé ne prit fin qu’assez récemment, à partir des années 1960, grâce à des expositions et à de nouvelles études qui proposaient une approche alternative et les inséraient dans une vision pluraliste et plus ouverte du XVIIe siècle, grâce à une approche iconographique plus diversifiée.

Mais si les artistes que Bürger avait bannis ont fini par revenir en grâce, ceux qu’il avait rendus célèbres le sont restés. C’est le cas de Frans Hals, qui avait de longue date joui d’une grande notoriété, mais aussi et surtout de Johannes Vermeer, qui était quant à lui pratiquement inconnu avant Bürger.

Les textes antérieurs avaient décrit Hals comme un artiste talentueux, mais alcoolique et peu soigneux, qui ne se donnait pas toujours la peine d’achever ses œuvres. Bürger commença à donner de lui une tout autre image dès 1857, dans un premier texte qui évoquait avec enthousiasme la liberté et la spontanéité avec lesquelles Hals travaillait, ainsi que son souci d’immédiateté dans la représentation. On ne trouvait pas, dans ses descriptions de la virtuosité et de la touche audacieuse, voire impétueuse, de l’artiste, la moindre des réserves ou le moindre des commentaires désobligeants que l’on pouvait lire dans les critiques antérieures de l’artiste. Bürger, au contraire, n’avait pas de mots assez élogieux pour recommander l’étude des œuvres de Hals aux peintres de son époque. L’étude très novatrice qu’il publia en 1868 faisait la synthèse de toutes les données disponibles sur l’artiste. Bürger y racontait la longue carrière de l’artiste, de ses débuts brillants jusqu’à la furie créatrice animant les œuvres de la maturité. Il recensait toutes les œuvres qu’il avait pu localiser (ou qu’il avait vendues) dans les collections européennes, en prenant en compte toutes les archives disponibles. Il laissait de côté les anecdotes au sujet de la vie dissolue de Hals, qu’il considérait comme calomnieuses, et faisait de Hals un homme respectable, bien que fort enclin à l’amusement. En outre, Bürger provoqua un changement décisif en élevant Hals au rang de pionnier de la première génération d’artistes de la jeune République, et de « véritable précurseur de Rembrandt », établissant avec ce dernier une comparaison très favorable à Hals. Son intervention fut cruciale, puisque dix années auparavant, dans le livret accompagnant l’Histoire de Blanc, Hals était placé dans la catégorie des peintres flamands ; ce fut Bürger qui lui donna une place d’importance dans l’école hollandaise.

Le tour de force de Bürger fut incontestablement sa redécouverte de Vermeer, qui avait jusqu’alors croupi dans une sorte d’oubli. En effet, son absence dans l’étude de Houbraken, Groote Schouburgh, avait entraîné son omission systématique dans les ouvrages qui constituaient le fondement même de l’histoire de l’art – les dictionnaires d’artistes. Les rares mentions qui étaient faites de son nom montraient de manière plus criante encore à quel point il avait été oublié. Il ne fallut que quelques années à Bürger pour le rendre à la notoriété, signant ainsi un véritable exploit. Sa première étude de Vue de Delft (La Haye, Maurithuis), parue en 1858 dans Musées de Hollande, livrait une analyse assez équivoque et plaçait Vermeer parmi les « illustres inconnus » de l’école hollandaise. L’année suivante, toutefois, dans sa description de la collection d’Arenberg, Bürger définissait Vermeer comme « un original incomparable, un inconnu de génie » et le qualifiait de « sphinx si provocant ». Il y faisait mention de cinq tableaux qu’il avait pu localiser, un sixième qu’il attribuait à Vermeer et un septième dont il annonçait qu’il s’agissait d’une découverte. C’est ainsi que Bürger commença son intrépide quête de l’œuvre peint de Vermeer, dispersé au fil du temps, explorant les collections privées et publiques à travers l’Europe avec pour guide « le document le plus précieux sur les œuvres de van der Meer », un catalogue de vente de 1696, où étaient mentionnés vingt et un tableaux de l’artiste. Le résultat de ses recherches fut exposé dans sa livraison de Musées de 1860, où la seule toile Femme en Bleu lisant une lettre (Rijkmuseum ; à l’époque, collection Van der Hoop) donna lieu à pas moins de vingt pages de commentaires enthousiastes sur l’artiste. Bürger avait réussi à localiser ou à attribuer à Vermeer deux fois plus de tableaux, et en mentionnait beaucoup d’autres comme étant « à retrouver ».

À son retour à Paris, il retrouva la trace d’autres œuvres, dans des collections moins connues ou chez les marchands d’art. La plupart des tableaux alors attribués à Vermeer passèrent entre ses mains ; il en acheta quelques-uns pour lui et aida à l’acquisition des autres par des collections privées. Il entretenait de meilleurs rapports avec les collectionneurs qu’avec les directeurs de musée – sir Charles Eastlake, par exemple, recueillit l’avis de Bürger, mais refusa en fin de compte les Vermeer qui lui étaient proposés.

Les recherches de Bürger parvinrent à leur aboutissement avec la monographie et le catalogue qu’il publia dans la Gazette des Beaux-Arts de 1866, dédié à Champfleury. Pour ces textes, il avait exploré toutes les archives et les critiques déjà existantes, afin d’esquisser une histoire de la fortune critique de Vermeer. Il avait aussi tenté de cerner l’importance de Vermeer dans l’école hollandaise, et de définir ses différents styles de peinture – certes variés, mais toujours très distincts – en mettant particulièrement l’accent sur son usage de la couleur et son don merveilleux pour rendre la lumière naturelle. Bien qu’il fût parfaitement conscient du risque de tendre à inclure un trop grand nombre de tableaux, il préféra, par optimisme, cataloguer soixante-dix œuvres environ, dont certaines étaient déjà localisées, d’autres « à retrouver » et d’autres encore « à vérifier ». Ce fut pendant cette même année 1866 qu’il permit l’organisation de la première exposition Vermeer à Paris, grâce à l’envoi de pas moins de onze tableaux à cette célèbre Exposition rétrospective. Seules quatre de ces toiles sont aujourd’hui considérées comme authentiques, mais elles attirèrent et séduisirent un public trié sur le volet, composé de critiques, d’historiens et d’artistes. C’est suite à cela que le premier Vermeer (La Dentellière) entra au Louvre, en 1870. La nouvelle génération d’historiens de l’art qui se mit à étudier Vermeer, comme Henri Havard, s’inspira des analyses révolutionnaires de Bürger, qui avaient lancé l’intérêt historique, critique et littéraire pour l’artiste, tel qu’il se poursuivit jusqu’à nos jours, sans jamais faiblir.

Le seul projet concernant l’art hollandais que Bürger ne vit jamais se réaliser fut le magnum opus qu’il avait entrepris sur la vie et l’œuvre de Rembrandt : il commença ses recherches durant sa période d’exil, et les poursuivit jusqu’à sa mort. Malgré ses espoirs répétés de publication, l’ouvrage resta inachevé lorsque Bürger disparut, à la grande déception de nombreux critiques et historiens avec qui il avait entretenu une correspondance, comme Carel Vosmaer, Charles Blanc, Paul Mantz, Louis Viardot, Marius Chaumelin, Wilhelm von Bode, et bien d’autres auteurs qui avaient recouru à ses conseils.

Peu après son retour en France, Bürger avait eu l’occasion d’expliquer son attachement profond à l’école hollandaise : « La Hollande, qui avait eu le courage de secouer tout joug religieux et politique, se sentant plus à l’aise qu’aucun autre people, enfanta l’école la plus libérée, la plus originale, la plus variée, la plus révolutionnaire, la plus naturelle et la plus humaine à la fois : c’est assurément celle qui est le plus dégagé du passé, qui adhère le plus à la nature, et qui par là signale le mieux une des tendances de l’art à venir. … C’est pourquoi, nous-même […] nous nous sommes consacré avec une passion exclusive à l’éclaircissement d’une de ces écoles, de celle qui nous semble la plus singulière et la plus instructive pour les novateurs. » (Salon de 1861. De l’avenir de l’art)

Il importe toutefois de remarquer que Bürger ne s’intéressait pas exclusivement à l’école hollandaise, et qu’il ne tirait pas, uniquement de l’art hollandais, les leçons qu’il adressait aux « novateurs ». L’un des premiers textes qu’il lut à son retour d’exil fut l’essai de Philippe Burty, Exposition de l’École française ancienne, principalement du XVIIIe siècle (1860), qui lui inspira un important article pour la Gazette des Beaux-Arts. Il y répétait sa conviction qu’il manquait à l’art français un caractère national original, à cause de « la fureur de l’imitation italienne », car « les meilleurs artistes indigènes s’étaient expatriés et dénationalisés ». Il est intéressant de noter que l’éditeur choisit de se dédouaner de cette affirmation dès la première note de bas de page ! Mais la description passionnée que faisait Bürger du travail de Watteau, Fragonard et Chardin, bien qu’elle rappelât aussi les idées exposées par Thoré dans ses premiers textes, lorsqu’il évoquait le sujet et l’exécution des œuvres, participait alors d’un courant critique visant à réévaluer l’art français du XVIIIe siècle et son influence sur les artistes français contemporains.

Charles Blanc ne s’associait pas à la critique acerbe que faisait Bürger de l’école française, mais il ne lui en confia pas moins la rédaction d’une partie de l’ouvrage portant sur l’Ecole anglaise (L’école anglaise, 1863), à savoir l’introduction et cinq des notices. Dans son article sur l’exposition Trésors (1857), Bürger avait écrit que l’école anglaise « n’existe pas encore dans l’histoire de l’art sur le continent », et Mantz affirma plus tard que Bürger avait fait découvrir l’art anglais à sa génération. Les notices qu’il rédigea sur J. M. W. Turner, John Constable et Richard Parkes Bonington pour ce tome furent d’une importance considérable, et citaient notamment de très précieux extraits de la correspondance personnelle de Delacroix au sujet de Bonington.

L’attrait que l’art espagnol avait eu, très tôt, pour Thoré, fut confirmé plus tard par l’exposition Trésors, en 1857. Cela fut particulièrement vrai pour Velázquez, auquel il donnait le titre suprême de « plus grand peintre qui ait jamais existé ». Dans les années 1860, il fit des œuvres de Velázquez, et en particulièrement de leur traitement de la lumière et de l’air, l’exemple à suivre pour les artistes modernes. En 1865, il rédigea un catalogue raisonné des œuvres de Velázquez dans les collections européennes (et dont il avait visité la plupart, s’étant rendu en Espagne l’année précédente), qu’il ajouta en appendice à la traduction qu’avait fait Brunet de Vélázquez et ses œuvres, de W. Stirling, traduction pour lequel il avait également écrit les notes. Plus tard, Justi devait faire l’éloge du « style aérien » avec lequel Thoré esquissait les remarques, toujours pleines de justesse, que lui évoquaient la vision des œuvres de l’artiste. Bürger participa aussi à la rédaction du tome « L’École espagnole » dans l’Histoire de Charles Blanc.

Bürger poursuivait ses projets et ses recherches sur plusieurs fronts. Ses travaux les plus novateurs, qui visaient à redécouvrir des œuvres inconnues, perdues ou dont l’attribution avait jusqu’alors été erronée, l’amenèrent à collaborer avec le marché de l’art, ce qui ne fut pas sans brouiller les frontières entre son rôle d’historien de l’art, d’expert, d’amateur et même de marchand d’art. Il servit de conseiller à plusieurs collectionneurs privés, comme Barendt Suermondt, Isaac Pereire, ou encore Léon Double, et il participa en 1866 à l’organisation de la grande Exposition Rétrospective de Vermeer. « Les collections particulières », texte très riche et intéressant qu’il écrivit pour le Paris Guide de 1867, est la preuve de sa connaissance de toute une variété de peintres anciens dont les œuvres se trouvaient à l’époque à Paris – alors le centre du marché de l’art européen. Il y faisait figurer sa propre collection, relativement modeste, composée des nombreuses œuvres qu’il avait achetées avec beaucoup de flair. Cette collection changea beaucoup au cours de sa vie, en fonction de ses goûts et de ses moyens, qui étaient assez limités. Plusieurs toiles furent mises en vente individuellement, immédiatement après sa mort, mais lorsque la collection fut offerte aux enchères, en 1892, elle comprenait encore des trésors, comme Le Chardonneret de Fabritius, et trois tableaux avec figures de Vermeer comptant parmi ses œuvres majeures.

Les années 1860 virent Thoré asseoir son statut de critique et d’historien, grâce à la seconde publication des Salons de Thoré (1868), qui prouva au public à quel point ses jugements antérieurs avaient pu être confirmés par le temps. Dans les Salons qu’il publia plus tardivement, et qui n’avaient rien perdu de leur pugnacité, il s’attaquait à nouveau à son vieil ennemi, l’Académie de France à Rome, qu’il assimilait à la tyrannie impériale régnant à l’époque, de même qu’à l’obsolescence des thèmes classiques, mythologiques et religieux. Lorsqu’il défendait le naturalisme, il faisait de plus en plus souvent référence aux maîtres anciens, qu’il prenait comme précurseurs et exemples. On a pu ainsi, de manière tout à fait convaincante, considérer la place que Manet avait donné à l’art ancien dans son travail comme le résultat de l’influence de Bürger (voir Michael Fried, « Manet’s sources : aspect of his art, 1859-1865 », Artforum, mars 1969, p. 56-59). De même, on peut être tenté d’interpréter les trois copies qu’exécuta Courbet d’œuvres de Velázquez, Rembrandt et Hals, en 1869, non seulement comme une manière de se mesurer à trois grands maîtres que Bürger admirait tout particulièrement, mais aussi comme un ultime hommage à Thoré-Bürger.

Ce dernier fit beaucoup pour l’histoire de l’art, à son époque, mais également pour les générations suivantes. Il eut une influence formatrice sur la manière de percevoir et d’apprécier l’art du passé, et il parvint à faire part de ses découvertes à un large public d’artistes, de critiques, d’historiens et de collectionneurs. Entre autres hommages qui lui furent rendus à sa disparition, en 1869, on peut citer la remarque lapidaire de Castagnary : « La mort, à la veille du Salon, nous a pris Thoré, un écrivain […], celui d’entre nous qui s’y entendait le mieux aux choses de la peinture et en parlait avec le plus de justesse. »

Frances Suzman Jowell, historienne de l’art

Principales publications

Ouvrages et catalogues d’expositions

Sous le nom de Théophile Thoré

Sous le pseudonyme « W. Bürger »

  • Trésors d’art exposés à Manchester en 1857 et provenant des collections royales, des collections publiques et des collections particulières de la Grande-Bretagne. Paris : Vve Jules Renouard, 1857 (publiés en une vingtaine de feuilletons dans le Siècle ; republiés sous le titre Trésors d’art en Angleterre. Bruxelles ; Ostende : Librairie de Ferdinand Claassen, 1860. Paris : Librairie Renouard, 1865).
  • Musées de la Hollande. Amsterdam et la Haye. Études sur l’École Hollandaise. Paris : Librairie Vve. Renouard, 1858 (publié d’abord en partie dans L’Artiste).
  • Galerie d’Arenberg à Bruxelles. Avec le catalogue complet de la collection. Paris : Librairie Vve Renouard. Bruxelles et Leipzig : Auguste Schnée, 1859 (publié d’abord en partie dans l’Indépendance belge).
  • Études sur les peintres hollandais et flamands. Galerie Suermondt à Aix-la-Chapelle, avec le catalogue de la collection par le Dr. Waagen. Traduit par W. B. Paris : Librairie Renouard. Bruxelles ; Ostende : Librairie de F.Claassen et Cie, 1860. (publié d’abord en partie dans la Revue Germanique et dans L’Artiste).
  • Musées de la Hollande. Musée Van der Hoop à Amsterdam et Musée de Rotterdam. Paris : Librairie Renouard, 1860 (publié d’abord en partie dans L’Indépendance belge).
  • Scheltema P. – Rembrandt, discours sur sa vie et son génie. Éd. et comment. par W. Bürger. Paris : Librairie Renouard. Paris, 1866 ; (publié d’abord dans la Revue universelle des arts, XVIII, 1859, p. 273-299 ; 369-391 ; 485-516).
  • Le Musée d’Anvers. Paris : Librairie Renouard, 1862.
  • Le Musée d’Anvers, collection des 40 tableaux principaux, photographiés par E. Fierlants et accompagnés d’un texte descriptif. Bruxelles : Librairie Muquardt, s. d. [1862].
  • Blanc Charles. – Histoire des Peintres de toutes les écoles : École anglaise. t.III. Paris : Librairie Renouard, 1863.
  • Stirling William. – Velásquez et ses œuvres. Trad. de l’anglais par G. Brunet, avec des notes et un catalogue de tableaux de Velásquez par W. Bürger. Paris : Vve. Renouard, 1865.
  • Tableaux anciens des écoles hollandaise, flamande et allemande. Galerie Pommersfelden, Catalogue de la collection de Tableaux anciens du château de Pommersfelden, appartenant à M. le comte de Schönbrun. Paris : impr. J. Claye, 1867.
  • « Les Collections particulières ». In Paris Guide, par les principaux écrivains et artistes de la France. 2 vol. Paris : Librairie internationale, 1867, t.I, p.536-551.
  • Salons de T. Thoré, 1844, 1845, 1846, 1847, 1848. Préf. de W. Bürger (et l’introduction « Nouvelles tendances de l’art » signée par T. T., 1857). Paris, 1868 ; rééd. 1870. (Salons publiés d’abord dans Le Constitutionnel et en brochures par l’Alliance des Arts).
  • Salons de W. Bürger, 1861-1868, avec une préface par T. Thoré, vol. 1 ;vol. 2. Paris : Librairie de Vve Jules Renouard, 1870 (publiés d’abord dans l’ Indépendance belge et Le Temps).

Articles

Sous le nom de Théophile Thoré

  • « L’Art social et progressif ». L’Artiste, 1834, n° 7, p.38-42.
  • « Murillo ». L’Artiste, 1834, n°. 8, p. 165-166.
  • « Zurbaran, dit le Caravage espagnol ». L’Artiste, 1835, n° 9, p. 325-326.
  • « Études sur la peinture espagnole. Galerie du Maréchal Soult ». Revue de Paris, 1835, n° 21, p. 201-220, n° 22 ; n° 22, p. 44-65.
  • « Études sur la sculpture française depuis la Renaissance ». Revue de Paris, 1836, nouvelle série, n° 25, p. 330-354, n.s. n° 26, p. 25-42 ; n.s. n° 28, p. 86-105.
  • « Winckelmann ». L’Artiste, 1836, n° 11, p. 221-223.
  • « À MM. les directeurs du Musée du Louvre », L’Artiste, 1836, n° 11, p. 281-283.
  • « Un tableau de 1506. Première manière de Raphaël ». Revue de Paris, nouvelle série, 34, p. 53-57.
  • « Du classement des tableaux dans les galeries du Louvre ». L’Artiste, 1838, nouv. ser., 2 : p. 4-6.
  • « Artistes du dix-neuvième siècle. Léopold Robert ». Les Beaux-Arts, I, 1843, p. 265-270.
  • « Les Peintres du XIXème siècle, Louis David ». Trésor national, 1843, ser.3, III, p. 68-82.
  • « Artistes du dix-neuvième siècle. Géricault ». Les Beaux-Arts, I, 1843, p. 329-332, p. 345-347.
  • « Galeries particulières. Collection de M. de Cypierre. Les peintres au XVIIIe siècle ». Le Constitutionnel, le 1er octobre, 1844.
  • « Collections particulières de Paris, 2. Galerie de M. le marquis de Pastoret ». Le Constitutionnel, 19 août 1844.
  • « La Recherche de la Liberté ». L’Artiste, sér.4 , IV, 1845, p.116-118, 131-135, 156-158, 165-167, 183-186 (tiré à part).
  • « Études sur la peinture française depuis la fin du XVIIIe siècle. À propos de l’exposition de la société des peintres ». Le Constitutionnel, le 18 janvier 1846 (republié comme introduction au Salon de 1846).
  • « Revue des arts : le musée du Louvre. Nécessité d’un nouveau catalogue et d’un nouveau classement des tableaux ». Le Constitutionnel, 18 juillet 1846.
  • « Galerie de M. le comte de Morny ». L’Artiste, série 4, X, 1847, p. 51-54.
  • « Abolition de l’école francaise à Rome ». Le Constitutionnel, 12 décembre 1847.
  • « De l’école francaise à Rome ». L’Artiste, série 4, XI, 1848, p. 214-217.

Sous le pseudonyme de « W. Bürger »

  • « P. Scheltema, Van der Helst, avec des notes de W. Bürger ». Revue universelle des arts, 1857, 5, p.193-209.
  • « Révision du catalogue des tableaux du musée de Paris (écoles flamande, allemande et hollandaise) ». L’Artiste, 1858, nouv. sér. 3 : 1. « Rectifications necessitées par les documents du nouveau catalogue du Musées d’Anvers », p. 37-42 ; 53-57 ; 2. « Rectifications et additions proposées d’après des notes diverses », p. 129-134 ; 171-174 ; 197-199 ; 230-232 ; 247-248.
  • « P. Scheltema, Govert Flinck, avec des notes de W. Bürger ». Revue universelle des arts, 1858, 6, p. 501-512.
  • « Les Rembrandt de Buckingham Palace à Londres ». Revue universelle des arts, 1858, 7, p. 335-344.
  • « Généalogie de Rembrandt ». L’Artiste, 1858 nouv. sér. 4, p. 161-163.
  • « Les Dessins de Rembrandt au British Museum à Londres ». Revue Germanique, 31 août 1858, 3, p.392-403.
  • « Les Rembrandt des collections particulières d’Amsterdam. Galeries de M. Six van Hillegom – de M. van Loon – du Baron van Brienen ». L’Artiste, 1858, nouv.sér. 5, p.17-22.
  • « Sur Metsu – À M. le Rédacteur du catalogue du musée du Louvre ». L’Artiste, nouv. sér. 5, 1858, p.86-88.
  • « Sur Antonio Mor ». L’Artiste, nouv. série, 5, 1858, p.186-189.
  • « Catalogue des tableaux de Buckingham Palace ». Revue universelle des arts, 1858, 8, p.135-164.
  • « La Première Femme de Rembrandt ». Revue Germanique, 4, 31 décembre 1858, p. 560-578.
  • « Meinert Hobbema ». Gazette des Beaux-Arts, IV, 1859.
  • « Petit Guide des artistes en voyage. 1. Hollande ». Annuaire des Artistes et des amateurs, I, 1860, p. 247-264.
  • « Exposition de tableaux de l’école française ancienne tirés de collections d’amateurs ». Gazette des Beaux-Arts, VII, 1860, p. 258-277 ; 333-358 ; VIII, 1860, p. 228-240.
  • « Cabinet de M. L. Viardot ». Annuaire des Artistes et des Amateurs, 1861, II, p. 134-138.
  • « Petit Guide des artistes en voyage. 2. Belgique ». Annuaire des artistes et des amateurs, II, 1861, p. 285-308.
  • « Un tour en Allemagne – Coup d’œil sur les musées de Brunswick, de Berlin, de Dresde et de Cassel ». Revue Germanique, 1861, III, p. 613-626 ; XIV, p. 200-223.
  • P. Scheltema, « Ferdinand Bol, annoté par W. Bürger ». Revue universelle des arts, 1861, XIII, p. 81-95.
  • « Encore une Belle Jardinière de Raphaël ». Revue universelle des arts, 1861, XIV, p. 209-211 (signé T.T.).
  • « Nouvelles Tendances de l’art ». Revue germanique, 19, 1862, p. 60-80.
  • « Petit Guide des artistes en voyage. 3. Allemagne Rhénane ». Annuaire des Artistes et des Amateurs, III, 1862.
  • « Bibliographie étrangère : Rembrandt Harmens van Rijn, Ses précurseurs et ses années d’apprentissage par C. Vosmaer, La Haye, 1863 ; Rembrandt et ses secteurs aux musées de Cassel, de Brunswick et de Berlin par le même ; L’expositions de Delft, par le même ». Gazette des Beaux-Arts, XVI, 1864, p. 73-80.
  • « P. Scheltema, Meinert Hobbema. Quelques renseignements sur ses œuvres et sa vie, annoté par W. Bürger ». Gazette des Beaux-Arts, 1864, XVI.
  • « Galerie de M. M. Pereire ». Gazette des Beaux-Arts, XVI, 1864, p. 193-213, 297-317.
  • « Notes sur les Fabritius ». Gazette des Beaux-Arts 1865, XVIII, p. 80-84.
  • « Van der Meer de Delft ». Gazette des Beaux-Arts, 1866, XXI, p. 197-330, p. 458-470, p. 542-575.
  • « Le Christ bénissant les enfants par Rembrandt (galerie Suermondt à Aix-la-Chapelle) ». Gazette des Beaux-Arts, 1866, XXI, p. 251-260 (publié également dans Zeitschrift für Bildende Künst, 1866, I, p. 192-198.).
  • « Frans Hals ». Gazette des Beaux-Arts, 1868, XXIV, p. 219-233, p. 431-449.
  • « Dirk Hals et les fils de Frans ». Gazette des Beaux-Arts, XXV, 1868, p. 390-402.
  • « Meisterwerke des Braunschweiger Galerie in Radierungen von W.Unger. » 7. « Familienbild, nach Rembrandt » ; 11. « Gewitterlandschaft, nach Rembrandt ». Zeitschrift für Bildende Kunst, 1869, IV, p. 101-103, 159-160.
  • « Nouvelles études sur la galerie Suermondt à Aix-la-Chapelle ». Gazette des Beaux-Arts, 1869, deux. pér. I, p. 5-37, 162-187.

Direction d’ouvrages ou de revues

  • Bulletin de l’Alliance des Arts, 25 juin 1842-10 juin 1848.
  • La Vraie République, 26 mars-23 juin 1848 (collaboration avec Georges Sand, Pierre Leroux…).
  • Le Journal de la Vraie République, 29 mars-13 juin 1848.

Bibliographie critique sélective

  • Quérard Joseph-Marie. – Les Supercheries littéraires dévoilés. Galeries des auteurs apocryphes, supposes, déguisés, plagiaires, et des éditeurs infidèles de la littérature française pendant les quatre derniers siècles. Paris : L’éditeur, 1847-1853, 5 vol. (« ouvrage commencé d’imprimer en 1845 et achevé en septembre 1860 »), t. V, p. 376-382.
  • Proudhon Pierre-Joseph, « Musées de la Hollande : Amsterdam et La Haye. Études sur l’école hollandaise, par W. Bürger ». Revue trimestrielle, janvier 1859, p. 277-289.
  • Mantz Paul, « Livres d’Art. Trésors d’art Exposés à Manchester en 1857 par W. M. W. Bürger ». L’Artiste, 1857, p. 122-125.
  • Larousse Pierre. – Grand dictionnaire universel du XIXe siècle. Paris : Librairie classique Larousse et Boyer, 1867, t. II, p. 1422-23, ([Marius Chaumelin] « Bürger, (Willem) »).
  • Leclerq Émile, « William Bürger (Théophile Thoré) ». Revue de Belgique, 1869, II, p. 132-150.
  • Larousse Pierre. – Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle. Paris : administration du grand dictionnaire universel, 1876, t. XVI, p. 155-156 : [Marius Chaumelin] « Thoré (Théophile) ».
  • Petroz Pierre. – Un critique d’art au XIXe siècle. Théophile Thoré. Paris : F. Alcan, 1884.
  • Larroumet Gustave, « L’Art réaliste et la Critique, I. Théophile Thoré ». Revue des deux-mondes, 1892, VI, p. 801-842.
  • Catalogue de tableaux anciens, œuvres remarquables de Van Der Meer de Delft et autres […] tableaux modernes […], le tout formant la Collection de feu Thoré-Bürger dont la vente aura lieu […] le lundi 5 décembre 1892. Préf. de Paul Mantz. Paris : Imprimerie de l’Art, 1892.
  • Cottin Paul, éd. – Thoré-Bürger peint par lui-même. Lettres et notes intimes. Paris : Aux bureaux de la Nouvelle Revue Rétrospective, 1900.
  • Marguery H., « Un pionnier de l’histoire de l’art : Thoré-Bürger ». Gazette des Beaux-Arts, 1926, 67, p. 229-245, p. 295-311, p. 367-380.
  • Heppner Anton, « Thoré-Bürger en Holland, de ontdekker van Vermeer en zijn liefde voor Neerland’s kiunst ». Oud-Holland, LV, 1938, p. 17-34, p. 67-82, p. 129-144.
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Sources identifiées

Bruxelles, Musée royal de peinture et de sculpture

  • Archives, Dossier n°. 795

La Haye, Nationaal Archief

  • Vosmaer, collectie 548 inv. Nr.260:correspondentie van W. Bürger (Thoré) 1860-69.

La Haye, Rijksbureau voor Kunsthistorische Dokumentatie (R.K.D.)

  • Archief Thoré/Bürger, inv. n°. 1,2,3.

Paris, bibliothèque de l’INHA-collections Jacques Doucet

  • 23125-23154 Lettres de Thoré-Bürger à Burty

Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la photographie

  • Fonds de la bibliothèque de l’Arsenal : 7909-7919 : Papiers de Thoré-Bürger
  • Département des manuscrits :
    • Papiers Viardot, III, ms. N.a.fr. 16.274 (lettres envoyées par Thoré-Bürger à Viardot).
    • Fr.11955, nouv. acqu. : lettres d’artistes à Thoré-Bürger

Paris, Fondation Custodia

  • Lettres destinées à Thoré :
    • 5538 Delacroix
    • 6756 Aa/c Burty
    • Ca/Cb L Flameng
    • D Hedouin
    • E Th Fragonard
    • H (17) : lettres de Louis Viardot à Thoré
    • J David d’Angers
    • K Clays P-J
    • L Dubois L.A.
    • M Chabry
    • N Portaels J.F.
    • O (2) Stevens, Alfred
    • 6757 Millet
    • 6758 Rousseau
    • 6759 (5) Leys, baron Hendrik J. A
    • 6760 Israels, J
    • 6761a/c Smits, Eugene
    • 6762 Stevens, Alfred
    • 6763 Wiertz, Antonie
    • 6765 a/e Saint-Victor, P.comte de
    • 1990-A 562 Blanc J.J.L.
  • Lettres écrites par Thoré :
    • 1996-A.55 à Camille Marcille
    • 1999-A.4/4a à Michiels, Joseph-Alfred-Xavier
    • 6764 à Pierre-Joseph Proudhon.

Archives privées d’Etienne Bréton

  • Correspondance diverse

En complément : Voir la notice dans AGORHA